La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
La parole est à M. Jean-Luc Fichet, auteur de la question n° 588, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, de nombreuses communes ont vu leur développement économique et démographique s’engager avec la création d’infrastructures routières et ferroviaires. Cette politique des grands travaux, mise en œuvre après la Seconde Guerre mondiale, avait pour finalité de désenclaver les territoires. Des routes, des ponts, des tunnels – ce que l’on désigne globalement sous le nom « ouvrages d’art » – ont alors été construits.
L’État a longtemps assumé l’entretien de ces ouvrages, tels les ponts qui surplombent des voies rapides, au regard de l’expertise nécessaire et du coût des travaux. Aujourd’hui, l’émergence de la problématique en cause est liée à un double mouvement : d’une part, le transfert de la gestion des routes nationales aux collectivités territoriales, en particulier aux départements et, de l’autre, l’évolution des statuts de la SNCF ou de Voies navigables de France, dont le fonctionnement s’apparente de plus en plus à celui de sociétés privées.
Faute de règles juridiques précises et incontestables, les principes régissant cette question ont été définis via une jurisprudence ancienne et constante du Conseil d’État, selon laquelle les ouvrages d’art de rétablissement de voies interrompues par la construction d’une nouvelle infrastructure de transports sont incorporés à l’infrastructure dont ils relient les deux parties. Ce principe est valable alors même que l’ouvrage d’art a été construit par une autre personne morale que celle qui assure l’entretien de la voie portée.
De nombreuses collectivités territoriales ignorent les obligations qui leur incombent : or la collectivité est responsable de la surveillance, de l’entretien, de la rénovation et du renouvellement éventuel de l’ouvrage d’art !
Plusieurs communes et départements ont récemment reçu une information officielle leur détaillant leurs obligations d’entretien et de mise aux normes de ces ouvrages. À cet égard, une polémique a éclaté l’été dernier. Dans mon département, les communes de Saint-Ivy et de Rédéné m’ont alerté sur ce sujet.
Madame la ministre, il faut le rappeler, les projets de réalisation d’une infrastructure de transports coupant une voirie déjà existante comme les projets de rétablissement, sont, la plupart du temps, imposés par l’État à la collectivité territoriale. Celle-ci ne dispose d’aucun pouvoir de décision mais elle doit en payer la facture !
Le Sénat s’est penché sur cette grave question. Au mois de mars 2012, il a adopté une proposition de loi, présentée par notre collègue Mme Evelyne Didier, visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies. Ce texte était destiné à définir un cadre protecteur pour les collectivités territoriales. Il bénéficiait du soutien de l’Association des maires de France et de l’Association des départements de France. Las, l’Assemblée nationale ne s’est pas saisie à son tour de cette question essentielle.
Pourtant, le poids financier qui résulte de l’application des principes jurisprudentiels en la matière est si important que les collectivités ne peuvent faire face de manière satisfaisante à leurs obligations, même si elles s’exposent à voir leur responsabilité pénale engagée.
Faute de moyens financiers mobilisables, certaines collectivités sont contraintes de réduire le service rendu par leur voie, voire d’en interdire l’utilisation pour des raisons de sécurité. À ce titre, le Gouvernement a-t-il prévu un dispositif particulier permettant d’accompagner les plus petites collectivités territoriales dans cette nouvelle gestion, qu’il est difficile de laisser à leur seule charge ?
Monsieur le sénateur, je vous prie avant tout d’excuser l’absence de Frédéric Cuvillier, qui est actuellement à Bruxelles, dans le cadre du conseil des ministres européens de la pêche.
Comme mon collègue vous l’a indiqué en réponse à la question écrite que vous avez consacrée à ce sujet, « en matière d’ouvrages de franchissement, la solution dégagée par la jurisprudence, de portée constante, impose au propriétaire de la voie portée d’entretenir l’ouvrage, sauf convention contraire. Ce principe s’applique à toutes les catégories d’infrastructures de transport – routes, chemins de fer, canaux – quel que soit le schéma de superposition entre deux voies et quels que soient les maîtres d’ouvrage de l’infrastructure nouvelle : l’État et ses concessionnaires, les établissements publics et leurs concessionnaires, ou les collectivités territoriales. »
C’est dans ce cadre que la direction interdépartementale des routes de l’Ouest a sollicité par courrier les communes et départements pour lesquels elle assure encore aujourd’hui la surveillance et l’entretien de certains ouvrages supportant les voies de ces territoires. Il s’agit de la mise en application des dispositions législatives actuelles.
À la suite de ce courrier, les élus des communes de Rédéné et de Saint-Yvi, dans le Finistère, qui comptent chacune moins de 3 000 habitants, ont interpellé le ministre des transports. À Rédéné, les ponts de Sainte-Marguerite et Kerdudal permettent le franchissement de la nationale 165 et des voies ferrées, avec des ouvrages longs de soixante-dix mètres. Il en va de même pour la commune de Saint-Yvi, où trois ouvrages permettent de franchir cette même route.
Par ailleurs, au mois de mars 2012, le Sénat a adopté une proposition de loi visant à répartir les responsabilités et les charges financières relatives aux ouvrages d’art de rétablissement de voies.
Sensible aux difficultés des petites communes, Frédéric Cuvillier a demandé à ses services d’examiner les évolutions législatives et réglementaires envisageables, sur la base de cette proposition de loi et dans le respect du principe jurisprudentiel exigeant que la propriété de l’ouvrage revienne au propriétaire de la voie qu’il porte.
Merci, madame la ministre, de votre réponse. Je le sais, M. Cuvillier est pleinement conscient que les petites collectivités doivent tout d’un coup supporter une charge financière qu’elles n’avaient absolument pas anticipée, et qui est très lourde ! De fait, les ouvrages d’art mobilisent nombre d’experts et d’entreprises spécialisées, et le coût de chaque opération se révèle faramineux.
Je le répète, ces communes n’ont la capacité ni de conduire les travaux ni d’en assurer le financement. C’est pourquoi il importe qu’une nouvelle législation émerge prochainement, afin de les sécuriser et de répartir la charge entre les collectivités et l’État. Enfin, ce dernier doit éventuellement être en mesure d’assurer l’assistance technique. En effet, l’assistance technique fournie par l'État pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire, qui ressort de l’échelon départemental, ne joue plus son rôle d’accompagnement des petites communes. Cela étant, celles-ci doivent être soulagées de cette charge, qui, je le répète, est très lourde !
La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 521, adressée à M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les contraintes pesant sur les zones de captage d’eau et les difficultés qui en résultent pour les communes concernées.
L’alimentation de nos concitoyens en eau potable est assurée par plus de 30 000 points de captage d’eau. Depuis la loi sur l’eau de 1992, ces points de captage d’eau potable doivent faire l’objet de plusieurs périmètres de protection – immédiate, rapprochée et éloignée – assortis de restrictions importantes, afin d’éviter les pollutions.
Si la loi garantit l’indemnisation des propriétaires de terrains privés en cas d’expropriation pour cause d’utilité publique, ou de l’exploitant des terrains, elle n’assure pas, en revanche, de compensation pour les communes affectées par l’existence des périmètres de protection. Pourtant, la délimitation de périmètres de captage engendre des contraintes importantes, notamment en matière d’urbanisme.
Cette absence de contrepartie est souvent jugée inéquitable par les communes qui subissent ces contraintes, quand les collectivités voisines bénéficient de ces captages sans aucune contrainte.
Conscient des difficultés, au mois de janvier 2011, le Sénat a consacré un débat à la question de l’indemnisation des communes au titre du périmètre de protection de l’eau. Au cours de ces discussions, le gouvernement de l’époque s’était engagé, par la voix de son ministre chargé de l’écologie, à réfléchir aux conditions de mise en œuvre d’une solidarité financière en concertation avec les différents ministères concernés.
Depuis, le Conseil général de l’environnement et du développement durable, ou CGEDD, a rendu public, au mois d’août 2012, un rapport qui conclut à l’urgence de ne rien faire ! Rappelant la règle de non-indemnisation des servitudes d’urbanisme et environnementales, il a jugé « superfétatoire de prévoir une quelconque réglementation nouvelle » en la matière.
Face à cette situation, des parlementaires ont pris des initiatives. Je songe, notamment, à la proposition de loi du mois de juillet dernier visant à permettre aux communes d’obtenir une compensation financière en contrepartie des servitudes créées par l’instauration de périmètres de protection de la ressource en eau. Ce texte permet aux communes affectées par les périmètres de protection de bénéficier de la surtaxe perçue dans les communes sur le territoire desquelles sont situées des sources d’eau minérale.
Madame la ministre, quel est l’avis du Gouvernement sur cette proposition de loi ?
Par ailleurs, ces périmètres et les servitudes qu’ils suscitent sont des sources perpétuelles de tracasseries pour les collectivités concernées et leurs habitants, principalement en matière d’autorisation d’urbanisme. Ainsi, plusieurs communes de mon département sont empêchées de mener leurs projets de construction, ou abritent des entreprises qui pourraient être contraintes de fermer.
Par conséquent, au-delà de la question de l’indemnisation, comment les services déconcentrés de l’État pourront accompagner de manière particulière les communes qui doivent faire face à la très grande complexité des normes liées à ces périmètres ?
Monsieur le sénateur, permettez-moi d’excuser le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Retenu ce matin à la présidence de la République par une réunion consacrée à la conférence Climat 2015, il m’a priée de vous adresser la réponse suivante.
La qualité de l’eau est un bien commun de la nation, et la protection des sources d’eau potable est par conséquent un enjeu majeur pour le Gouvernement.
Vous l’avez rappelé avec raison, le Conseil général de l’environnement et du développement durable a été saisi du sujet de l’indemnisation des communes au titre des périmètres de protection de captages d’eau. Il a remis ses conclusions au mois d’août 2012.
Le CGEDD a rappelé les grands principes s’opposant à une indemnisation spécifique des communes lieux de prélèvement, au-delà des préjudices matériels, directs ou parfois subis. L’eau est un bien commun et n’appartient pas à une quelconque collectivité. Ainsi, le principe qui s’applique est la non-indemnisation des servitudes d’urbanisme.
Selon ce rapport, la réglementation en vigueur, la jurisprudence et le pragmatisme des acteurs de terrain permettent de résoudre de manière apparemment satisfaisante la plupart des problèmes constatés concrètement.
Par ailleurs, le CGEDD a relevé que les difficultés demeurant sont essentiellement dues à des problèmes relationnels entre les grandes agglomérations et certaines communes rurales périurbaines. Ces obstacles sont en grande partie liés au morcellement communal propre à la France.
