C’est bien de cela qu’il s’agit, monsieur le président ! Je vous rappelle que le projet de loi de finances rectificative fait état de ces chiffres-là, et vous êtes bien placé pour le savoir !
Cette même exigence dans la gestion des deniers publics est à l’œuvre dans le présent texte. Nous procédons, avec Bernard Cazeneuve, aux ajustements de crédit de fin de gestion nécessaires pour tenir nos objectifs de dépense, et donc de déficit public.
Bernard Cazeneuve l’a précisé devant l’Assemblée nationale, le présent projet de loi de finances rectificative pour 2013 opère les mouvements de crédits nécessaires pour financer les besoins impératifs, tout en veillant au respect du total de dépenses autorisé par le Parlement. Ces ouvertures de crédits n’affectent en rien l’équilibre budgétaire, car elles sont entièrement compensées au sein de l’enveloppe « zéro valeur » par des annulations équivalentes portant, à hauteur de 90 %, sur des crédits qui avaient précisément été mis en réserve.
Reprise progressive de l’activité, exigence réaffirmée pour nos finances publiques : c’est dans ce contexte que nous voulons faire du projet de loi de finances rectificative pour 2013 un outil de mobilisation pour la croissance, un catalyseur, je le répète, pour l’activité économique du pays, dans la foulée du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi et des assises de l’entrepreneuriat.
Cette ambition se décline autour de trois axes majeurs.
Tout d’abord, nous poursuivons, avec ce texte, la réorganisation du financement de notre économie. Ensuite, nous prolongeons l’entreprise de rénovation de nos outils de soutien financier à l’export. Enfin, ce texte comprend un certain nombre de mesures de simplification. Permettez-moi de revenir rapidement sur ces points.
Le premier axe concerne le financement de l’économie.
Depuis dix-huit mois, j’œuvre pour faire en sorte que tous les besoins financiers des entreprises – trésorerie, fonds propres, dette – trouvent une réponse. Cela passe par une réforme des outils de soutien public au financement des entreprises, par un soutien spécifique à la trésorerie des entreprises et, surtout, par des réformes réglementaires pour drainer l’épargne et l’investissement vers les PME, les petites et moyennes entreprises, et les ETI, les entreprises de taille intermédiaire, puisque la France dispose – nous connaissons tous cette caractéristique – d’une épargne abondante, mais qui n’est pas assez orientée vers l’économie réelle.
Ces réformes ont déjà permis d’engranger des résultats positifs pour le financement des entreprises. Les PME ont ainsi vu leur encours de crédit progresser de manière dynamique, avec plus de 15 milliards d’euros supplémentaires, soit une augmentation de 12 % depuis la fin de l’année 2008.
Par ailleurs, je tiens à le signaler, les entreprises françaises se financent aujourd’hui à des taux historiquement bas : le niveau est en effet comparable à celui des entreprises allemandes, à peu près 100 points de base de moins que la moyenne de la zone euro. D’ailleurs, les différentiels de taux entre la France et l’Allemagne, ce que l’on appelle les « spreads », se sont fortement réduits depuis le mois de mai 2012. Je me souviens des prévisions, à l’époque, de certains oiseaux de mauvais augure. Or c’est exactement l’inverse qui s’est produit : le taux du crédit de la France est aujourd'hui meilleur qu’il ne l’était, de même que la confiance des investisseurs.
En raison de ces évolutions, nos entreprises peuvent profiter du redémarrage de l’économie européenne, et la crédibilité de la politique budgétaire est une condition pour que nous puissions continuer à les placer dans cette situation favorable.
Qu’y a-t-il de nouveau dans ce projet de loi de finances rectificative pour 2013 ?
La réforme de l’assurance vie engagée dans ce texte participe de cet effort, avec pour philosophie et pour finalité de drainer la première source d’épargne financière des ménages vers les placements les plus utiles aux entreprises, en particulier vers l’investissement en actions dans les PME et les ETI dont nous avons besoin. Pour simplifier, l’assurance vie, c’est plus de 1 400 milliards d’euros d’encours, massivement investis dans des titres obligataires, qui offrent aujourd'hui un rendement plutôt limité, mais avec, pour l’essentiel, une garantie du capital investi à tout moment.
S’il fallait résumer d’une phrase la situation actuelle de l’assurance vie, je dirais qu’elle combine la sécurité, à laquelle les Français sont très attachés, un faible rendement, qu’il faut améliorer, et une trop faible mobilisation en faveur du financement du tissu productif français.
