Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 7 concerne le mode de recrutement des directeurs des établissements publics de santé.
Il est indiscutablement à rapprocher de l’article 6, que nous avons examiné vendredi dernier, et qui donne les pleins pouvoirs aux directeurs de ces établissements. Il est prévu que des non-fonctionnaires puissent devenir directeurs des hôpitaux publics.
À tous les articles de ce projet de loi, vous témoignez de votre volonté de privatiser les hôpitaux, de les gérer et de les diriger comme n’importe quelle entreprise.
Vous justifiez les dispositions prévues à l’article 7 par votre intention d’ouvrir les postes de directeur des établissements publics de santé à des compétences nouvelles. Les directeurs actuellement en poste apprécieront, tout comme les formateurs et les enseignants de l’École des hautes études en santé publique, l’EHESP.
Si l’on ne voit pas clairement de quelles compétences nouvelles devront être dotés les directeurs non fonctionnaires recrutés demain par les directeurs des ARS, les agences régionales de santé, on connaît les compétences actuelles dont ils se priveront. Les directeurs d’hôpitaux recrutés dans le privé, n’ayant pas satisfait au principe républicain du concours, ne bénéficieront pas de la formation complète de deux ans délivrée par l’EHESP, qui, construite autour de l’alternance, intègre déjà des cours de management, de gestion des conflits, de direction des ressources humaines, de stratégie et de projet d’établissement, bref, des modules très utiles à la gestion des établissements de santé en tant qu’entreprises.
Toutefois, cette formation comprend également des enseignements spécifiques à la direction d’un hôpital public tels que l’appropriation des politiques de respect des droits des patients et de la carte sanitaire, mais aussi, et surtout, d’importants modules destinés à mieux appréhender et respecter les principes inhérents aux services publics de santé, notamment l’organisation médicale, le respect de l’éthique médicale et le lien entre hôpital et santé publique. Ce sont autant de connaissances et de savoirs spécifiques que n’auront plus à maîtriser les futurs directeurs, dès lors qu’ils appliqueront à la perfection la règle comptable.
Alors, pour tenter de donner le change, le Gouvernement a précisé par voie d’amendement que les directeurs non fonctionnaires bénéficieront d’une « formation » à l’EHESP. Cette mesure est si floue qu’elle paraît d’ordre « cosmétique », la nature de cette formation n’étant précisée nulle part. On ne sait donc rien, madame la ministre, de ce que vous entendez par formation. Quelle en sera la durée ? Souhaitez-vous conserver le principe de l’alternance et du stage en milieu professionnel, qui constituent clairement, on le sait, un avantage pour le futur directeur ? Entendez-vous sacrifier tout ou partie de la formation en santé publique dispensée à Rennes ?
Dans l’intérêt de nos débats, il serait bienvenu que vous nous apportiez quelques précisions sur ce sujet.
Nous souhaiterions également connaître les critères qui conduiront, demain, les directeurs généraux des ARS à recruter ces directeurs. Un pourcentage de postes sera-t-il réservé aux non-fonctionnaires ? Entendez-vous réduire très prochainement le nombre de postes ouverts à concours ?
Toutes ces questions, en apparence très techniques, soulèvent de réels problèmes politiques, car nous craignons que, progressivement, et peut-être plus vite encore que nous ne l’imaginons, vous ne cessiez de recruter des fonctionnaires, afin d’embaucher des non-fonctionnaires, conformément à la fameuse logique de la RGPP, la révision générale des politiques publiques, et à votre souci de transformer les établissements publics de santé en entreprises.
C’est pourquoi, tenant compte de tous les risques que fait peser cet article sur le cœur même des missions de service public, à savoir la satisfaction des besoins en matière de santé tant individuels que publics, nous voterons contre cet article.