Intervention de Pierre Hérisson

Réunion du 12 décembre 2013 à 15h00
Accueil et habitat des gens du voyage — Articles additionnels avant l'article 1er

Photo de Pierre HérissonPierre Hérisson :

On fait référence à ce que j’ai pu dire et écrire depuis un certain nombre d’années, mais seulement jusqu’à aujourd'hui. En commission des affaires économiques, à laquelle j’appartiens, nous avons évoqué le principe de l’abrogation de la loi de 1969. Je vous ai écoutée, madame la ministre.

L’abrogation de la loi précitée a sa place dans la proposition de loi Raimbourg, qui rétablit les équilibres ou supprime les déséquilibres qui m’ont été reprochés. Arrêtons de dire qu’il faut supprimer ou rétablir le carnet de circulation : il n’existe plus depuis que le Conseil constitutionnel l’a déclaré inconstitutionnel, même si je ne souscris pas du tout aux commentaires qui ont été formulés ni sur le Conseil constitutionnel et encore moins sur les propos qu’a tenus tout à l’heure notre collègue Jean-Claude Carle quand il dénonçait cette pratique consistant à modifier l’intitulé d’un texte quitte à complètement le dénaturer.

Mes chers collègues, je veux vous placer face à vos responsabilités à l’égard de l’ensemble des maires de France. Ceux-ci ont bien « intégré » la décision qu’a prise le Conseil constitutionnel à la suite de la question prioritaire de constitutionnalité dont il a été saisi. Pourquoi ce dernier n’a-t-il pas fait droit à la demande d’abrogation totale de la loi de 1969 ? Il a supprimé le carnet de circulation et mis également fin à l’obligation pour les gens du voyage de justifier de trois ans de rattachement ininterrompu dans la même commune pour leur inscription sur les listes électorales, rétablissant ainsi le droit commun et mettant fin à une discrimination. Pour ma part, cela faisait des années que je réclamais cette mesure : le Conseil constitutionnel, en lieu et place du Parlement, a réglé le problème.

En revanche, après de longs débats, il a maintenu l’obligation de rattachement à une commune ainsi que la disposition instaurant un quota maximal de gens du voyage par commune de rattachement de 3 % de la population. Pour cette raison, il n’est pas possible d’abroger la loi de 1969 dans sa totalité.

La sagesse voudrait que nous ne rejetions pas purement et simplement cette disposition, mais que nous la renvoyions à la proposition de loi Raimbourg, de manière à inscrire dans ce texte des mesures visant à éviter que les collectivités locales ne puissent être submergées par des flots d’inscriptions sur leurs listes électorales, sur le modèle de ce que j’avais écrit dans la proposition de loi que j’ai déposée en 2011.

Je vous rappelle que, sur les 36 767 communes que compte notre pays, 10 700 ont moins de 500 habitants. Si nous ne fixons pas un plafond et ne limitons pas la possibilité de s’inscrire sur les listes électorales de sa commune de rattachement, alors que c’est le droit commun qui va s’appliquer, il serait fort possible que, dans certaines communes, ce soient ces électeurs « rattachés » – je vise ici non pas la population des gens du voyage, mais tout citoyen de notre République française – qui deviennent majoritaires. C’est là un point fondamental.

En l’absence de toute garantie, nous ne pouvons pas abroger totalement la loi de 1969 sans avoir préalablement réfléchi à des mesures permettant d’éviter un tel écueil et sans les avoir adoptées.

D’autres dispositions de cette loi mériteraient également d’être réécrites, au nom de la lutte contre les discriminations, cependant que l’abroger totalement reviendrait à en créer de nouvelles.

Tout à l’heure, certains orateurs ont fait référence au colloque organisé à l’Assemblée nationale sur le sujet. Pour ma part, j’ai, à plusieurs reprises, longuement discuté de cette question. Avant d’abroger la loi précitée, il faut au préalable rédiger un nouveau texte qui non seulement veille à supprimer toute discrimination, mais également apporte un certain nombre de précisions sur les points que j’ai évoqués à l’instant.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe UMP votera contre ces quatre identiques amendements visant à abroger la loi de 1969.

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