Comment un statut supplémentaire, quand bien même il reposerait sur des rémunérations variables, pourrait-il avoir une attractivité suffisante par rapport aux rémunérations pratiquées dans le secteur privé commercial, qui sont sans aucune mesure avec ce que pourraient proposer les établissements publics de santé, même après l’adoption de l’article 10 ? Telle est la question qui est au cœur de nos préoccupations.
Pourtant, le constat fait par le Gouvernement est bon. Les hôpitaux publics connaissent un véritable déficit. On estime à 20 % la part des postes de praticien à temps plein qui sont aujourd’hui vacants. Vous l’avez dit et répété, madame la ministre, et nous partageons ce constat.
En revanche, nous divergeons sur les réponses qu’il convient d’apporter. Nous considérons que, au lieu de créer un nouveau statut destiné à d’éventuels praticiens qui, exerçant dans le secteur privé commercial, accepteraient de venir travailler dans le public, il faudrait s’attaquer aux écarts de rémunération existant entre les médecins du secteur public et ceux du secteur privé commercial. Cela soulève la question de la tarification qui, dans bien des cas, n’a pas été revue depuis plusieurs décennies.
Nous avons reçu, tout comme nos collègues de la majorité sans doute, un abondant courrier de grands chirurgiens intervenant dans le secteur public et nous demandant de ne pas modifier les règles qui leur sont applicables en termes de dépassement d’honoraires. Ils n’hésitaient pas à mettre dans la balance la poursuite de leur activité dans les établissements publics.
Cette question était au centre des manifestations organisées l’an dernier à la suite desquelles la majorité a répondu aux revendications des personnels médicaux, plus particulièrement de tous ceux qui exercent des dépassements d’honoraires.
Pour notre part, nous sommes opposés aux dépassements lorsqu’ils constituent une véritable source de rémunération et que leur montant rend l’accès aux soins plus inégalitaire.
Madame la ministre, nous formulons une contre-proposition : nous vous suggérons de rendre la fonction publique réellement attractive, de reconnaître les compétences particulières des praticiens hospitaliers en revalorisant leur rémunération, de garantir aux médecins qui exercent dans les établissements publics de santé des conditions de travail de très grande qualité leur permettant d’associer pratique, éducation, c’est-à-dire enseignement, et recherche. Voilà une réponse ambitieuse.
À l’heure actuelle, la pratique des dépassements d’honoraires pèse sur tous ceux qui ne bénéficient pas d’une couverture maladie complémentaire de haut niveau. D’ailleurs, on se dirige aujourd’hui de plus en plus vers des complémentaires santé tarifées selon l’âge et les ressources dont dispose le malade, et ce afin d’obtenir des résultats intéressants.
Il faut bien le dire, dans ce système de tarification à l’acte et de dépassements d’honoraires, le « reste à charge » repose le plus souvent sur l’assuré, c’est-à-dire sur le patient lui-même, qui supporte la majeure partie de la dépense. Les plus démunis ne peuvent avoir accès aux soins et recevoir un remboursement important.
Madame la ministre, comment entendez-vous attirer des professionnels dans les hôpitaux publics dès lors que vous ne cessez, avec l’ensemble du Gouvernement, de stigmatiser le service public en l’accusant de toutes les lenteurs, de tous les maux, y compris du creusement des déficits ?
Il faudrait également que vous garantissiez aux praticiens hospitaliers que les conditions de travail ne se dégraderont pas, ce qui sous-entend que vous preniez les mesures nécessaires pour faire cesser le large plan social que connaissent les hôpitaux. En effet, ce que recherchent les praticiens hospitaliers, c’est non seulement une rémunération importante, mais également la qualité d’un entourage professionnel, d’un plateau technique compétent et d’un personnel en nombre. Ils veulent travailler, et on les comprend, dans des locaux entretenus, sécurisés, et disposer des appareils fonctionnant selon les nouvelles technologies, lesquelles évoluent chaque année. Cela appelle donc des moyens supplémentaires.
Telles sont les remarques que nous souhaitions formuler, madame la ministre.