La réforme qui vous est soumise et qui, je l’espère, recueillera votre assentiment unanime, mesdames, messieurs les sénateurs, quelles que soient les travées sur lesquelles vous siégez, d’autant qu’elle a été élaborée de façon totalement consensuelle, à partir, d’abord, d’un rapport parlementaire de deux députés, Mme Berger et M. Lefebvre, puis d’une concertation extrêmement large et approfondie, tend à conserver les points forts de l’assurance vie, à commencer par la sécurité, tout en la modifiant légèrement pour en faire davantage un levier pour le financement de nos entreprises.
Elle fait émerger de nouveaux produits qui, tout en offrant une garantie à l’assuré, lui permettront d’obtenir un meilleur rendement grâce à des investissements plus diversifiés, sans recherche – je le dis au passage – de rendement budgétaire et sans remise en cause du régime fiscal existant. Alors que c’était probablement la quadrature du cercle, je pense que nous y sommes parvenus.
Concrètement, cette réforme reposera sur deux piliers.
Le premier pilier est la création d’un nouveau produit « euro-croissance ». Ces fonds permettront à un assuré de bénéficier d’une garantie du capital si celui-ci reste investi au moins huit ans, et pourront être souscrits dans des contrats multisupports offrant beaucoup de souplesse, plus que les contrats garantis en euro. Ce sera, à moyen terme, un outil puissant de réallocation des actifs de l’assurance vie vers les investissements les plus utiles à notre économie.
Le second pilier est une réforme du régime fiscal de la transmission des contrats d’assurance vie, afin d’inciter les gros patrimoines à contribuer davantage au financement de certains pans de l’économie. La fiscalité applicable à la transmission des patrimoines les plus importants sera augmentée : le taux du barème applicable aux grosses successions sera revu à la hausse, passant de 25 % à 31, 25 % pour la tranche supérieure à 700 000 euros par bénéficiaire, après modification par l’Assemblée nationale. Mais, dans le même temps, les contrats respectant certains critères d’investissement bénéficieront d’un abattement d’assiette permettant de compenser cette hausse. Il s’agit donc d’une mesure incitative, destinée à encourager les investissements dans le capital des PME et des ETI, dans le logement social et intermédiaire, ainsi que dans les entreprises de l’économie sociale et solidaire, secteur qui, comme vous le savez, est une priorité pour nous.
Cette réforme de l’assurance vie a été longuement et mûrement préparée, réfléchie, débattue, dans une ambiance consensuelle, en respectant les attentes des assurés, sans casser l’économie de l’assurance et, je le répète, sans rendement budgétaire ni remise en cause des avantages fiscaux. Je vous le dis en toute honnêteté, mesdames, messieurs les sénateurs, quelles que soient les travées sur lesquelles vous siégez, c’est une très bonne réforme, qui sera utile à l’économie générale de ce projet de loi de finances rectificative.
À cette réforme de l’assurance vie s’ajoute une réforme du capital-investissement d’entreprise dont l’objectif est simple : développer l’industrie du financement de l’innovation en France, dans la lancée du plan innovation élaboré par Fleur Pellerin et Geneviève Fioraso. Le projet de loi de finances rectificative contient donc des mesures fiscales incitant les entreprises à investir dans les PME innovantes, matérialisant ainsi un des engagements pris par le Président de la République lors de la conclusion des Assises de l’entrepreneuriat.
Concrètement, le nouveau dispositif permettra aux entreprises d’amortir sur cinq ans, et dans une certaine limite de leur actif, leur souscription minoritaire au capital de PME innovantes ou de fonds communs de placement majoritairement investis dans des PME innovantes. Ainsi, d’une certaine manière, les grandes entreprises seront incitées à investir dans les plus petites, en fonction d’un critère, l’innovation. Nous devons tous nous mobiliser autour de cet enjeu important : en effet, nous le savons bien, c’est par l’innovation et la compétitivité que la France tiendra son rang dans la mondialisation et renforcera encore son potentiel de croissance.