En conclusion, le CGEDD suggère d’explorer en priorité la voie de l’amélioration de la collaboration et de la compréhension mutuelle entre les communes où ont lieu les prélèvements d’eau et celles qui en bénéficient. De telles solidarités existent d’ailleurs déjà, notamment dans le cadre des syndicats de l’eau. Dans de nombreuses agglomérations, le syndicat d’alimentation en eau voire la société responsable des transferts d’eau ont d’ores et déjà mis en œuvre des compensations sous des formes variées. Je citerai, à titre d’exemple, les accords conclus entre plusieurs collectivités se traduisant par un prix de l’eau plus avantageux pour la commune du lieu de prélèvement.
Globalement, le Gouvernement a bien pris conscience des difficultés de mise en œuvre des périmètres de protection – immédiate, rapprochée et éloignée – des captages d’eau potable. Ce sujet a du reste été évoqué à la table ronde sur l’eau organisée lors de la conférence environnementale de cette année. Dans le cadre de la feuille de route issue de ces discussions, une mission a précisément été confiée au CGEDD, afin d’étudier les pistes de rapprochement et d’harmonisation de ces différents types de périmètres.
Madame la ministre, vous nous avez rappelé que l’eau était un bien commun, ce que je ne remets nullement en cause. Par ailleurs, vous avez souligné que cette ressource ne peut appartenir à une commune, quelle qu’elle soit. Sur ce point également, je suis bien sûr tout à fait d’accord avec vous !
Toutefois, si l’eau n’appartient pas à une commune en particulier, pourquoi les contraintes inhérentes à son captage reviendraient à cette dernière et à elle seule ? Sur ce point, je prends quelques distances avec vos propos et avec le rapport remis par le CGEDD, auquel vous vous référez. En particulier, il ne me semble pas que le problème se cantonne dans les relations entre les grandes agglomérations et les communes rurales.
Je le répète, je regrette la tonalité de ce rapport. Or vous en reprenez les conclusions pour dire, finalement : « Tout va très bien, madame la marquise, circulez, il n’y a rien à voir ! »
Vous l’avez indiqué vous-même, certains accords contractuels ont été conclus entre communes. À mon sens, ces pistes sont extrêmement intéressantes. Il faut se fonder sur de telles démarches, les étendre, voire les généraliser ! Alors que l’on parle beaucoup de solidarité et de péréquation entre les communes et entre les territoires, il est urgent d’intervenir : certaines communes subissent des contraintes colossales, notamment en matière d’urbanisme, parce qu’elles abritent un point de captage d’eau, sans bénéficier, pour l’heure, de la moindre compensation.
La parole est à M. Jean-Vincent Placé, auteur de la question n° 603, adressée à M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le problème majeur des recherches de gaz et pétrole de schiste dans le département de l’Essonne.
Au mois de décembre 2011, une société canadienne, Vermilion Energy, spécialisée dans l’exploitation des gaz et pétrole de schiste par fracturation hydraulique, a obtenu des concessions de mines d’hydrocarbures situées sur les communes d’Itteville, de Vert-le-Grand, de Vert-le-Petit et du Plessis-Pâté.
Bien que l’entreprise se défende de vouloir procéder à une production de gaz et pétrole de schiste, divers aménagements ont été remarqués à l’intérieur des concessions. Ainsi, pendant le mois d’août, une très haute tour a été discrètement installée dans la concession d’Itteville.
Parce que cette tour ressemble à celles qui sont utilisées dans les recherches de pétrole de schiste, nombre d’observateurs ont craint un repérage. De surcroît, les préconisations du rapport de l’OPECST, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, sur ce sujet, dont les auteurs appellent à l’autorisation de forages expérimentaux, ont renforcé la méfiance, le terrain étant tout à fait approprié pour ce genre d’expérimentation.
Depuis lors, la contestation s’est progressivement mise en place. De nombreuses réunions publiques et manifestations ont été organisées et beaucoup d’élus ont marqué leur désapprobation au projet. Le 4 novembre dernier, le conseil général de l’Essonne a notamment adopté, à une très large majorité, toutes sensibilités politiques confondues, une motion visant à rappeler son opposition à l’exploitation et à l’exploration des gaz et pétrole de schiste par cette industrie pétrolière.
À ce titre, je tiens à évoquer la pugnacité du maire de Plessis-Pâté, mon ami Sylvain Tanguy, qui se bat avec courage pour préserver sa commune des nombreuses nuisances et pollutions liées à la fracturation hydraulique.
Fort heureusement, la décision du Conseil constitutionnel du 11 octobre dernier a permis d’apaiser une partie des craintes des riverains. Les Sages ont en effet entériné la loi visant à interdire l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique, en la déclarant conforme à la Constitution. La position ferme du Président de la République et du Gouvernement se voit donc confirmée.
Madame la ministre, les Essonniens et Essonniennes demandent à être rassurés encore davantage, car ils tiennent ardemment à la protection de l’environnement dans leur département et au respect de leur bassin de vie.
C’est pour cette raison que je me permets de vous demander de réaffirmer la position du Gouvernement sur ce dossier, pour ce qui concerne tant l’échelon national que mon département de l’Essonne.
Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, qui m’a demandé de répondre à sa place.
Sur un plan général, votre intervention traduit bien la profonde crise de confiance qui opacifie aujourd’hui toutes les questions minières dans notre pays et sape les relations entre les industriels, l’État, les élus et l’ensemble de nos concitoyens.
Face à cette méfiance, une seule méthode peut être retenue : celle que le Gouvernement a mise en œuvre, lorsqu’il a repris en main l’examen des demandes de mutation de plusieurs permis de recherches en Île-de-France présentées par la société Hess Oil, à savoir la concertation, la transparence et le respect des expertises, y compris celle des citoyens.
Le Gouvernement a ainsi demandé à un conseiller d’État de formuler, dans la concertation, avec l’ensemble des parties prenantes, et en toute autonomie, des propositions de réforme du code minier.
Ces propositions lui ont été remises le 10 décembre dernier. Leur ambition est double : réconcilier économie et écologie et permettre une véritable participation des citoyens à l’élaboration des décisions minières ayant une incidence sur l’environnement, pour sortir de l’opacité et de la méfiance.
Pour le cas qui vous préoccupe, monsieur le sénateur, le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie a souhaité faire une réponse précise. La société Vermilion REP est la filiale française d’un groupe canadien. Premier producteur français de pétrole, elle exploite des concessions, notamment en Aquitaine, où elle a son siège depuis plus de quinze ans. À ce titre, ses activités engendrent directement ou indirectement 600 emplois. En 2012, elle s’est acquittée de 65 millions d’euros d’impôts et de 10 millions d’euros de redevances locales sur ses activités minières.
Les concessions qu’elle exploite en Île-de-France, notamment celle d’Itteville dans l’Essonne, dont vous parliez à l’instant, sont anciennes et ont été délivrées à une époque où il n’était pas question de gaz de schiste. Ces exploitations ne concernent que du pétrole conventionnel.
La haute tour que vous évoquez est un rig permettant de forer des puits pour récupérer les hydrocarbures. Il est inconcevable qu’un exploitant minier puisse procéder en catimini à l’exploration, à l’exploitation ou à la recherche de gaz de schiste par fracturation hydraulique. Les équipements nécessaires sont lourds, typiques, notamment en raison de leurs besoins en eau, et aisément repérables par les services du ministère chargés de la police des mines.
Par ailleurs – ce sera mon dernier point –, le Conseil constitutionnel, lorsqu’il a, le 10 octobre dernier, validé sans réserve la loi du 13 juillet 2011, a précisé que l’interdiction de recourir à la fracturation était « générale et absolue ». Cela signifie que celle-ci s’applique à tous les travaux et à toutes les substances, aux demandes de permis mentionnant les gaz de schiste comme aux autorisations anciennes qui n’évoquent que des objectifs conventionnels.
Tous les préfets et les services déconcentrés du ministère ont reçu instruction, le 19 septembre 2012, d’inspecter régulièrement les ouvrages miniers, les opérateurs devant faire un rapport de leurs activités.
S’agissant de la concession d’Itteville, ces contrôles n’ont pas révélé d’utilisation de la fracturation hydraulique.
Tout comme vous, monsieur le sénateur, le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie reste vigilant concernant l’application de la loi du 13 juillet 2011. La position du Gouvernement, fixée par le Président de la République, est donc claire : il n’y aura ni exploration ni exploitation d’hydrocarbures de roche mère par fracturation hydraulique en France.
M. Jean-Vincent Placé applaudit.
Je vous remercie sincèrement, madame la ministre, de cette réponse complète et précise. Je tiens à saluer, sur ce sujet, la constance du Gouvernement, dont je ne doutais d’ailleurs pas. Il défend avec ténacité ses positions, malgré les nombreux obstacles placés sur sa route par les lobbyistes, invoquant des intérêts économiques singulièrement dans la presse.
Je tiens à saluer plus particulièrement le travail de Philippe Martin, qui, avec Pascal Canfin, se trouve en ce moment même à la présidence de la République pour évoquer la conférence Climat 2015.
Le message très clair que vous venez de transmettre avait déjà été diffusé le 28 novembre dernier : le Gouvernement avait en effet refusé de valider le transfert à la compagnie pétrolière Hess Oil de sept permis pétroliers situés en Seine-et-Marne et dans l’Aisne.
Votre réponse me satisfait totalement, madame la ministre. Dans la mesure où le procédé de fracturation hydraulique rend les choses irréversibles sur le plan environnemental, en particulier pour ce qui concerne les nappes phréatiques, votre positionnement me paraît particulièrement important pour notre environnement, nos espaces naturels et notre biodiversité.
La parole est à M. Martial Bourquin, auteur de la question n° 455, adressée à Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’année 2013 a été une année de réformes importantes, qui ont fait évoluer l’organisation territoriale de notre pays.
Le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, tout d’abord, le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dit « projet de loi ALUR », ensuite, et la réforme de la politique de la ville, enfin, prévoient de renforcer le rôle des intercommunalités et des métropoles pour favoriser la construction, le logement et l’initiative économique. Ces réformes – je pense notamment au projet de loi ALUR – ont suscité parfois de très vives inquiétudes parmi les maires et nos concitoyens, lesquels, dans un contexte de crise économique, ont plus que jamais besoin de savoir qui fait quoi. Les maires, notamment les maires ruraux, ont ainsi très peur que la compétence relative au droit des sols ne soit, dans un futur proche, sous couvert d’économies de bouts de chandelle et d’efficacité supposée, transférée d’autorité à l’intercommunalité.
Or, dans notre assemblée, chacun sait, quelles que soient les travées sur lesquelles il siège, qu’une ville ou un village ne disposant plus de cette compétence et de la capacité à la transférer ou non est une commune sans moyens d’agir.
Dans cette enceinte, nous le savons également tous, pour être efficace, l’intercommunalité doit être choisie et non subie.
J’en parle d’autant plus librement que je suis maire d’une ville de 15 000 habitants qui aménage, construit et bâtit, y compris des logements sociaux.
