Nos collègues du Loiret ont de nombreuses occasions de se parler ; peut-être pourraient-ils m’épargner leurs échanges lors de mon intervention… §
J’en reviens à mon propos.
Les sociétés d’économie mixte se sont révélées, quant à elles, un bon compromis alliant l’expertise du privé pour l’exécution d’un contrat et la gouvernance des élus pour les choix stratégiques et politiques. Concrètement, il est important de garder la mainmise sur ce que nous attendons d’un nouveau projet : quelle politique tarifaire sera appliquée ? Quel public cible-t-on ? Quelles sont les priorités du service ?
Actuellement, les sociétés d’économie mixte permettent de répondre intelligemment à ces questions, grâce à l’instauration d’une entité comprenant au moins sept actionnaires, mais aussi à l’attribution d’une part majoritaire du capital aux collectivités locales, ainsi qu’à une véritable transparence due aux procédures de mise en concurrence.
La « SEM à opération unique » proposée notamment par notre éminent collègue Jean-Léonce Dupont est, de fait, à mi-chemin entre le PPP et la SEM classique ; elle vise à offrir aux collectivités territoriales un outil plus souple que la SEM pour allier la gouvernance publique avec le savoir-faire du privé.
En outre, la SEM à opération unique borne la société nouvellement créée à l’exécution d’un contrat, à la suite de quoi elle n’a plus vocation à exister, ce qui constitue une avancée par rapport aux SEM actuelles. Elle peut aussi permettre d’éviter de recourir aux PPP, ce qui est plutôt positif.
Cependant, je m’interroge sur la pertinence de la création d’un outil juridique supplémentaire, la palette des possibilités étant déjà assez large, avec les SEM, les sociétés publiques locales, les sociétés publiques locales d’aménagement ou encore les syndicats intercommunaux à vocation unique, même si ces dernières entités ne sont pas exactement de même nature... Cette SEM à opération unique s’éloigne encore un peu plus d’une réelle gouvernance publique. D’ailleurs, la proposition de loi ne cache pas son objectif d’éviter les retours à la régie.
Vous ne m’en voudrez pas de dire que cette forme de privatisation rampante des services publics est assez inquiétante, car les collectivités territoriales se sont révélées un véritable rempart social pour les Français depuis le désengagement de l’État dont nous avons déjà parlé.
Par ailleurs, d’autres questionnements tout à fait justifiés s’ajoutent aux premiers : avec un minimum de participation au capital de 34 %, quelles sont les garanties que la collectivité locale soit décisionnaire, alors qu’elle devra participer aux risques financiers ? Quelles sont les garanties en termes de transparence ? En effet, la mise en concurrence est peut-être une procédure complexe, mais elle a été mise en place pour éviter des dérives bien connues – c’est une évidence qu’il convient cependant de rappeler. Le fait que la mise en concurrence ait lieu non pas lors de la conclusion du contrat, mais à la constitution de la société, lors du choix de l’actionnaire, laisse le groupe écologiste dubitatif.
Pour conclure, vous l’aurez compris, la SEM à opération unique ne nous paraît pas infamante, d’autant plus que le texte de la proposition de loi a été amélioré par notre éminent rapporteur Jacques Mézard. Mais nous ne sommes pas convaincus. Si cet outil offre une meilleure option que le recours aux partenariats public-privé, nous lui préférons les SEM classiques, ou les autres entreprises publiques locales, davantage tournées vers une gouvernance publique.
Le groupe écologiste a donc décidé de s’abstenir sur cette proposition de loi, même si cette dernière ne suscite ni diatribe ni vindicte particulière de sa part, car elle a été élaborée, j’en suis sûr, dans un esprit constructif et utile pour les collectivités locales, sur l’initiative, entre autres, de Jean-Léonce Dupont, dont nous connaissons tous l’attachement au service public.