Cette mesure, ajoutée à la réforme de la fiscalité des plus-values mobilières et à la création d’un PEA-PME, très attendu par les PME et les ETI, constituera un vecteur puissant de soutien à l’investissement dans les PME. Le Gouvernement a par ailleurs déposé un amendement, à l’Assemblée nationale, pour mettre en œuvre une autre mesure du plan innovation qui vise à améliorer le fonctionnement des fonds commun de placement dans l’innovation, les FCPI, et des fonds d’investissement de proximité, les FIP. Ces fonds constituent un canal important d’investissement en fonds propres dans les PME innovantes. Il s’agit donc, une nouvelle fois, d’améliorer les pratiques de gestion et de mieux structurer le paysage de cette activité, aujourd’hui trop morcelée.
Telles sont donc les mesures relatives à ce premier axe, c'est-à-dire à la réorganisation du financement de l’économie et à l’orientation de l’épargne vers l’économie réelle, en direction des PME et des ETI.
Deuxième axe du projet de loi de finances rectificative pour 2013, nous poursuivons la rénovation, engagée par ma collègue Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur, de nos outils de soutien financier à l’export.
Les dispositions de ce texte nous permettront notamment de nous aligner sur les meilleures pratiques de nos partenaires, pour aider nos entreprises à être compétitives face à leurs concurrents. Nous savons que ces dispositifs de financement export font souvent la petite différence, en plus ou en moins, permettant d’emporter de très gros contrats. Or ceux-ci constituent un élément essentiel de rééquilibrage de notre balance commerciale et, surtout, ils permettent d’offrir des débouchés à nos entreprises et de créer des emplois. J’ai beaucoup d’exemples en tête, mais je ne peux pas vraiment les évoquer car ils entrent précisément dans ce jeu de la concurrence qui, bien mené, permet à la France de tenir son rang.
Nicole Bricq a déjà activement réformé nos outils, lors de l’adoption du projet de loi de finances rectificative pour 2012 et en mai dernier, avec la création du label « Bpifrance Export », qui a permis de rationaliser les dispositifs existants et d’en créer de nouveaux, comme le prêt de développement export, pour soutenir la trésorerie des entreprises exportatrices. Ces initiatives ont déjà porté leurs fruits. Elles ont permis d’abaisser le coût des financements exports pour améliorer la compétitivité de nos entreprises, de démocratiser ces financements exports au profit des ETI et PME de croissance, et de mieux soutenir nos grands contrats, en particulier dans le secteur aéronautique, secteur très puissant de notre économie, avec des mesures ayant engendré une amélioration équivalente à un gain de compétitivité d’environ 5 % – ce qui est considérable !
Le projet de loi de finances rectificative pour 2013 prolonge cet effort de rénovation et de modernisation de grande ampleur à travers trois dispositifs.
Tout d’abord, en 2012, nous avons mis en place une garantie de refinancement, afin de diminuer le coût des crédits à l’exportation en facilitant l’accès à la liquidité auprès d’investisseurs privés. Ce mécanisme consiste à octroyer au refinanceur des crédits à l’exportation une garantie à 100 % couvrant le risque de non-paiement. En cela, il permet d’améliorer l’accès à la liquidité des établissements bancaires pour la mise en place de crédits exports et donc, in fine, de diminuer le coût de ces derniers. Cette année, je vous propose d’étendre le périmètre d’utilisation de cette garantie, dans le double objectif, d’abord, de continuer à améliorer le coût des crédits exports et, ensuite, de faciliter l’accès à la liquidité en euro et en dollar. J’espère que cette mesure de bon sens, utile à nos entreprises, recueillera l’assentiment général.
Par ailleurs, le projet de loi de finances rectificative pour 2013 améliore le dispositif de couverture des chantiers navals dans la période de construction des bateaux. La construction navale est un secteur à la pointe de la technologie en France, qui a déjà remporté de très importants marchés. Je me suis battu – c’était il y a un an, exactement – pour les chantiers navals de Saint-Nazaire qu’on disait en difficultés et proches de la fermeture. Aujourd’hui, ces chantiers ont obtenu des commandes jusqu’en 2016, représentant des millions d’heures de travail et des milliards d’euros, avec, notamment, la fabrication du plus grand paquebot de croisière au monde. Ils sont repartis de l’avant et la construction navale a encore d’autres perspectives très importantes dans les temps qui viennent. Je ne les présente pas ici, mais cela nécessite de mobiliser, pour chaque projet, des ressources bancaires importantes sur des périodes longues. Il serait absurde, avec une telle avance technologique, une telle excellence technologique, de ne pas emporter de marchés parce que, justement, le financement manque.