J’en parle encore plus librement que cette commune a délégué à son intercommunalité des compétences en termes d’aménagements et de déplacements urbains et que ces transferts consentis sont une réussite.
François Lamy, ministre délégué chargé de la ville, à qui je faisais part mardi dernier en commission de ces inquiétudes, m’indiquait que la commune et l’intercommunalité devaient œuvrer ensemble, en complémentarité et non en subsidiarité. La complémentarité, c’est le respect et le volontariat.
Madame la ministre, notre attachement à la commune n’est pas un réflexe passéiste. Nous pensons que celle-ci est le pilier de la République. L’éloignement des pouvoirs – je pense notamment au droit des sols – serait un coup dur porté à la démocratie de proximité. Nous estimons que la commune est moderne, et qu’elle est le socle incontournable de la République.
Pour l’ensemble du Gouvernement, le droit des sols continue-t-il à être une compétence propre aux communes ? Pouvez-vous nous assurer ici-même qu’il le restera ?
Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Cécile Duflot, qui m’a demandé de vous répondre à sa place.
Vous appelez son attention sur le projet de transférer automatiquement la compétence en matière de plan local d’urbanisme à l’échelon intercommunal pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération.
Le plan local d’urbanisme est un outil essentiel d’aménagement de l’espace. Au travers de cette mesure, la volonté du Gouvernement est de promouvoir l’élaboration de plans locaux d’urbanisme intercommunaux, ou PLUI, à une échelle territoriale qui ait tout son sens.
L’approche intercommunale permet d’abord d’appréhender une gestion économe de l’espace. Elle offre ensuite la possibilité de mener une réflexion d’ensemble sur les différents enjeux du territoire, en intégrant des dispositions relatives à l’aménagement, à l’habitat et aux transports.
Le PLUI permet une mutualisation des moyens financiers et d’ingénierie, souvent difficilement mobilisables au seul échelon communal. Il s’agit aussi de permettre aux élus d’exercer pleinement une compétence que beaucoup d’entre eux n’assurent pas aujourd’hui, puisque près de 40 % des communes relèvent du règlement national d’urbanisme.
Par ailleurs, concernant la gouvernance, vous soulignez, monsieur le sénateur, que cette mesure d’automaticité réduirait le rôle de nombre de petites communes à celui d’une chambre d’enregistrement, dépourvue de capacité de décision ou d’opposition.
Sur la question du transfert, le projet de loi ALUR, voté en première lecture au Parlement, confirme que le PLUI sera la règle, tout en donnant aux communautés de communes un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi pour s’y préparer. De plus, les élus ne souhaitant pas le transfert à l’échelon intercommunal de la compétence en matière d’urbanisme pourront s’y opposer au travers de la mise en place d’une minorité de blocage.
De surcroît, outre les garanties actuelles inscrites dans le code de l’urbanisme en matière d’association des maires, le projet de loi ALUR ainsi que les amendements votés lors de la première lecture au Parlement renforcent la collaboration entre les communes et l’instance communautaire.
Il est notamment prévu qu’un débat portant sur les évolutions nécessaires du PLUI sera organisé tous les ans. La délibération de prescription prévoit aussi la tenue d’un débat sur les modalités de la concertation à mener entre l’établissement public de coopération intercommunale compétent et ses communes membres, et précise son organisation.
Pour les communautés de communes ou les communautés d’agglomération, lorsqu’une commune émet un avis défavorable sur des dispositions la concernant, le projet de loi prévoit également que la commission de conciliation puisse être saisie et formuler des propositions dans le délai d’un mois.
Il est également envisagé un renforcement des conditions de majorité requises ensuite pour voter l’arrêt du projet comme pour l’approuver.
Les communes pourront aussi demander à être couvertes par un plan de secteur.
Par ailleurs, je rappelle que les maires conserveront la compétence en matière de délivrance des permis de construire.
Au travers de toutes ces mesures, il s’agit bien, monsieur le sénateur, de prendre en compte les spécificités des communes et de leur laisser du temps pour conduire cette réforme majeure.
En outre, le ministère de Cécile Duflot accompagne les communautés, par le biais du club PLUI, qui met en réseau les intercommunalités, leurs élus et leurs techniciens, lesquels peuvent ainsi échanger leurs bonnes pratiques en matière de gouvernance et de co-construction.
L’ensemble de ces dispositions doit permettre de bien prendre en compte les intérêts légitimes des communes et de démontrer l’intérêt général que revêt l’élaboration d’un PLU communautaire.
Madame la ministre, j’ai bien écouté votre réponse et je voudrais préciser ma pensée.
Je voudrais être bien certain que l’Assemblée nationale ne reviendra pas sur la minorité de blocage – un quart des communes représentant 10 % de la population – qu’a introduite le Sénat lors de l’examen du projet de loi ALUR et que vous avez évoquée dans votre réponse.
Il existe actuellement un projet funeste qui ne dit pas son nom et dont tout le monde parle, projet que M. Lamassoure a détaillé dans la revue Challenges et qui fait son chemin dans l’ensemble des courants de pensée. Selon ses partisans, nos 36 000 communes sont trop nombreuses ; il faudrait en fait 5 000 intercommunalités, ce qui permettrait de réaliser des économies.
Quand on sait la crise politique que nous vivons aujourd’hui, le degré d’anomie de notre société dans sa relation avec la représentation politique, rien ne serait plus grave que de retirer aux maires, aux conseils municipaux leurs prérogatives en la matière.
Selon moi, rendre le PLUI obligatoire est une erreur. Au Sénat, nous avons tenté d’apporter une correction en instituant cette minorité de blocage : le droit des sols doit rester une compétence essentielle des maires.
Si le maire doit désormais se contenter de signer les permis de construire sans pouvoir exercer la moindre compétence en matière de droit des sols, alors il se transformera en simple signataire d’un permis qu’il n’aura pas lui-même délivré.
Au terme d’un débat très dense avec la ministre de l’égalité des territoires et du logement, celle-ci a accepté la proposition du Sénat de créer cette minorité de blocage, qui est une avancée extraordinaire. L’ensemble de mes collègues, sur quelque travée qu’ils siègent, demandent que l’Assemblée nationale ne revienne pas sur l’amendement voté par le Sénat.
La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 541, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Le problème posé par la sécurité ferroviaire sur les lignes dites « classiques » a été tragiquement mis en lumière avec le terrible accident survenu dans l’Essonne, le 12 juillet dernier.
Si nous voulons inciter nos concitoyens à utiliser les transports en commun – c’est aussi l’une des finalités du débat sur la transition énergétique –, encore faut-il que ces derniers offrent toutes les garanties de sécurité nécessaires.
Plusieurs organisations syndicales ont indiqué avoir alerté depuis très longtemps la direction de la SNCF sur la dégradation du réseau sur le plan national, mais également en Languedoc-Roussillon, dans l’Aude et en région narbonnaise.
Je tenais à attirer l’attention du Gouvernement sur le fait que, dans ces secteurs, le réseau ferré ferait partie des lignes récemment qualifiées de « malades », faute d’investissements suffisants et d’un entretien régulier.
Madame la ministre, il a été dit que le mauvais état du réseau et, concomitamment, l’abaissement du niveau de sécurité seraient la conséquence d’un recours massif à la sous-traitance, pas toujours expérimentée ni qualifiée, et de la perte des savoir-faire due aux départs à la retraite non remplacés et à la réduction continue des effectifs. Depuis dix ans, on dénombre deux cents cheminots en moins sur le seul site de Narbonne, dans l’Aude.
Ainsi, même si, d’un point de vue national et selon l’Agence ferroviaire européenne, les chemins de fer français se classent à la troisième place en matière de sécurité ferroviaire sur le vieux continent, nous ne pouvons ignorer que les cheminots s’inquiètent de l’avenir du rail et des problèmes de sécurité.
Selon eux, la surveillance et l’entretien du réseau ferroviaire se sont dégradés. Ainsi, pendant une longue période, la France a sensiblement moins investi dans la maintenance de son réseau que ses voisins européens.
C’est pourquoi, même si des efforts ont été entrepris à peu près depuis 2005, les dirigeants de Réseau ferré de France eux-mêmes estiment que l’effort de rénovation reste insuffisant pour maintenir la performance du réseau.
D’où ma question : quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre, et sous quels délais, pour remédier à cette situation plus que préoccupante, à la fois pour la performance des transports ferroviaires, mais aussi pour la sécurité des passagers ?
La France restera-t-elle un grand pays ferroviaire ? Je le souhaite, car le ferroviaire joue un rôle majeur dans les déplacements et l’accessibilité des territoires, pour ce qui concerne tant les voyageurs que le fret, les longues ou courtes distances, à l’échelle locale, nationale ou internationale.
Comme le réaffirme le Conseil économique, social et environnemental, les infrastructures de transport, plus particulièrement les liaisons ferroviaires, doivent contribuer à l’équité territoriale et à ce qu’aucun territoire ne soit délaissé.
Or, pour garantir un réseau de qualité, d’importants efforts doivent être fournis en termes de rénovation et de régénération des réseaux ferroviaires.
Monsieur le sénateur, je vous prie encore une fois d’excuser l’absence ce matin de Frédéric Cuvillier, pour la raison que j’ai indiquée tout à l’heure.
La sécurité du réseau ferroviaire a toujours été un impératif pour l’État et pour l’ensemble des acteurs ferroviaires.
Comme vous l’avez signalé, la France a d’ailleurs un niveau de sécurité ferroviaire parmi les plus élevés de l’Union européenne. Cependant, ce constat n’a jamais conduit les autorités françaises à considérer que cette sécurité était un acquis et l’accident de Brétigny-sur-Orge l’a montré douloureusement.
Ainsi, des inspections sur la sécurité du système ferroviaire sont régulièrement réalisées par les entreprises ferroviaires et par l’Établissement public de sécurité ferroviaire. Je tiens à rappeler clairement que l’expression « lignes malades » utilisée par la SNCF vise des problèmes de qualité de service du transporteur – régularité, information – et non de sécurité. Si des problèmes de sécurité apparaissent sur une voie, celle-ci est fermée d’autorité.
Au début de cette année, Frédéric Cuvillier a lancé un audit stratégique sur la sécurité du réseau ferroviaire, précisément pour disposer d’une vision globale du système. À la suite des conclusions de ce travail, des décisions seront prises pour améliorer encore davantage la sécurité de notre réseau ferroviaire.
Pour ce qui concerne l’état physique de ce dernier, l’École polytechnique fédérale de Lausanne, dans les conclusions de son audit de 2005, dressait un bilan extrêmement alarmant. L’audit revisité du mois d’octobre 2012 a montré une évolution positive de la situation, avec un net ralentissement du vieillissement du réseau. Mais le retard était tel que l’effort doit nécessairement être poursuivi aujourd’hui et concentré en priorité sur les grandes lignes du réseau structurant, bénéficiant au plus grand nombre.
