Intervention de Thierry Repentin

Réunion du 27 novembre 2013 à 9h30
Loi de finances pour 2014 — Article 41 et participation de la france au budget de l'union européenne

Thierry Repentin, ministre délégué :

Ce choix provenait également de motivations stratégiques, car les contributeurs nets entendaient diminuer la base de référence dans les négociations pour le budget 2014-2020.

Ainsi, en 2013, nous avons dû faire face à un report de charges, traduit dans les budgets rectificatifs de l’Union, de l’ordre de 11 milliards d’euros pour le budget de l’Union européenne, dont, pour la France, cette somme de 1, 8 milliard d’euros que vous avez citée, monsieur le président de la commission. Là encore, nous payons les factures du passé.

La France est un contributeur net important au budget de l’Union européenne, et elle continuera à l’être. Pour autant, nous ne pouvons pas nous contenter d’une lecture comptable consistant à analyser des flux entre le budget de l’Union européenne et le budget national.

Cette question des soldes nets est bien sûr importante, car nous devons faire preuve au niveau européen du même sérieux budgétaire que celui que nous mettons en œuvre au niveau national.

S’enliser dans le seul débat sur les soldes nets constituerait une erreur, car nous ne pouvons pas résumer les bénéfices de notre appartenance à l’Union européenne à un simple calcul mathématique ; ce serait nier les avantages que nous tirons de l’intégration européenne, du marché intérieur et de notre monnaie commune.

Parler du budget de l’Union européenne, c’est aussi parler de notre projet pour l’Europe, des politiques européennes qui irriguent les territoires et de la réorientation de ces dernières au service de la croissance.

Nous devons sortir d’un débat désincarné, M. de Montesquiou a raison de le souligner, pour donner du sens à ce que nous faisons, ensemble, grâce au budget européen. Celui-ci constitue ainsi un cadre financier pluriannuel au service de la croissance et de la solidarité.

Pour ce qui concerne la croissance, tout d'abord, contrairement à ce que certains ont essayé de faire croire à l’opinion publique ces dernières semaines, le prochain cadre financier pluriannuel ne marque pas un recul par rapport au précédent ; M. Botrel l’a souligné. Il s’établit, en euros courants – valeur que nous retenons, car elle correspond à la réalité de la mise en œuvre des politiques européennes – à 1 083 milliards d’euros en crédits d’engagement et 1 024 milliards d’euros en crédits de paiement.

Grâce aux mécanismes de flexibilité – M. Marc Massion y a fait référence – voulus par le Parlement européen, qui a joué un rôle important dans ce processus, avec le soutien de la France, ces crédits de paiement pourront effectivement être consommés. L’exécution 2014-2020 sera donc assurément supérieure de près de 40 milliards d’euros à l’exécution 2007-2013, qui ne s’est établie qu’à 881 milliards d’euros.

Nous préparons par conséquent la période à venir avec un budget à la fois réaliste et ambitieux, et qui nous permettra de répondre aux attentes de nos concitoyens. Comme nous l’avions demandé, ce budget est résolument tourné vers la croissance et la création d’activités.

Ce sont ainsi 142, 1 milliards d’euros qui seront consacrés à la croissance et à l’emploi pendant la prochaine période, soit une augmentation de près de 60 % par rapport à la période précédente ; Alain Bertrand y a fait référence. Cette enveloppe couvre en particulier le budget pour la recherche et l’innovation, qui passe de 55 à 79 milliards d’euros.

Cet investissement est déterminant pour créer les emplois et les activités de demain. Nous le savons tous ici, nos laboratoires recèlent de jeunes chercheurs talentueux ; à nous de leur donner les moyens, de les accompagner, pour qu’ils deviennent des champions européens et pour que leurs idées se transforment en emplois dans nos territoires.

Une enveloppe de 22 milliards d’euros sera consacrée aux infrastructures de transport, à l’énergie et aux télécommunications. L’Europe des grands travaux retrouve ainsi de la vigueur. Nous avons veillé à ce que le volet transport représente les deux tiers de l’enveloppe. En effet, celui-ci était prioritaire pour la France, car il doit nous permettre d’apporter un concours financier décisif à des projets comme le canal Seine-Nord ou la liaison ferroviaire Lyon-Turin, sur laquelle la Haute Assemblée s’est prononcée sans ambiguïté à la veille du sommet franco-italien de la semaine dernière.

Dans le même temps, nous avons consolidé les deux grandes politiques qui structurent le budget de l’Union européenne et participent, elles aussi, de la croissance.

Ainsi, la politique de cohésion a été totalement sauvegardée, alors que la précédente majorité l’avait réduite à une variable d’ajustement. Ce sont près de 16 milliards d’euros qui seront injectés dans l’économie de nos territoires de métropole et d’outre-mer.