Enfin, le projet de loi de finances rectificative pour 2013 permettra à l’État de se substituer aux assureurs-crédit privés en cas de défaillance de marché sur certains pays, là où ce n’est pas possible aujourd’hui. Dans certains cas, tels que les crises économiques ou certains événements politiques, nos entreprises sont, hélas, confrontées à l’impossibilité de trouver une couverture auprès des assureurs-crédit privés pour leurs opérations d’exportation de court terme, avec, évidemment, des effets négatifs sur la capacité des exportateurs français à s’imposer sur les marchés internationaux. Si vous le décidez, mesdames, messieurs les sénateurs, ce texte nous permettra d’intervenir lorsqu’une telle carence de marché sera constatée au bénéfice du commerce courant, notamment effectué par les PME et les ETI. Là encore, c’est une très forte incitation à aller de l’avant.
Toutes ces dispositions vont permettre de soutenir nos entreprises à l’export, objectif que cherche à atteindre, au premier chef, la ministre du commerce extérieur et auquel j’entends contribuer à la place qui est la mienne, comme responsable des réformes du financement de notre économie.
Ces initiatives législatives sont en permanence appuyées et relayées par des initiatives politiques. Je pense, par exemple, à la tenue de la grande conférence économique entre la France et l’Afrique à Bercy, la semaine dernière, qui a rassemblé plus de 500 entreprises, une cinquantaine de ministres présents à Paris pour le sommet de l’Élysée, mais aussi plusieurs chefs d’État, dont le Président de la République française. Ce type de manifestation permet de catalyser les opportunités d’investissement et d’exportation pour nos entreprises sur le continent africain, qui représente une formidable opportunité pour l’économie française. Nous devons nous inscrire dans les perspectives d’avenir qu’offre ce continent ami, où la France est présente et où elle doit passer d’une logique de rente, d’acquis sur laquelle elle a un peu vécu à une logique plus offensive et conquérante, une logique de flux.
Troisième axe du projet de loi de finances rectificative pour 2013, nous poursuivons le choc de simplification voulu par le Président de la République.
À travers plusieurs dispositions spécifiques, nous simplifions les règles et, surtout – je sais que beaucoup d’entreprises et de particuliers y tiennent – les relations avec l’administration. Comme vous le savez, le Premier ministre a lancé un chantier de remise à plat de la fiscalité. Je l’évoquais cet après-midi, dans cet hémicycle, à l’occasion des questions d’actualité. Nous entendons créer une nouvelle relation, fondée sur la confiance, entre l’administration fiscale et l’usager. Dans ce cadre, il est prévu de simplifier les obligations déclaratives à l’impôt sur le revenu en généralisant les cas de dispense de justificatifs, d’étendre le recours obligatoire au télépaiement de la taxe sur les salaires ou de légaliser le principe de gratuité des prélèvements opérés à l’initiative de l’administration fiscale pour le paiement des impôts.
Cette dimension est décisive pour l’attractivité du pays. Elle fait partie des priorités que nous mettons en œuvre, avec Bernard Cazeneuve. C’est une véritable révolution, je pèse mes mots, une révolution qui certes est encore silencieuse, mais qui n’en est pas moins en marche. Elle ne vise pas Bercy, mais part de Bercy. Lisibilité et simplicité de la relation, tels sont les objectifs que nous cherchons à atteindre et qui devront s’approfondir dans le futur.
Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les grandes lignes du texte que je vous présente aujourd’hui.
Comme tout collectif de fin d’année, celui-ci contient par ailleurs plusieurs mesures auxquelles je sais que la Haute Assemblée sera particulièrement attentive, en matière de fiscalité locale. Le Gouvernement a ainsi déposé, à l’Assemblée nationale, un amendement tendant à reprendre la proposition de loi de votre rapporteur général François Marc, visant à lancer l’expérimentation en matière de valeurs locatives des locaux d’habitation, ou encore un amendement ayant pour objet de moderniser l’assiette de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux, l’IFER, pour le secteur des télécommunications, qui constitue une ressource régionale.
Mais je conclurai mon propos en rappelant que l’enjeu de ce projet de loi de finances rectificative est avant tout la poursuite d’un agenda pour la croissance.
Les finances publiques et la réduction des déficits sont des enjeux majeurs : ils mobilisent tout le Gouvernement, à commencer par moi-même et par le ministre du budget. Parce que le redressement des finances publiques, tout comme le désendettement, est une absolue nécessité, …