… ainsi que Bruno Sido, président de l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques. Ils nous donnent en effet l’occasion de revenir sur les perspectives d’évolution de l’aviation civile à l’horizon de 2040 en évaluant le formidable bond en avant effectué depuis l’époque que j’évoquais tout à l’heure. Comme M. le rapporteur en a fait la démonstration, cette tendance ne se démentira pas d’ici à 2040.
L’enjeu est clair : il s’agit de préserver l’avance de la France et de l’Europe dans un domaine éminemment stratégique. Le rapport a le grand mérite de mettre en évidence la vitesse vertigineuse à laquelle se développent cette industrie et les compétences technologiques et scientifiques qui la soutiennent.
Avec l’Union européenne, nous sommes en pointe dans ce secteur. À ce sujet, plusieurs orateurs ont déjà évoqué l’aventure d’Airbus-EADS : on peut dire que cette société porte des gènes européens. Il ne s’agit donc pas d’une mince affaire, d’autant qu’il faut bien reconnaître qu’une concurrence mondiale acharnée nous impose son rythme.
Aussi, la devise d’Airbus est de se dire qu’elle doit toujours avoir un Airbus d’avance, notamment par rapport à la Chine. Tiendrons-nous ce pari ? C’est tout le mal que nous nous souhaitons collectivement !
La croissance explosive du secteur aérien et des performances aéronautiques est incontestablement, avec celle de l’Internet, celle qui a le plus sûrement façonné notre environnement économique actuel. Perdre du terrain ici reviendrait à renoncer à la capacité d’agir significativement sur un secteur structurant de l’économie mondialisée.
Il est donc capital de s’engager dans une démarche prospective, dont ce rapport est un outil essentiel, afin de mettre en œuvre une stratégie qui engage aussi bien les secteurs du transport aérien que de la production industrielle et de la recherche et développement.
Face au doublement prévu du trafic de passagers entre 2030 et 2040, la recherche scientifique, la valorisation et l’exploitation industrielle de ses résultats vont jouer, à l’évidence, un rôle prédominant.
Il va en effet falloir répondre à de nombreux impératifs déjà évoqués, tels que la baisse nécessaire de la consommation des avions en kérosène, l’amélioration de l’efficacité de la navigation aérienne, ainsi que la limitation des rejets de gaz à effet de serre dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique. Pour répondre à ces défis, comme le précise aussi le rapport, l’utilisation des matériaux composites permet notamment de réduire le poids des aéronefs.
Dans un autre registre, la mise au point et la production de biokérosène constituent un enjeu central. J’ajoute, dans le souci du détail, que l’on s’achemine très rapidement vers la mise au point de moteurs électriques couplés au train d’atterrissage qui permettront de couper les réacteurs de l’avion pour circuler sur le tarmac avant l’envol.
Mes chers collègues, vous le voyez, la recherche est en constant mouvement, ce qui est une bonne chose.
Au vu de ces défis et du caractère concurrentiel des marchés du transport aérien et de la production aéronautique, il nous faut prendre très sérieusement en compte leur évolution telle qu’elle se dessine pour les trente prochaines années.
En effet, nous parlons ici de secteurs extrêmement compétitifs qui imposent le déploiement de stratégies industrielles et commerciales de très long terme. Une fois ces stratégies choisies, une forme d’inertie empêche de rectifier le tir. Nous ne sommes donc pas simplement soumis à une obligation de moyens, mais presque à une obligation de résultat.
La lourdeur des investissements à consentir, les contraintes productives et commerciales rendent difficile, sinon impossible, toute réactivité dans la correction des trajectoires engagées.
Lancés sur leur erre – terme de navigation maritime –, les grands acteurs du secteur que sont EADS-Airbus, d’un côté, et Air France, de l’autre, jouent véritablement le devenir de filières de prestige reconnues à l’échelon mondial, qui sont capitales non seulement pour le standing, l’image de marque de notre pays, mais également pour son attractivité et l’avenir de notre industrie.
Nous le savons, ces deux géants industriels sont parfaitement identifiés comme faisant partie du patrimoine aéronautique de notre pays. Tout doit donc être mis en œuvre pour assurer leur pérennité, qui doit être considérée comme relevant de l’intérêt général.
Monsieur le ministre, vous l’aurez compris, il s’agit donc d’un dossier politique qui justifie votre présence dans cet hémicycle aujourd’hui. Bien entendu, j’emploie le qualificatif « politique » au sens le plus littéral et le plus noble du terme.
J’en reviens à EADS-Airbus, dont la spécificité, faut-il vous le rappeler, est de compter l’État dans son actionnariat à concurrence de 14 %. Après le départ du groupe Lagardère, qui n’a pas été un partenaire très pertinent ni très actif, cette participation est déterminante pour permettre à l’État-stratège de continuer à jouer son rôle afin d’affronter les défis industriels que j’évoquais tout à l’heure.
Comme d’autres orateurs l’ont fait avant moi, il faut se féliciter que la puissance publique soit également mobilisée sur la recherche, deux des trente-quatre plans de la « nouvelle France industrielle » présentés dernièrement par Arnaud Montebourg concernant spécifiquement le secteur aéronautique et spatial. Il s’agit notamment de la mise au point d’un avion à motorisation électrique. Une telle attention se justifie par le poids que représente ce secteur dans notre économie : je le répète, il est au premier rang des exportations, ce qui est une bonne chose par les temps qui courent.
Dans le même temps, le soutien à l’ONERA et au CORAC ne doit pas se démentir, bien au contraire.
En ce qui concerne la compagnie Air France, grande utilisatrice d’Airbus, à l’autre bout de la chaîne, elle est actuellement dans une passe difficile, victime, comme l’a indiqué Charles Revet, de la concurrence des compagnies low cost, …