Le Premier ministre l’a dit au mois de juillet dernier : la première priorité du Gouvernement pour le ferroviaire est l’amélioration des services et de la performance du réseau existant.
À cette fin, les moyens affectés au volet « mobilité » des futurs contrats de plan État-région, qui sont en cours d’élaboration, seront confortés.
À l’automne 2012, Frédéric Cuvillier a également engagé une nouvelle étape de la modernisation du réseau en demandant à RFF de préparer un grand plan de modernisation du réseau ferroviaire.
Ce plan est actuellement en train d’être décliné sur les territoires en lien avec les collectivités. Il permettra ainsi de poursuivre l’effort de renouvellement et de modernisation, dont le coût s’élève actuellement à 2, 5 milliards d’euros par an, et de le concentrer sur les lignes les plus fréquentées et les nœuds ferroviaires les plus contraints.
Oui, monsieur le sénateur, vous avez raison : la France doit rester un grand pays ferroviaire.
Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
En fait, les voyageurs veulent savoir dans quoi et sur quoi ils roulent. Depuis trop longtemps, les infrastructures ferroviaires les plus anciennes vieillissent dans l’indifférence générale ; elles doivent être désormais une priorité.
Madame la ministre, j’apprécie d’autant plus la mise en place de ce grand plan que vous nous annoncez que François Hollande avait fait la déclaration suivante : « Je relancerai la politique des transports pour lutter contre la fracture territoriale […] Ma priorité sera d’apporter […]une réponse à la qualité de service des trains du quotidien et à la desserte des territoires enclavés ».
Au moment où l’on parle de lutte contre le changement climatique et contre les émissions de gaz à effet de serre, on ne rappellera jamais assez que le ferroviaire ne représente que 1, 3 % des émissions produites par le secteur du transport, contre 95 % pour le secteur routier, et ne consomme que 1, 7 % de l’énergie totale consommée dans ce même secteur.
Mes chers collègues, avant d’aborder la question orale suivante, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix heures vingt-cinq, est reprise à dix heures trente-cinq.
La parole est à M. Antoine Lefèvre, auteur de la question n° 568, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale.
Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur les conditions de recrutement des animateurs supplémentaires auxquelles les communes sont confrontées dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires.
Les communes ayant opté pour la mise en place de cette réforme dès la rentrée 2013 ont dû non seulement y consacrer beaucoup de temps et d’énergie tant le délai était court pour organiser les activités, mais aussi faire face à des difficultés concernant l’encadrement de celles-ci.
En effet, comme de nombreux ateliers sont proposés aux enfants, tels que danse, musique, activités sportives, arts plastiques, jeux, théâtre, etc., les maires sollicitent des enseignants exerçant dans leurs écoles, du personnel communal, mais aussi des bénévoles. Des précisions concernant l’identification de la responsabilité sous laquelle sont placés les enfants durant ces temps d’activité périscolaire, ou TAP, sont réclamées avec acuité.
Cependant, ces personnes ne suffisent parfois pas pour répondre aux besoins et les communes doivent faire appel à des intervenants extérieurs pour deux ou pour trois heures par semaine.
De plus, et par souci d’équité, certains de ces édiles souhaiteraient que tous les intervenants – enseignants ou non enseignants – bénéficient de la même rémunération.
Si le décret n° 66-787 du 14 octobre 1966 permet de rémunérer à l’heure les personnels enseignants de premier degré qui acceptent d’effectuer des heures supplémentaires pour le compte des collectivités territoriales – je pense aux études surveillées – et offre donc une flexibilité appréciable, il n’en est pas de même pour les animateurs qui doivent intervenir dans le cadre des activités périscolaires.
Ces intervenants extérieurs doivent être rémunérés selon un cadre d’emploi bien défini et sur la base d’une grille indiciaire – celle des agents non titulaires de la fonction publique – nécessitant une création de poste sur un temps préfixé, avec déclaration de vacance du poste à pourvoir auprès du centre de gestion et une rémunération sur la base d’un indice de la fonction publique.
Cela crée diverses difficultés. Ainsi, ces intervenants ne travaillant pas durant les vacances scolaires, quelle solution adopter ? Faut-il annualiser le temps de travail, ou bien établir des contrats à durée déterminée renouvelables à chaque vacance scolaire ?
Le cadre d’emploi est également problématique : la rémunération des assistants artistiques enseignant notamment la danse, les arts plastiques, ou encore la musique, est calculée sur la base d’une durée hebdomadaire de vingt heures, tandis que celle des éducateurs d’activités physiques et sportives est calculée sur la base de trente-cinq heures par semaine, ce qui entraîne une disparité entre les contrats des différents intervenants. Or, dans le cadre des classes du patrimoine organisées en partenariat avec l’éducation nationale, les intervenants peuvent être rémunérés sur la base d’un taux horaire.
Afin de faciliter l’application de la réforme, je vous demande donc, madame la ministre, qu’il soit possible d’appliquer la même réglementation aux intervenants lors des TAP.
Monsieur le sénateur, votre question me donne l’occasion de saluer tous les élus qui se sont résolument engagés dans la réforme des rythmes scolaires et qui mettent sur pied des réalisations extrêmement intéressantes dans ce cadre. Je peux en témoigner puisque je visite nombre de communes.
Vous l’avez souligné, les communes peuvent faire appel à une grande diversité d’intervenants, en complément de leurs propres ressources, qu’il s’agisse de membres d’associations partenaires de l’école, de mouvements d’éducation populaire ou d’associations sportives ou culturelles locales diverses et variées.
Ces intervenants doivent être des personnes qualifiées, c’est-à-dire répondre aux conditions posées par l’arrêté du 9 février 2007 fixant les titres et diplômes permettant d’exercer les fonctions d’animation et de direction en séjours de vacances, en accueils sans hébergement et en accueils de scoutisme.
Les communes peuvent également recruter des jeunes dans le cadre d’un emploi d’avenir professeur. L’État prend alors en charge les trois quarts de la rémunération du jeune concerné.
Sur la base du décret du 19 novembre 1982 précisant les conditions d’octroi d’indemnités par les collectivités territoriales et leurs établissements publics aux agents des services déconcentrés de l’État ou des établissements publics de l’État, les collectivités territoriales peuvent allouer des indemnités aux personnels des services déconcentrés de l’État dans le cadre d’une activité accessoire que ceux-ci exercent pour le compte de la collectivité.
Comme vous l’avez dit, les personnels enseignants peuvent être concernés pour des services d’étude surveillée ou de surveillance.
Conformément aux textes d’application du décret précité, ces services sont rétribués par les collectivités territoriales au moyen d’indemnités dont les taux horaires ne peuvent excéder ceux qui sont déterminés par le décret du 14 octobre 1966 fixant les taux de rémunération de certains travaux supplémentaires effectués par les personnels enseignants du premier degré en dehors de leur service normal.
Les communes peuvent aussi faire appel à des agents territoriaux qui exercent déjà dans la collectivité en qualité de titulaire ou de stagiaire, en modifiant leur temps de travail.
Le temps de travail peut être annualisé – vous avez évoqué cette possibilité –, sauf pour les professeurs et les assistants d’enseignement artistique pour lesquels l’annualisation n’est pas réglementaire.
Enfin, les communes peuvent recourir à des agents vacataires.
Le temps de travail des assistants d’enseignement artistique est fixé par leur statut et déroge de ce fait au temps de travail de droit commun de la fonction publique.
Je précise que les collectivités territoriales ne sont pas seules pour mettre en œuvre les activités périscolaires, car elles peuvent les organiser dans le cadre d’un projet éducatif territorial et sont alors aidées par le directeur académique des services de l'éducation nationale.
Cela étant, toutes sortes de ressources peuvent être mobilisées dans le cadre des communes et la tâche de ces collectivités peut se trouver sensiblement allégée si elles font appel à des associations locales ou à de grandes associations complémentaires de l’éducation publique.
Madame la ministre, je vous remercie de ces éléments de précision.
J’aurais toutefois aimé que vous me répondiez sur le problème de la responsabilité, alors que vous faites état de la possibilité de recourir à des membres d’associations. Et les maires font de plus en plus appel à des bénévoles dans le cadre des nouveaux rythmes scolaires. Il faudrait un cadre bien défini.
Par ailleurs, je note avec satisfaction la possibilité d’annualiser le temps de travail, ce qui facilitera la gestion des TAP.
La parole est à M. Claude Bérit-Débat, auteur de la question n° 607, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale.
Madame la ministre, selon la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République adoptée au mois de juillet dernier par le Parlement, les professeurs peuvent recourir aux langues régionales chaque fois qu’ils peuvent en tirer profit pour leur enseignement de la langue française.
Il s’agit là d’une reconnaissance importante de l’apport des langues régionales à l’apprentissage et à la formation des élèves. Sont ainsi consacrés à la fois la reconnaissance de ces langues, qui forment notre patrimoine culturel commun, et leur apport éducatif. L’avancée, réelle, mérite d’être considérée à sa juste valeur. Ce n’est toutefois pas suffisant.
Dans mon département, la Dordogne, les effectifs des élèves pratiquant l’occitan s’accroissent d’année en année, à l’école primaire comme au collège. Pour répondre au besoin constaté, une convention région-État-rectorat-département pour le développement de l’offre d’enseignement de l’occitan a même vu le jour au mois d’avril dernier.
Pour autant, les collégiens sont encore trop nombreux à ne pas pouvoir continuer à suivre l’enseignement en occitan, faute d’option au lycée. Dans certains collèges, c’est même une option qui n’est plus offerte à partir de la troisième.
Il convient donc de remédier à cette situation. À cette fin, plusieurs manières d’agir sont envisageables.
Par exemple, on pourrait inscrire l’occitan au rang d’option à part entière au baccalauréat, à l’instar des autres langues régionales, option dont le coefficient pourrait être revalorisé, et être équivalent à celui du latin ou du grec.
Il serait aussi intéressant de faire passer de deux à trois heures le nombre d’heures hebdomadaires d’enseignement de l’occitan. Enfin, l’option occitan pour la filière « sciences et technologies du management et de la gestion » du baccalauréat devrait être rétablie.
Vous le constatez, madame la ministre, la demande d’apprentissage des langues régionales existe. Il en est de même des solutions permettant de les pratiquer, à condition de faire preuve d’un volontarisme assumé en la matière.
Ma question est simple : l’éducation nationale est-elle aujourd’hui prête à donner toute sa place aux langues régionales en général, et à l’occitan en particulier, dans l’éducation de nos enfants ?
Monsieur le sénateur, je salue votre engagement, ancien, sur le sujet des langues régionales, qui ont été consacrées au plus haut niveau de l’ordre juridique interne, puisque, comme vous le savez, l’article 75-1 de la Constitution dispose, depuis sa dernière révision : « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France. »
Pour ce qui concerne la question de l’enseignement de ces langues, au-delà des clivages politiques, l’État a fait preuve d’une continuité qu’il convient de souligner.
