Intervention de André Gattolin

Réunion du 13 décembre 2013 à 14h30
Loi de finances rectificative pour 2013 — Article 14

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Madame la présidente, je sais que cet amendement reviendra à l’Assemblée nationale.

En effet, nous avons beaucoup travaillé sur cette question avec le cabinet de Fleur Pellerin et avec celui de la ministre de la culture ; nous sommes donc conscients des contraintes budgétaires. Nous avons également beaucoup travaillé de manière transpartisane, au Sénat et à l’Assemblée nationale. Nous savons que l’industrie du jeu vidéo crée de l’emploi et, surtout, de la valeur ajoutée sur nos territoires. En effet, alors que les industries culturelles sont généralement concentrées à Paris, ce secteur s’appuie sur des pôles très performants, de qualité internationale, en région.

Les mesures qui ont été votées à l’Assemblée nationale permettent un progrès, que je tiens à saluer.

Cependant, je le répète, l’industrie du jeu vidéo est très menacée. Nous arriverons peut-être à maintenir une partie de l’emploi en France, mais les limitations budgétaires actuelles m’inspirent quelques doutes. En outre, vice-président du groupe interparlementaire d’amitié France-Canada et secrétaire du groupe France-Québec, je rencontre souvent les autorités de villes comme Montréal, Québec ou Toronto, et je peux dire qu’il y a aujourd'hui une vraie inquiétude.

Toutes les semaines ou presque, j’entends que des sociétés installent leurs studios au Canada. Ainsi, Ankama, l’irréductible Gaulois ancré à Roubaix avec ses quelque 500 emplois, vient de créer une filiale à Montréal et va y assurer une partie de son développement. C’est maintenant Technicolor, ex-Thomson, qui va installer ses studios d’animation numérique dans la métropole québécoise. C’est la quatrième ou cinquième société française de ce type à le faire !

Que fait-on pour retenir ces sociétés ? Quand on me répond que l’on a créé le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, ou CICE, je rappelle que ce dernier ne concerne que les rémunérations inférieures à 2 500 euros ! Or le secteur du jeu vidéo emploie des personnes qui ont suivi des formations de niveau bac+5 ou bac+6, très demandées sur le marché. Autant vous dire que le profil des personnes recrutées empêche l’éligibilité au CICE !

Face à des pays où le crédit d’impôt s’élève à 37, 5 %, 50 %, voire plus, de la masse salariale, nous ne pouvons pas faire autrement que de nous doter de nouvelles formes de soutien à ces secteurs, stratégiques pour le renouveau de notre industrie.

Il faudra à un moment que l’on se demande ce que l’on fait de notre argent. Cherche-t-on perpétuellement à sauver des emplois dans des industries en difficulté qui nous coûtent très cher ou investit-on dans les industries de demain, qui disposent de moyens ?

Nous devons engager la réflexion sur ce que doit être la réindustrialisation et sur la manière dont elle doit s’opérer, à partir de nos matières humaines, de nos ressources et de nos savoirs, dans une perspective de développement des technologies du numérique et de l’économie d’avenir.

Je n’adresse aucun grief à la ministre ; pour en avoir beaucoup discuté avec elle, je sais qu’elle est très au fait du sujet. Mais je regrette que, faute de vision d’ensemble, nos entreprises performantes, nos potentielles start-up, partent les unes après les autres à l’étranger pour y devenir de grands groupes… Ainsi, si nous sommes très fiers d’avoir un champion national avec Ubisoft, nous devons bien nous rendre compte que la très grande majorité de son chiffre d’affaires est réalisée en dehors de la France. C’est bien dommage.

Cela dit, j’accepte de retirer mon amendement.

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