J’entends revenir sur un débat qui a débuté à l’Assemblée nationale et qui a malheureusement été écourté du seul fait de votre refus de le mener à son terme, madame la ministre.
En effet, nombreux ont été les députés, principalement de l’opposition, à souligner que l’article 8 faisait référence à une expression qui, selon le contexte, prêtait à débat et à analyses divergentes.
Ainsi la rédaction qui nous est proposée par le II de cet article pour l’article L. 6146-2 du code de la santé publique prévoit-elle : « Les professionnels de santé mentionnés au premier alinéa – c’est-à-dire les médecins, sages-femmes et odontologistes autorisés à exercer à titre libéral dans les établissements publics de santé – participent aux missions de l’établissement dans le cadre d’un contrat conclu avec l’établissement de santé, qui fixe les conditions et modalités de leur participation et assure le respect des garanties mentionnées à l’article L. 6112-3. Ce contrat est approuvé par le directeur général de l’agence régionale de santé et de l’autonomie ».
Je dois avouer ma perplexité quant à cette notion de participation. S’il s’agit de la participation technique, c’est-à-dire si le contrat précise les modalités d’application, les règles de travail des médecins concernés dans les établissements publics de santé, alors, j’en resterai là. Mais on peut appréhender cette notion de participation dans une perspective plus comptable, financière. Je crains fort qu’il ne s’agisse bien de cela, ici !
L’article 8 est naturellement à rapprocher de ceux que nous avons déjà étudiés et qui instauraient des modes d’intéressement collectif. Nous avons eu l’occasion de les dénoncer au cours de nos débats et d’en demander, en vain, la suppression.
Le doute est d’autant plus grand que l’exposé des motifs du projet de loi tel qu’il a été déposé à l’Assemblée nationale indique clairement que l’objectif est « d’instituer des modalités d’intéressement financier des personnels » et que vous avez vous-même reconnu, madame la ministre, que, comme aux articles 6 et 7, il s’agissait d’un intéressement collectif.
Cette fois, madame la ministre, il ne s’agit plus de personnel public : il s’agit de personnel privé, dont la rémunération par les établissements publics de santé peut donc être tout autre que celle que prévoit la T2A, c’est-à-dire plus attractive.
Qui plus est, l’article 8 fait également référence à la rédaction proposée dans le projet de loi pour l’article L. 6112-3 du code de la santé publique, qui définit les obligations de missions de service public. Cependant, il prévoit non pas la garantie, mais uniquement « la possibilité d’être pris en charge aux tarifs fixés par l’autorité administrative » ou aux tarifs conventionnels. Qu’est-ce qu’un droit qui est limité à une simple possibilité ?
Cela n’est pas sans me rappeler ce qui existe dans les universités, où les étudiants ont la possibilité de ne pas payer certains frais d’inscription, mais dans les faits, notamment par manque d’information, sont contraints de les acquitter ! Il y a décidément beaucoup d’analogies entre ce projet de loi et les textes relatifs aux universités !
Il n’en demeure pas moins, et ce sera ma conclusion, qu’avec votre gouvernement les médecins libéraux exerçant dans les établissements publics de santé ont tout à gagner de l’adoption de cet article, puisqu’ils pourraient percevoir une rémunération autre que les médecins hospitaliers publics, bénéficier d’un intéressement individuel, et obtenir des patients les moins bien informés le paiement de dépassements d’honoraires.