En l’espace de deux ans, le nombre d’élèves marquant un intérêt pour les langues et cultures régionales a augmenté de 24 %. Ce sont 272 000 élèves répartis dans treize académies qui pratiquent l’une des onze langues régionales reconnues ou qui y sont sensibilisés.
Les moyens attribués en termes d’effectifs de professeurs n’ont pas toujours été à la hauteur de cette demande. Pour corriger une telle situation, nous avons décidé d’augmenter, dans un premier temps, le nombre de postes d’enseignants offerts au concours.
Comme vous le savez, la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République a introduit de nombreux dispositifs destinés à promouvoir la transmission des langues et cultures régionales. Les familles sont plus précisément informées des différentes offres d’apprentissage de ces langues, notamment de l’enseignement bilingue, qui est reconnu et encouragé dès la maternelle.
L’inscription des élèves résidant dans une commune dont les écoles ne proposent pas un enseignement de langue régionale dans un établissement d’une autre commune dispensant cet apprentissage est encouragée, sous réserve des places disponibles.
De plus, la possibilité pour les enseignants de recourir aux langues régionales est élargie à l’enseignement du second degré, et ce pour l’ensemble des apprentissages.
S’agissant de l’enseignement des langues régionales dans l’académie de Bordeaux, plus particulièrement dans le département de la Dordogne, je tiens à vous apporter les informations suivantes.
À l’échelon du premier degré, l’académie de Bordeaux dispose aujourd’hui de cent écoles publiques qui proposent un enseignement extensif d’occitan, de trente minutes à trois heures par semaine. S’y ajoutent trente-sept sites bilingues à parité français-occitan, une école du secteur privé confessionnelle et neuf écoles privées associatives. Pour ce qui concerne le second degré, soixante-deux établissements publics et privés disposent de sections « langues régionales ». De surcroît, de nouvelles sections sont prévues à la rentrée 2014.
Dans le département de la Dordogne, 96 élèves de l’enseignement public primaire suivent cette année les cours d’une classe bilingue. Parallèlement, 991 élèves sont sensibilisés à l’occitan. Dans le secondaire, six collèges sur trente-huit proposent l’option occitan, ainsi que trois lycées ; ces établissements réunissent ainsi 614 élèves de la sixième à la terminale.
Au total, ce sont 9 682 élèves qui sont sensibilisés à l’occitan pour la seule académie de Bordeaux.
Il est également important de noter que la problématique des langues régionales dépasse aujourd’hui le seul cadre de l’éducation nationale. Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication, a reçu à ce sujet un rapport relatif à la promotion des langues régionales.
Vous le constatez, monsieur le sénateur, grâce à l’engagement des acteurs nationaux et locaux, l’apprentissage des langues régionales est aujourd’hui une réalité, qui témoigne d’une République non seulement attentive au respect des règles communes du vivre-ensemble, mais aussi accueillante et bienveillante à l’égard des différents patrimoines historiques et culturels de nos territoires.
Je vous remercie, madame la ministre, de vos réponses, même si elles ne me satisfont pas complètement.
Dans l’académie de Bordeaux, plus particulièrement en Dordogne, des efforts sont actuellement consentis en faveur des langues régionales, qu’il s’agisse du basque ou de l’occitan. Toutefois, les moyens affectés par l’éducation nationale aussi bien aux collèges qu’aux lycées sont nettement insuffisants.
Pour ce qui concerne l’école élémentaire, une sensibilisation aux langues régionales est engagée. Je pense notamment au financement partiel des écoles Calandreta par les collectivités.
Cela étant, il faut persévérer dans ce domaine afin de garantir des enseignements de langues régionales aux élèves qui le souhaitent et attribuer des moyens supplémentaires permettant la nomination de nouveaux professeurs. En effet, en Dordogne, par exemple, le manque de professeurs enseignant l’occitan est patent.
Pour conclure, je le répète, madame la ministre, votre réponse laisse à désirer.
La parole est à M. Michel Billout, auteur de la question n° 590, adressée à M. le Premier ministre.
Madame la ministre, je souhaite attirer une nouvelle fois votre attention sur les difficultés d’application de la circulaire interministérielle du 26 août 2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites.
Plus d’un an après son entrée en vigueur, force est de constater que l’attitude des pouvoirs publics a conduit de nombreuses associations à saisir le Défenseur des droits à propos du refus d’inscription à l’école, de la mise en place forcée de conditions de scolarisation hors de l’école en milieu isolé, des conditions d’interpellation et d’incarcération des enfants, des conditions d’évacuation de terrains occupés en Île-de-France, particulièrement dans mon département, la Seine-et-Marne.
Les situations dénoncées concernent les droits de l’enfant au titre de son droit à être protégé et de son droit à la sécurité mais, plus généralement, des questions complexes de sécurité sanitaire, de déontologie de la sécurité, ainsi que le suivi de ces populations en matière d’accès au logement et les discriminations dont elles font l’objet dans le domaine de l’accès à l’emploi.
Les expulsions répétées, sans application ou avec une application très partielle de la circulaire, ont pour conséquence de rompre la scolarité des enfants et le suivi sanitaire des familles.
Ce fait aggrave la situation des collectivités locales et territoriales comme des services de l’État qui sont confrontés à des regroupements de plus en plus importants sans avoir la capacité de trouver des solutions d’hébergement provisoires ou pérennes pour toutes les personnes expulsées de campements. La mise en place de dispositifs d’accompagnement indispensables en vue de garantir l’accès de celles-ci au logement et à l’emploi est donc totalement ignorée.
Ces difficultés sont relatées par de nombreux élus ; elles ont été évoquées lors du sommet des maires sur les Roms et du congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe, qui a constaté que les pouvoirs locaux et régionaux chargés d’appliquer les politiques gouvernementales sur les questions relatives aux Roms pouvaient être confrontés à l’insuffisance de leurs moyens financiers. Le congrès a d’ailleurs suggéré au conseil des ministres du Conseil de l’Europe de recommander aux États membres de veiller à ce que les stratégies nationales sur les questions relatives aux Roms comprennent des dispositions pour une mise en œuvre effective à l’échelon local, notamment en garantissant aux pouvoirs locaux et régionaux des ressources suffisantes et un soutien spécialisé, ainsi qu’en témoigne la recommandation 315 du 16 mars 2012.
Dans ce contexte, je souhaiterais connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement pour que soit enfin pleinement appliquée la circulaire interministérielle précitée, dans un cadre d’apaisement, pour en finir avec un nomadisme forcé, qui résulte des pratiques trop fréquemment observées sur le territoire national, situation qui ne fait que déplacer géographiquement le problème et précariser davantage la situation de ces familles, brisant ainsi toute perspective d’intégration sociale.
Monsieur le sénateur, vous avez rappelé les situations difficiles que connaissent nombre de familles installées dans des habitats provisoires et précaires et qui se déplacent fréquemment.
Comme vous l’avez indiqué, le Gouvernement a agi sans délai et défini une ligne de conduite équilibrée sur ce sujet dès le mois d’août 2012. Il tente de concilier deux exigences : la fermeté dans l’exécution des décisions de justice, en particulier lorsque la santé ou la sécurité des personnes sont mises en cause, et l’humanité de l’action administrative face à des situations souvent assez douloureuses.
L’enjeu principal pour les services de l’État est d’anticiper les opérations d’évacuation afin de trouver des solutions globales, adaptées aux personnes et aux familles concernées, notamment en termes d’hébergement et d’accès aux droits. C’est l’impulsion que tend à donner la circulaire interministérielle du 26 août 2012.
La tâche est difficile, car il existe un écart important entre nos souhaits et la réalité sur le terrain. D’ailleurs, les associations dont vous avez parlé jouent un rôle qu’il faut saluer, car elles essaient souvent d’apporter humanité et solidarité lors de l’accueil d’un certain nombre de personnes en grande difficulté dans notre pays.
Si chacun a conscience de ces difficultés relayées notamment par la presse, il faut aussi saluer les expériences positives qui se multiplient sur le terrain. Dans plusieurs départements, des solutions durables ont été trouvées. Il en est ainsi de la création de villages d’insertion ici ou là, ou de la mise à disposition de bungalows, dans la région lyonnaise, singulièrement.
Même si toutes ces mesures ne correspondent pas exactement à ce que nous voulions, je tiens à saluer ces actions pragmatiques et ces bonnes pratiques. Cela étant, il est indispensable d’engager une concertation apaisée sur ces questions afin de trouver des solutions.
Le Gouvernement est conscient de la nécessité de poursuivre les efforts déployés. Aussi a-t-il décidé de confier à Adoma, opérateur historique, une mission d’appui selon des principes établis nationalement. Il reviendra ensuite aux préfets d’aider cet établissement pour mobiliser ses capacités immobilières mais aussi son expérience d’ingénierie sociale.
Par ailleurs, je tiens à rappeler que la situation des Roms a une dimension européenne. Vous avez signalé, monsieur le sénateur, les possibilités offertes aux collectivités d’obtenir des crédits européens pour poursuivre leurs efforts. Nous devons aussi développer une coopération décentralisée qui est actuellement mise en place avec les pays d’origine, la Roumanie et la Bulgarie, afin de favoriser l’insertion de ces populations dans leur pays d’origine, ce qui mettra fin à l’une des raisons de leur départ.
Madame la ministre, je connais votre engagement personnel sur ces questions et je salue l’action du délégué interministériel qui œuvre beaucoup en la matière. Mais le seul élément nouveau que vous m’apportez n’est pas pour me rassurer totalement.
En effet, même en ce début d’hiver, nous assistons à de nouvelles expulsions massives en Île-de-France, à Saint-Ouen et à Champs-sur-Marne, tandis que les propositions de relogement ont été très rares. Par conséquent, nous allons retrouver les populations expulsées installées un peu plus loin, et leur situation sera encore plus précaire. Les associations qui interviennent seront confrontées à de grandes difficultés. Il faut vraiment faire beaucoup plus.
S’agissant de la dimension européenne, je suis moi-même auteur d’un rapport et d’une proposition de résolution européenne, qui a été adoptée par le Sénat, sur l’intégration des Roms.
Il n’en faut pas moins que, localement, nous ayons les moyens d’agir. À travers ma question, je pose donc aussi celle des moyens financiers des collectivités. Alors que leurs finances sont aujourd’hui exsangues, c’est un problème supplémentaire qu’elles doivent régler. Il me semble par conséquent indispensable que l’État français se montre plus incitatif et prévoie davantage de moyens d’accompagnement.
La parole est à M. Philippe Leroy, auteur de la question n° 593, transmise à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget.
Madame la ministre, l’article 1395 E du code général des impôts, issu de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, exonère de taxe foncière sur les propriétés non bâties, ou TFNB, les propriétés situées en zone « Natura 2000 ».
