Intervention de Jean-Luc Fichet

Réunion du 17 décembre 2013 à 9h45
Questions orales — Transfert des ouvrages d'art vers les collectivités territoriales

Photo de Jean-Luc FichetJean-Luc Fichet :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, de nombreuses communes ont vu leur développement économique et démographique s’engager avec la création d’infrastructures routières et ferroviaires. Cette politique des grands travaux, mise en œuvre après la Seconde Guerre mondiale, avait pour finalité de désenclaver les territoires. Des routes, des ponts, des tunnels – ce que l’on désigne globalement sous le nom « ouvrages d’art » – ont alors été construits.

L’État a longtemps assumé l’entretien de ces ouvrages, tels les ponts qui surplombent des voies rapides, au regard de l’expertise nécessaire et du coût des travaux. Aujourd’hui, l’émergence de la problématique en cause est liée à un double mouvement : d’une part, le transfert de la gestion des routes nationales aux collectivités territoriales, en particulier aux départements et, de l’autre, l’évolution des statuts de la SNCF ou de Voies navigables de France, dont le fonctionnement s’apparente de plus en plus à celui de sociétés privées.

Faute de règles juridiques précises et incontestables, les principes régissant cette question ont été définis via une jurisprudence ancienne et constante du Conseil d’État, selon laquelle les ouvrages d’art de rétablissement de voies interrompues par la construction d’une nouvelle infrastructure de transports sont incorporés à l’infrastructure dont ils relient les deux parties. Ce principe est valable alors même que l’ouvrage d’art a été construit par une autre personne morale que celle qui assure l’entretien de la voie portée.

De nombreuses collectivités territoriales ignorent les obligations qui leur incombent : or la collectivité est responsable de la surveillance, de l’entretien, de la rénovation et du renouvellement éventuel de l’ouvrage d’art !

Plusieurs communes et départements ont récemment reçu une information officielle leur détaillant leurs obligations d’entretien et de mise aux normes de ces ouvrages. À cet égard, une polémique a éclaté l’été dernier. Dans mon département, les communes de Saint-Ivy et de Rédéné m’ont alerté sur ce sujet.

Madame la ministre, il faut le rappeler, les projets de réalisation d’une infrastructure de transports coupant une voirie déjà existante comme les projets de rétablissement, sont, la plupart du temps, imposés par l’État à la collectivité territoriale. Celle-ci ne dispose d’aucun pouvoir de décision mais elle doit en payer la facture !

Le Sénat s’est penché sur cette grave question. Au mois de mars 2012, il a adopté une proposition de loi, présentée par notre collègue Mme Evelyne Didier, visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies. Ce texte était destiné à définir un cadre protecteur pour les collectivités territoriales. Il bénéficiait du soutien de l’Association des maires de France et de l’Association des départements de France. Las, l’Assemblée nationale ne s’est pas saisie à son tour de cette question essentielle.

Pourtant, le poids financier qui résulte de l’application des principes jurisprudentiels en la matière est si important que les collectivités ne peuvent faire face de manière satisfaisante à leurs obligations, même si elles s’exposent à voir leur responsabilité pénale engagée.

Faute de moyens financiers mobilisables, certaines collectivités sont contraintes de réduire le service rendu par leur voie, voire d’en interdire l’utilisation pour des raisons de sécurité. À ce titre, le Gouvernement a-t-il prévu un dispositif particulier permettant d’accompagner les plus petites collectivités territoriales dans cette nouvelle gestion, qu’il est difficile de laisser à leur seule charge ?

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