Intervention de Philippe Esnol

Réunion du 11 décembre 2013 à 14h30
Sociétés d'économie mixte contrat — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Philippe EsnolPhilippe Esnol :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui revêt un grand intérêt pour nombre d’entre nous qui avons, ou avons eu, en tant qu’élus locaux, l’expérience de la gestion des services publics locaux.

Les collectivités territoriales de différents niveaux assument une part croissante des services rendus à la population, au côté de l’État sinon parfois à sa place. Aujourd’hui, elles sont des acteurs majeurs des services publics de notre pays. Elles se sont vu confier la responsabilité de gérer certains d’entre eux. Elles ont également prouvé leur capacité à imaginer et à inventer de nouvelles formes de service public local. Le Sénat, qui représente les collectivités territoriales, mesure pleinement leur apport au service public, qui est majeur, et la reconnaissance dont elles doivent bénéficier en la matière.

Dans ce contexte, la création d’un nouvel outil de gouvernance au profit de l’action publique locale, permettant de mieux concilier la maîtrise de son service public par la collectivité avec les atouts de la gestion déléguée en termes d’efficacité, répond à un enjeu qui nous intéresse au plus haut point.

Tel est précisément l’objet de cette proposition de loi qui, comme son intitulé l’indique, vise à créer une nouvelle forme juridique de société d’économie mixte, assortie des garanties nécessaires à son bon fonctionnement.

Le premier intérêt de ce texte est de forger un nouvel outil juridique à la disposition des collectivités territoriales dans la gestion de leurs services publics locaux.

Mes chers collègues, vous le savez, les collectivités locales ont, à ce jour, la possibilité de recourir à une forme juridique fort usitée et utile, la société d’économie mixte, ou SEM. L’objet des SEM à opération unique, telles qu’elles sont définies par la présente proposition de loi, est de compléter le régime juridique des SEM tout en s’inspirant d’un outil proche et déjà reconnu par le droit communautaire sous la dénomination de partenariat public-privé institutionnel, ou PPPI.

Dans sa communication du 5 février 2008, la Commission européenne définissait le PPPI comme « une coopération entre des partenaires publics et privés qui établissent une entité à capital mixte qui exécute des marchés publics ou des concessions ». Pour celles et ceux que l’expérience, ces dernières années, des partenariats public-privé a laissés froids ou méfiants, il est clair que cette forme juridique apparaît comme beaucoup plus sécurisante.

La proposition de loi de nos collègues tend ainsi à créer des SEM contrat, qui ne seraient autres que des sociétés anonymes constituées par au moins deux actionnaires, dont une personne publique détenant entre 34 % et 85 % du capital et une personne privée. Autre spécificité de cette proposition de loi : la création ad hoc. La SEM contrat aurait un objet unique, la réalisation d’une opération de service public, de construction ou d’aménagement. Il s’agit donc bel et bien d’une structure de mission, dont la disparition est programmée à l’achèvement de ladite mission.

Nous sommes par conséquent en présence d’un outil de modernisation de la gestion publique locale, placé à la disposition des collectivités territoriales.

Chacun voyant bien l’intérêt d’un tel outil, quelles sont maintenant les garanties apportées à son fonctionnement ?

Il importe effectivement que le dispositif présente toutes les garanties de sécurité juridique pour les collectivités qui seraient amenées à y avoir recours, au niveau des relations instaurées avec les entités du secteur privé cocontractantes. Sur ce point, les améliorations apportées au texte par la commission des lois ont été significatives et je tiens à saluer l’excellent travail de son rapporteur, Jacques Mézard.

D’abord, dans un souci de précision, à la dénomination initiale de « SEM contrat » a été préférée celle, plus parlante, de « SEM à opération unique ». Cette modification a le mérite de la clarté et permet de comprendre, dès l’énoncé de son nom, de quel type d’outil juridique nous parlons.

Pour le reste, je ne vais bien évidemment pas reprendre l’ensemble des éléments qui viennent enrichir le texte. Je me contenterai de citer les avancées essentielles enregistrées dans le domaine sensible de la sécurité juridique, rendu d’autant plus crucial qu’il s’agit de la gestion d’un service public.

Le rapporteur a ainsi tenu à préciser les conditions dans lesquelles la personne publique définit, dans le cadre d’une délibération, les caractères constitutifs de la future SEM. Je note avec satisfaction que ces derniers incluent notamment, outre les caractéristiques principales de gouvernance de la future structure et la nature de l’opération faisant l’objet du contrat, la question évidemment fondamentale du coût prévisionnel global de l’opération pour le budget de la personne publique. C’est là un point essentiel au regard de la bonne gouvernance !

Autre élément important de sécurité juridique, un nouvel article est inséré dans le code général des collectivités territoriales, visant à déterminer les principes d’encadrement de la procédure et de la sélection du futur actionnaire opérateur, à travers un appel public à manifestation d’intérêt. Il est évident que cette procédure de rapprochement des deux entités publique et privée doit être d’une transparence absolue afin de garantir son caractère irréprochable.

Pour conclure, mes chers collègues, la présente proposition de loi me paraît forger des instruments de gouvernance locale utiles pour les collectivités dans une optique de gestion de leurs services publics locaux.

Par ailleurs, grâce à la qualité et au sérieux de son travail, la commission des lois a apporté des précisions supplémentaires importantes dans l’encadrement du dispositif. Je pense par exemple à la faculté, pour la personne publique qui serait minoritaire au sein de la SEM à opération unique, de disposer néanmoins d’une minorité de blocage et de la présidence des organes de direction, afin de préserver son influence et sa latitude de décision dans la gestion du service public local. Voilà, plus que d’autres encore, un élément de sécurisation juridique essentiel.

Pour toutes ces raisons, parce que le dispositif dont nous parlons conduit à des avancées qui s’avéreront utiles à de nombreuses collectivités, parce que nous l’avons assorti de toutes les garanties juridiques nécessaires, le groupe RDSE soutiendra cette proposition de loi.

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