Ma question porte sur les sites « Natura 2000 » forestiers, qui concernent essentiellement des communes peu peuplées et à fort taux de boisement, dont la TFNB représente le plus gros revenu.
En vertu de la loi, l’exonération de TFNB dans les zones « Natura 2000 » fait l’objet d’une compensation au profit des communes concernées, sur la base des taux votés en 2003. Cette obligation de compensation constitue à l’évidence une contrainte très forte pour l’État.
Depuis 2009, en dépit de nombreuses protestations, la compensation est intégrée au périmètre des variables d’ajustement de l’enveloppe normée des concours de l’État aux collectivités territoriales. De fait, elle a été progressivement réduite, au détriment des communes forestières ; c’est ainsi que, en 2013, elle a couvert seulement 51 % de la perte de recettes. Cette tendance devrait se poursuivre en 2014.
En s’obstinant à ne pas vouloir exclure, pour les terres forestières, la compensation de l’exonération « Natura 2000 » du périmètre des variables d’ajustement, le ministère des finances renie les engagements de l’État au bénéfice des politiques environnementales.
Il en résulte un risque de rejet de la politique « Natura 2000 » par les communes concernées : souvent pauvres, elles subissent, du fait du système actuel, un manque à gagner considérable, estimé à 1 million d’euros en 2014.
C’est pourquoi je demande à M. le ministre de l’économie et des finances et à M. le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie de bien vouloir exclure la compensation de l’exonération « Natura 2000 » des variables d’ajustement pour les terres forestières.
Monsieur Leroy, vous avez bien voulu me faire part de vos interrogations sur la compensation par l’État des exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties au bénéfice des propriétaires s’engageant dans la préservation durable des zones « Natura 2000 » et des zones humides.
Comme une grande partie des allocations compensatrices, ces compensations ont été intégrées aux variables d’ajustement qui permettent chaque année de réguler l’évolution de l’enveloppe, dite normée, des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales.
Je vous rappelle que le périmètre de ces variables a été élargi, par la loi du 27 décembre 2008 de finances pour 2009, à la majorité des allocations compensatrices versées par l’État, parmi lesquelles celle qui fait l’objet de votre question.
Conformément aux engagements pris dans le cadre du pacte de confiance et de responsabilité conclu entre l’État et les collectivités territoriales le 16 juillet dernier, sous l’égide du Premier ministre, les collectivités territoriales ont consenti, dès 2014, un effort de 1, 5 milliard d’euros sur les concours financiers de l’État. Ainsi, les collectivités territoriales participeront à l’effort de rétablissement des comptes publics mis en œuvre par le Gouvernement.
Dans ce contexte, monsieur le sénateur, il n’est pas souhaitable d’exclure de l’assiette des variables d’ajustement les allocations compensatrices comme celles qui sont relatives à l’exonération « Natura 2000 », sauf à concentrer l’effort des collectivités territoriales sur un nombre restreint de variables, ce qui risquerait de le rendre moins soutenable pour celles qui demeureraient impactées.
Le périmètre large des variables d’ajustement est ainsi un gage de pilotage équilibré de la trajectoire des concours de l’État aux collectivités territoriales qu’il n’apparaît pas opportun de réduire.
Madame la ministre, vous pensez bien que votre réponse ne me satisfait en aucune façon !
Permettez-moi de corriger un de vos propos. Vous avez dit que les collectivités territoriales avaient consenti une baisse de 1, 5 milliard d’euros des transferts qui leur sont alloués. Or, elles n’ont rien consenti du tout : c’est évidemment contre leur gré qu’elles subissent cette diminution de leurs recettes !
Par ailleurs, que le ministère de l’économie et des finances impose, pour une économie de seulement 1 million d’euros sur les compensations prévues par la loi, un tel sacrifice à de petites communes qui tirent souvent leurs seuls revenus de la forêt et qui sont profondément ancrées dans le territoire rural français est à mes yeux un signe d’irrespect et de négligence à leur égard.
Mes chers collègues, avant d’aborder la question orale suivante, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à onze heures cinq, est reprise à onze heures quinze.
La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 587, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur le dossier de l’adoption plénière d’enfants nés en Haïti et arrivés en France au début de 2010, à la suite du séisme survenu le 12 janvier de la même année.
Le traitement équitable des familles adoptantes et de leurs enfants est compromis par l’application de la circulaire adressée aux procureurs en date du 22 décembre 2010. Prenant prétexte de ce que les autorités haïtiennes auraient décidé de ne plus légaliser la signature des notaires sur les consentements, elle leur demande d’opposer un avis défavorable aux requêtes de conversion en adoption plénière présentées par les familles.
La loi haïtienne sur l’adoption prévoit que l’adopté a, dans sa nouvelle famille, les mêmes droits et les mêmes obligations que ceux qui résultent d’une filiation biologique légitime ou naturelle. Aujourd’hui, Haïti fait évoluer son dispositif législatif afin de reconnaître l’adoption plénière.
Jusqu’à présent, toutefois, les adoptions étaient prononcées par les tribunaux d’Haïti avec le consentement éclairé et légalisé, un document notarié par lequel les parents biologiques donnent leur accord irrévocable pour que l’adoption devienne plénière en France. Les parents adoptifs pouvaient ainsi obtenir un jugement d’adoption plénière auprès du tribunal de grande instance de leur lieu de résidence.
Pour le précédent garde des sceaux, la fin de la légalisation de la signature des notaires compromettait la validité du document par lequel l’adoption des enfants originaires d’Haïti devient plénière en France. Il a donc émis la circulaire de 2010 précitée, dont les conséquences ont été désastreuses, tout particulièrement sur les procédures d’adoption déjà engagées.
Cette circulaire s’est appliquée sans délai. Toutefois, sa prise en compte a été, et demeure, extrêmement variable d’un tribunal de grande instance à l’autre. En effet, si certains procureurs émettent un avis défavorable, certaines familles ont pu obtenir, malgré tout, une adoption plénière. Je veux souligner que des familles se sentent lésées par des décisions leur refusant une adoption plénière, alors même que leur dossier est identique à celui d’autres familles vivant dans d’autres départements et relevant donc d’un autre tribunal de grande instance, dont la demande a connu une issue favorable. D’une certaine manière, ces jugements à géométrie variable contreviennent au principe de l’unicité de la République.
Je m’interroge également sur les conséquences qu’emportera, pour les procédures en cours, l’application de la nouvelle loi sur l’adoption votée en Haïti en août dernier. En effet, après la promulgation de cette loi, les légalisations devraient devenir beaucoup plus aisées.
Madame la ministre, je souhaite par conséquent savoir si vous avez l’intention de demander à vos services de réexaminer la circulaire de 2010, en concertation avec les autorités haïtiennes. Comment comptez-vous suivre le dossier afin de débloquer des situations pénalisantes pour des enfants qui ont commencé à trouver leurs racines dans leur famille française ? Comptez-vous intervenir pour mettre fin aux différences de traitement constatées selon les juridictions ?
Le dossier est extrêmement sensible et à forte charge émotionnelle, comme le sont tous les contentieux impliquant des enfants.
Concernant votre observation relative à une différence de traitement selon les juridictions, la direction des affaires civiles et du sceau, interrogée par mes soins, n’a pas eu connaissance de remontées du terrain faisant état d’une diversité des jugements, et je ne dispose donc pas d’éléments précis sur ce point. Si vous en avez, je vous remercie par avance de bien vouloir me les communiquer, car nous sommes nous aussi très soucieux de l’unité des jugements, comme en témoigne le travail que nous avons engagé pour rapprocher les jurisprudences à tous les niveaux.
En ce qui concerne l’adoption d’enfants haïtiens par des familles françaises, un accord avait été conclu, après le séisme, entre l’ambassade de France et le Premier ministre de la République d’Haïti afin de faciliter la procédure pour 300 enfants en cours d’adoption. Une circulaire avait été prise sur cette base, mais, en 2009, le commissaire au Gouvernement d’Haïti a considéré que les conditions de transformation d’une adoption simple en adoption plénière n’étaient pas conformes au décret de 1974. Il a alors été précisé, dans la circulaire, que les adoptions devraient être légalisées. Il n’existe pas de convention bilatérale entre Haïti et la France qui aurait permis de se dispenser de cette formalité. La République d’Haïti n’avait pas, alors, ratifié la convention de La Haye. Elle l’a fait récemment, et une loi adoptée en août 2013, dont nous attendons la promulgation, en tire les conséquences. Cela facilitera les choses.
Pour l’heure, l’adoption simple permet déjà la prise en charge des enfants et l’autorité parentale exclusive, ainsi que l’attribution du nom et l’engagement des démarches en matière de déclaration de nationalité française. À leur majorité, les enfants adoptés pourront faire le choix d’une adoption plénière. Néanmoins, il est exact que, dans l’attente que la promulgation de la loi produise ses effets, la situation actuelle pose question. Je la sais douloureuse pour les familles françaises : elles n’ont pas compris la position de la République d’Haïti, que nous sommes cependant tenus de respecter, comme l’ont confirmé la Cour de cassation et le Conseil d’État, saisi pour abus de pouvoir. Nous sommes également obligés de respecter les effets qui découleront de la ratification par Haïti de la convention de La Haye.
Nous allons étudier avec la République d’Haïti la possibilité de trouver une solution sécurisante pour les familles et les enfants, concernant toutes les adoptions antérieures à l’entrée en vigueur de la loi d’août 2013.
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.
L’adoption plénière a été accordée sans problème par les tribunaux de grande instance de Bourges, de Poitiers et d’Angers, tandis que celui de Nantes a rejeté les demandes de sept ou huit familles présentant des dossiers en tous points similaires.
Ce sont des situations douloureuses, vécues difficilement par les familles et les enfants concernés, qui commencent à grandir. La ratification par Haïti de la convention de La Haye pourra-t-elle avoir un effet rétroactif en matière d’adoption plénière ? Je sais que la chose est compliquée, mais cela permettrait de rassurer les familles et les enfants.
Quoi qu’il en soit, j’ai pris bonne note de votre réponse, madame la ministre, et j’espère que ce dossier pourra avancer dans les mois à venir. Je vous remercie par avance de vos efforts en ce sens.
La parole est à M. Jacques Mézard, auteur de la question n° 592, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Madame la garde des sceaux, je veux tout d’abord vous exprimer, au nom de mon groupe, notre amitié et notre soutien face aux agressions et aux épreuves que vous avez subies.
Ce message d’amitié étant délivré, j’en viens à la question orale que je me suis trouvé dans l’obligation de déposer, faute de parvenir, depuis des mois, à obtenir une réponse précise par un autre moyen.
La maison d’arrêt d’Aurillac, que je visite régulièrement en tant que parlementaire, présente certaines caractéristiques.