Nous savons trop bien, ici au Sénat, à quel point cette politique est précieuse dans nos territoires, au regard du formidable effet de levier qu’elle représente pour la construction de nouvelles infrastructures, l’aménagement du territoire, la recherche et l’innovation, la formation professionnelle et le soutien aux entreprises. Grâce, entre autres, à la création des « régions en transition », nous pourrons bénéficier pour nos régions d’une enveloppe de 16 milliards d’euros sur la prochaine période. Les crédits seront gérés au plus près du terrain, car nous avons décidé d’en décentraliser la gestion aux conseils régionaux.

Toutefois, la politique de cohésion est également précieuse au regard de ce qu’elle peut apporter dans les autres États membres qui en ont besoin pour se développer. Ce sont autant de marchés potentiels à décrocher pour nos entreprises dans d’autres pays de l’Union européenne.

Plusieurs d’entre vous ont également insisté sur ce point, nous avons sauvé le fonds d’aide alimentaire aux plus démunis, initialement condamné à disparaître au 31 décembre 2013, à la suite d’une décision prise pendant la dernière législature. Nous n’avons pas voulu que ce fonds disparaisse, car cela aurait pu remettre en cause le travail des Restaurants du cœur, des Banques alimentaires, du Secours populaire ou de la Croix-Rouge.

Enfin, bien entendu, il est question de la PAC, au sujet de laquelle Jacques Delors disait que « le budget agricole et la politique agricole commune font partie du contrat de mariage des Européens ». Avec un budget de 64 milliards d’euros pour la France sur la période 2014-2020 et une augmentation de l’enveloppe du deuxième pilier en faveur du développement rural, le Gouvernement fait le choix de soutenir encore davantage la production animale, ainsi que l’élevage, monsieur Bertrand, notamment dans les zones difficiles.

Madame Bernadette Bourzai, Madame Michèle André, toutes les zones à handicap seront beaucoup plus aidées qu’elles ne l’étaient par le passé. La solidarité à l’égard de nos agriculteurs et du secteur de l’agroalimentaire est cruciale pour l’avenir d’une filière qui représente un potentiel important en matière de croissance et d’emploi.

Il y a aussi, dans ce budget, des dispositions visant à concrétiser une Europe plus solidaire. J’en veux pour preuve trois exemples majeurs.

Premièrement, une initiative sera mise en place dans les régions dont le taux de chômage des jeunes dépasse 25 % en 2012. Elle consiste à proposer à tout jeune de moins de 25 ans en dehors de toute insertion scolaire ou professionnelle, un stage, une formation et/ou un contrat de travail.

En France, dix régions pilotes ont été définies avant que ce dispositif ne soit élargi progressivement à l’ensemble du pays. En outre, il a été décidé, pour maximiser l’effet de ces crédits, d’en concentrer la consommation sur les années 2014 et 2015. Ce mécanisme viendra utilement compléter ce que nous faisons grâce au Fonds social européen. M. Michel Billout sera sans doute sensible à cette solidarité exercée en direction des jeunes qui se trouvent au chômage.

Deuxièmement, le Fonds européen d’aide aux plus démunis sera doté de 2, 8 milliards d’euros, auxquels s’ajoutera 1, 1 milliard d’euros supplémentaire, ce qui permettra de maintenir le niveau annuel de financement du programme. En France, 70 millions d’euros par an viendront en soutien de nos concitoyens les plus fragilisés.

Permettez-moi, à l’heure où les campagnes de distribution viennent de commencer, d’avoir une pensée aussi bien pour les bénéficiaires de ces aides que pour les bénévoles. Je veux leur dire que l’Europe restera à leurs côtés.

Par ailleurs, permettez-moi d’ajouter quelques mots sur le programme « Erasmus plus ». Nous sommes passés d’un budget de 8 milliards d’euros sur la période 2007-2013 à 16 milliards d’euros pour la période 2014-2020. Il s’agit d’une mesure pour accompagner la jeunesse de l’Union européenne, d’autant que nous allons ouvrir ces dispositions à des jeunes qui en étaient exclus : celles et ceux qui sont en formation par alternance dans les entreprises, mais également les apprentis.

Troisièmement, le Fonds européen d’ajustement à la mondialisation sera également maintenu, pour faire face aux restructurations industrielles en accompagnant les salariés licenciés vers le retour à l’emploi.

Mesdames, messieurs les sénateurs, voilà ce que je souhaitais évoquer avec vous au sujet du prélèvement sur recettes à destination du budget européen que le Gouvernement vous propose de voter aujourd’hui, en attendant que, un jour, la zone euro soit effectivement dotée d’un budget spécifique.

Je me réjouis que certains d’entre vous aient appelé une telle initiative de leurs vœux. En effet, elle répond à une proposition écrite de François Hollande et Angela Merkel, adressée à tous les chefs d’États et de gouvernements le 30 mai dernier. Personne avant eux ne l’avait fait.

En outre, j’espère que vous serez toujours aussi enthousiastes lorsque la proposition d’une ressource propre demandée à nos concitoyens pour alimenter le budget de l’Union européenne sera avancée.

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