Tout d’abord, elle est située à deux heures et quart de route du siège de la cour d’appel et de la maison d’arrêt de Riom, et à près de quatre heures de route de la direction régionale de l’administration pénitentiaire de Lyon, dont elle relève. Son implantation est donc essentielle au maintien d’un service public de la justice proche et accessible. En effet, sa disparition entraînerait inéluctablement, à terme, la suppression d’un tribunal de grande instance, ce qui imposerait aux citoyens de faire plus de deux heures de route pour accéder au service public de la justice.
Si les conditions de détention y paraissent encore tout à fait acceptables par rapport à ce que l’on constate dans de nombreux établissements similaires, de deux à quatre détenus occupent néanmoins certaines cellules, ainsi que j’ai pu l’observer au mois d’août.
À la suite de sa visite de l’établissement, en 2012, l’ancien garde des sceaux, notre collègue Michel Mercier, s’était engagé à faire conduire au plus vite des expertises afin, d’une part, de mener des travaux de mise en conformité avec les nouvelles obligations découlant de la loi pénitentiaire, et, d’autre part, d’assurer la pérennité de l’établissement, en dépit des souhaits contraires de la direction régionale de l’administration pénitentiaire de Lyon, qui n’a aucune envie de maintenir une maison d’arrêt située à quatre heures de route de son siège. Sur ce dernier point, il m’avait d’ailleurs adressé un courrier très clair.
Malheureusement, à ce jour, aucun de ces travaux essentiels de mise aux normes n’a été réalisé, tandis que les restrictions apportées au financement courant entravent l’entretien normal du site. Pour votre information, madame la garde des sceaux, sachez qu’il faut maintenant passer par Lyon pour acheter des ampoules ! C’est ainsi que cela fonctionne…
Je vous ai précisément interrogée sur un point particulier, qui met en question le fonctionnement et l’avenir de cet établissement : la maison d’arrêt ne dispose pas de sas d’entrée ni de système de vidéosurveillance. Les travaux nécessaires doivent être réalisés, mais ils sont reportés d’année en année, parce que la direction régionale de Lyon n’a strictement aucune envie de les engager.
Je souhaite donc obtenir des réponses précises à ces questions précises, que je vous pose depuis plusieurs mois.
Monsieur le sénateur Mézard, je vous remercie de vos paroles de soutien et de solidarité, auxquelles je suis extrêmement sensible.
En ce qui concerne l’établissement d’Aurillac, son taux d’occupation, de 62, 5 %, est relativement faible au regard de la surpopulation carcérale souvent constatée ailleurs. Je n’ai cependant pas accédé aux demandes de fermeture dont il a été l’objet, motivées par la future implantation d’un centre pénitentiaire à Riom.
Je souhaite le maintien de cette maison d’arrêt, qui assure la fluidité du fonctionnement des juridictions et des extractions, et j’ai donc pris la décision de ne pas la fermer. Par conséquent, il n’y aura pas de fermeture en cascade d’un tribunal de grande instance ou d’autres établissements relevant du ministère de la justice.
Je souligne qu’un certain nombre de travaux ont déjà été effectués : la sauvegarde du bâtiment, pour 181 000 euros, comprenant le remplacement des fenêtres, la réfection des réseaux d’eaux usées et pluviales, ainsi que la réparation de la toiture ; l’amélioration des conditions de détention, au moyen de la réfection des douches, de la mise en place de la ventilation mécanique et de la téléphonie, ainsi que de la réfection du quartier des arrivants ; l’amélioration des conditions de travail des agents, grâce notamment à l’installation d’une chambre de nuit.
D’autres travaux ont été effectués, pour 161 000 euros. Les chaufferies ont ainsi été livrées récemment, le 9 octobre dernier, tandis que le remplacement des sols et des revêtements défectueux est encore en cours.
J’entends vos observations relatives à l’absence de sas d’entrée et de système de vidéosurveillance. J’ai arrêté un plan de sécurisation concernant l’ensemble des établissements pénitentiaires sur tout le territoire, pour un montant total de 33 millions d’euros.
À cette occasion, j’ai demandé à l’administration pénitentiaire de procéder à une étude minutieuse de l’état de sécurité de nos établissements. Il est vrai que la maison d’arrêt d’Aurillac n’a pas été intégrée dans la première vague, celle des sites nécessitant des travaux d’urgence. L’administration pénitentiaire gère tout un ensemble d’établissements selon des critères objectifs, tels le taux de surpopulation carcérale ou l’état de vétusté. À Aurillac, je l’ai dit, il n’y a pas de surpopulation carcérale et les deux bâtiments les plus anciens datent de 1967, mais votre appréciation de la situation locale est certainement plus fine que celle de l’administration pénitentiaire.
J’ai pris bonne note de votre remarque concernant les achats d’ampoules : je vais contrôler ce point très rapidement. Je veillerai à ce que la gestion de nos établissements pénitentiaires ne relève pas d’une bureaucratie pré-cubaine ou post-soviétique !
Sourires.
Je vous propose, monsieur le sénateur, de prendre part très prochainement à une séance de travail à la Chancellerie avec le conseiller pénitentiaire et le conseiller budgétaire de mon cabinet, pour faire le point sur la situation de la maison d’arrêt d’Aurillac.
Madame la garde des sceaux, j’ai bien entendu vos explications, d’ailleurs révélatrices du poids de la technocratie et de la bureaucratie dans notre pays : vous avez rappelé que des menaces de fermeture émanaient de l’administration.
Si l’on ferme, dans nos territoires, tous les services publics dans un rayon de 150 kilomètres, autant demander à la population de déménager ! Vous n’accepteriez pas, je le sais, une telle situation en Guyane, et c’est normal !
Je viens de vous dire que j’ai décidé de ne pas fermer la maison d’arrêt d’Aurillac !
Certes, mais si l’on ne réalise pas un certain nombre de travaux de mise aux normes indispensables, la question se reposera tous les ans, quel que soit le garde des sceaux en fonction.
Je sais que vous tiendrez votre engagement, madame la garde des sceaux, mais il n’en reste pas moins que le problème demeure pendant. L’administration considère que notre dossier n’est pas prioritaire et espère bien atteindre in fine son objectif…
Je souhaite que le pouvoir politique affirme nettement son choix à l’administration et lui impose de réaliser les travaux nécessaires, qui ne sont d’ailleurs pas considérables. Telle est la réponse que j’attends.
La parole est à M. Gérard César, auteur de la question n° 600, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Ma question porte sur la situation du centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan, en Gironde.
Bâtie en 1967, cette maison d’arrêt a plus de quarante-cinq ans. Initialement prévue pour accueillir 448 détenus, elle en compte aujourd’hui près de 700, soit un taux d’occupation de 155 %. Ce centre pénitentiaire est aujourd’hui le plus surpeuplé de l’inter-région.
À la suite de deux visites effectuées le 16 octobre 2008 et le 14 janvier 2009 par la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité, celle-ci a émis un avis défavorable à la poursuite de son exploitation.
La non-conformité et la vétusté importante des bâtiments ont incité votre prédécesseur, madame la garde des sceaux, à décider de la fermeture du centre et à engager la construction d’un nouvel établissement sur le site existant.
La capacité d’accueil devait être de 589 places, dont 480 places pour les hommes, 40 pour les femmes, 30 pour les mineurs, 24 places dans le quartier d’accueil et d’évaluation et 15 dans le service médico-psychiatrique, auxquelles devaient s’ajouter 82 places dans les quartiers de semi-liberté.
Pour améliorer nettement la qualité de vie des détenus et permettre de meilleures conditions de travail aux personnels pénitentiaires, le projet prévoyait un encellulement individuel garanti à 95 %, ainsi que des quartiers d’hébergement dimensionnés à taille humaine et bénéficiant de davantage de lumière naturelle.
Il était également proposé d’augmenter les surfaces, afin d’offrir aux détenus plus d’activités socioculturelles, sportives, scolaires et professionnelles.
Par ailleurs, il devait favoriser l’accueil des familles des détenus et s’insérer parfaitement dans le site et l’environnement.
Madame le garde des sceaux, dans le cadre du plan triennal de rénovation des prisons, actuellement en cours, la poursuite de ce projet n’a pas figuré dans vos priorités.
Depuis 2010, la municipalité de Gradignan travaille sur ce projet avec le service de votre ministère qui s’occupe de la construction, à la fois pour rendre compatible le plan local d’urbanisme de la communauté urbaine de Bordeaux et pour favoriser un abaissement des bâtiments et la végétalisation du site.
Voilà plusieurs mois que les responsables syndicaux du site se plaignent d’agressions et dénoncent des conditions de travail particulièrement difficiles, tout en constatant de très mauvaises conditions de prise en charge des détenus, les cellules étant insalubres et inadaptées à l’accueil de deux, voire trois personnes.
En dépit de la qualité du travail et de l’engagement de la direction, ainsi que de l’ensemble des personnels œuvrant sur le site, la mise en place de conditions satisfaisantes de réinsertion reste difficile, d’où une situation préoccupante.
La construction d’un nouvel établissement dans les meilleurs délais est donc indispensable.
Aussi, je vous demande, madame la garde des sceaux, de me confirmer l’inscription de la reconstruction du centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan au plan triennal 2016-2018 de rénovation des prisons.
Monsieur le sénateur, vous avez raison de rendre hommage aux personnels de nos établissements pénitentiaires, en particulier à celui de Bordeaux-Gradignan. Ils ont, en effet, le sens du service public.
Ils assurent au quotidien un service de qualité, alors que leurs conditions de travail ne sont pas toujours satisfaisantes, même si nous nous employons à les améliorer.
Le centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan a, selon mes sources, un taux d’occupation de 150 % et non de 155 %, mais nous n’allons pas « chipoter » : quoi qu’il en soit, c’est trop, et cette surpopulation carcérale n’est évidemment pas satisfaisante.
Vous le savez, des travaux ont été entrepris dans cet établissement en 2013, pour un montant de 500 000 euros, travaux comprenant une remise aux normes électriques, une consolidation des cuisines et un désenfumage des cellules du quartier disciplinaire.
Par ailleurs, dans le cadre du plan de sécurisation des établissements pénitentiaires que j’ai décidé, le centre de Bordeaux-Gradignan bénéficiera, à hauteur de 1 million d’euros, de travaux strictement réservés à la sécurisation.
Pour le reste, j’entends votre demande de construction d’un nouvel établissement. La fermeture du centre actuel et donc son remplacement n’ont effectivement pas été retenus dans le plan triennal en cours, mais je reconnais que, si le quartier des peines aménagées, ouvert en 2011, est en bon état, les bâtiments des autres quartiers sont fortement dégradés.
Du fait des contraintes budgétaires, je n’ai en effet pas pu retenir cet établissement parmi les priorités de l’actuel plan triennal. Mais il fera partie des centres examinés en priorité dans le cadre du prochain plan.
Pour preuve de cet engagement, qui n’a rien de désinvolte – je ne prends d’ailleurs jamais d’engagement désinvolte –, j’ai déjà demandé que des études d’emprise concernant un terrain soient engagées dans l’hypothèse où je retiendrai la construction d’un centre pénitentiaire, construction qui avait été effectivement prévue dans le passé, sous la forme d’un partenariat public-privé, mais sans que toutes les études nécessaires aient été réalisées.
Je suppose, monsieur le sénateur, que vous savez que ces études d’emprise sont en cours. Sinon, je vous ferai parvenir toutes les informations nécessaires.
Bien entendu, je ne manquerai pas de vous tenir informé de l’évolution du dossier et je veillerai à ce qu’aussi bien l’APIJ, l’Agence publique pour l’immobilier de la justice, que l’administration pénitentiaire vous communiquent au fur et à mesure les informations dont elles disposeront.
Madame le garde des sceaux, je prends bonne note de vos observations, ainsi que de vos précisions concernant les enveloppes de travaux prioritaires, en vue de réduire la vétusté de ce centre pénitentiaire.
Précédemment, en réponse à la question de notre collègue Jacques Mézard, vous avez indiqué que vous étiez prête à organiser une réunion de travail pour parler de l’avenir de la maison d’arrêt d’Aurillac. Si vous en étiez d’accord, un groupe de travail similaire pourrait être mis en place pour le centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan.
C’est indispensable. Avec un taux d’occupation aussi énorme que 155 %, les détenus ne peuvent pas être logés comme ils devraient l’être et, malgré la qualité du travail des surveillants et de la direction pénitentiaire, leur situation est inacceptable.
Peut-être pourrions-nous organiser cette réunion avec tous les acteurs concernés dans les prochains jours ?
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants, en attendant l’arrivée de M. le ministre chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à onze heures quarante-cinq.
La parole est à M. Henri Tandonnet, auteur de la question n° 580, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation.
Monsieur le ministre, je souhaite attirer aujourd'hui votre attention sur la transparence des frais de recouvrement de créance.
Lors de l’examen en première lecture au Sénat du projet de loi relatif à la consommation, j’avais défendu un amendement visant à imposer de la transparence aux établissements bancaires en cas de recouvrement de créance sur le calcul des intérêts. Il avait pour objet de faire apparaître dans le décompte de la somme à recouvrer le détail du calcul des intérêts réclamés, composé du taux d’intérêt appliqué, de la somme sur laquelle il porte, ainsi que de la période sur laquelle ces intérêts sont décomptés.
Ainsi, les consommateurs, qui rencontrent très souvent des difficultés pour comprendre le détail de la somme à rembourser, pourraient enfin bénéficier d’une information claire et compréhensible. Cela permettrait également d’éviter les recouvrements abusifs sur le montant des intérêts.
Vous aviez alors émis un avis défavorable sur cet amendement, rappelant qu’un tel décompte était déjà prévu dans l’article R. 124-4 du code des procédures civiles d’exécution et que l’amendement était donc satisfait. Pour ma part, je ne pense pas que ce soit le cas. En effet, l’inscription du détail du calcul des intérêts n’y est pas précisée et n’est donc pas appliquée par les établissements bancaires.
Je tiens à souligner que cet amendement avait pourtant été adopté par le Sénat en décembre 2011, lors de l’examen, en commission, du projet de loi renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs, texte qui, comme vous le savez, n’a malheureusement pas pu aboutir.
Aussi, j’aimerais connaître les raisons pour lesquelles l’inscription du détail du calcul des intérêts en cas de recouvrement de créance n’est pas appliquée, et j’aimerais savoir si sa mise en place peut être envisagée, ce qui éviterait, je le répète, de nombreux abus et plus de transparence.
Monsieur le sénateur, la question que vous évoquez a effectivement donné lieu à de nombreux échanges lors de l’examen du projet de loi relatif à la consommation, voté cette nuit en deuxième lecture à l’Assemblée nationale, et je ne doute pas qu’elle sera de nouveau soulevée lors de la deuxième lecture au Sénat. Ce texte comporte des dispositions nouvelles qui font beaucoup parler d’elles, notamment celle sur le prix des lunettes, que nous voulons faire baisser, mais là n’est pas le sujet…
Vous m’interrogez donc – et je salue votre constance – sur la possibilité d’inscrire le détail du calcul des intérêts en cas de recouvrement d’une créance bancaire à la suite d’une rupture de contrat.
Je vais vous rappeler certains des arguments que j’avais avancés lors de la première lecture du projet de loi relatif à la consommation ici.
J’avais ainsi invoqué la partie réglementaire du code des procédures civiles d’exécution – l’article R. 124-4, que vous avez vous-même cité – qui précise que « la personne chargée du recouvrement amiable adresse au débiteur une lettre » contenant plusieurs éléments d’information, dont – au 3e de cet article – « le fondement et le montant de la somme due en principal, intérêts et autres accessoires, en distinguant les différents éléments de la dette, à l’exclusion des frais qui restent à la charge du créancier ».
Ce rappel des dispositions réglementaires en vigueur me paraît correspondre à votre préoccupation, car, en application de cet article, le détail du calcul de la créance bancaire doit bien être communiqué au débiteur dans le cadre d’une procédure de recouvrement amiable.
Indépendamment de cette information spécifique dans le cadre du recouvrement amiable, le débiteur reçoit une information régulière sur les frais bancaires qui lui sont appliqués et sur sa situation à l’égard de sa banque.
Ainsi, le relevé de compte transmis par la banque mentionne spécifiquement les frais prélevés, ainsi que, le cas échéant, le plafond de l’autorisation de découvert dont le client bénéficie. En cas de dépassement significatif qui se prolonge au-delà d’un mois, la banque doit informer le débiteur sans délai et par écrit du montant du dépassement, du taux débiteur et de tous frais ou intérêts sur arriérés qui lui sont applicables. C’est l’article L. 311-46 du code de la consommation.
Votre question me donne, de surcroît, l’occasion de rappeler que la loi de séparation et de régulation des activités bancaires prévoit que cette information sur les frais liés à un incident de paiement sera préalable à leur prélèvement, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Enfin, concernant les crédits renouvelables, l’emprunteur dispose également d’une information mensuelle très détaillée en vertu de l’article L. 311-26 du code de la consommation.
Globalement, il me semble donc que les textes en vigueur prévoient déjà une information adéquate du débiteur.
Cela n’enlève rien aux difficultés concrètes évoquées par les associations qui sont au contact des personnes en situation de difficulté financière. Vous savez que, sur ces sujets, de nombreuses dispositions ont été adoptées, notamment en ce qui concerne le plafonnement des frais dans le cadre de la loi de régulation et de séparation des activités bancaires ou sur l’encadrement des crédits à l’occasion du projet de loi relatif à la consommation.
Le groupe d’études auquel vous appartenez a contribué à trouver un équilibre. Je me réjouis que, cette nuit, cet équilibre n’ait pas été modifié au regard des recommandations formulées par plusieurs groupes qui ont travaillé sur la prévention du surendettement, le crédit à la consommation, l’encadrement du crédit renouvelable.
Nous avons, sur ces sujets, progressé. Mais les personnes en difficulté, qui sont souvent déjà désemparées par les courriers de leur établissement bancaire ou leur établissement de crédit, ont incontestablement davantage besoin de conseils que de nouvelles informations.
C’est le sens de la démarche engagée par le Gouvernement dans le cadre du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, avec les fameux « points conseils budget », auxquels les personnes en situation de difficulté financière pourront s’adresser afin de se faire expliquer les documents transmis par leurs créanciers et, le cas échéant, de bénéficier de l’aide d’un tiers de confiance qui pourra trouver une solution adaptée à leur situation.
Ces mesures s’ajouteront à la création du registre national des crédits aux particuliers qui nous permettra, dans un autre domaine, de mesurer la solvabilité de celles et ceux qui sollicitent un crédit pour leur éviter le crédit « de trop » et qui responsabilisera, cette fois, le prêteur et non pas simplement l’emprunteur.
Ces dispositions sont de nature à mieux protéger les personnes que leur situation financière rend parfois vulnérables face à leur établissement de crédit ou à leur établissement bancaire.
Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse : nous partageons le même objectif de transparence. Je reconnais que de très grands progrès ont été accomplis, et le projet de loi relatif à la consommation va encore permettre une avancée significative. Ce que je vous propose, c’est un peu plus de transparence sur ce qui peut apparaître comme un détail, à savoir le calcul des intérêts.
Ce calcul fait entrer trois inconnues qu’il est indispensable de bien préciser.
La première inconnue est le montant du capital sur lequel les intérêts portent et qui a servi de base à leur calcul, montant auquel les organismes de recouvrement ajoutent bien souvent celui des frais.
La deuxième inconnue est le taux retenu. Il peut ainsi s’agir du taux d’intérêt légal ou d’un taux d’intérêt conventionnel. Souvent, le taux est fixé après application des pénalités de retard.
La troisième inconnue est la période sur laquelle sont calculés les intérêts. Quand le débiteur paye par acompte, l’imputation des acomptes sur le capital et le calcul de la période à laquelle s’applique le taux d’intérêt sont essentiels.
Croyez-moi, monsieur le ministre, ayant quarante ans d’expérience professionnelle dans le domaine du recouvrement des créances, pour et contre les banques, je peux vous affirmer qu’il y a là une faille, situation à laquelle la transparence que vous essayez d’instituer – vous l’avez fort bien fait pour les frais bancaires – permettrait de remédier. Faire la transparence sur le calcul des intérêts, ce qui rassurerait tout le monde et éviterait des recouvrements abusifs sur des intérêts mal calculés, est de surcroît facile.
La parole est à M. Dominique Bailly, auteur de la question n° 544, adressée à M. le ministre de l'économie et des finances.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai souhaité ce matin attirer l’attention de M. le ministre de l’économie et des finances sur le projet de taxe européenne sur les transactions financières.
Ce projet a trouvé un aboutissement lors du conseil « économie-finances » du 22 janvier 2013, avec le lancement d’une coopération renforcée sur le sujet entre onze États membres, dont l’Allemagne.
La proposition de la Commission européenne prévoit que le dispositif concerne le marché des actions et obligations, au sein duquel chaque transaction serait taxée à hauteur de 0, 1 %, et celui des produits dérivés, pour lequel serait appliquée une taxe à hauteur de 0, 01 %.
La Commission européenne envisage une entrée en vigueur de cette taxe au cours de l’année 2014.
Au fil des derniers mois, les négociations entre les différents États membres ont fait apparaître des inquiétudes quant aux conséquences de la mondialisation induites en particulier par le principe de résidence, mais également sur l’impact économique de la taxe ou encore sur l’affectation des fonds récoltés, sans pour autant remettre en cause le principe même de ce prélèvement et de cette taxation.
Le gouvernement français, qui soutient le projet de taxe européenne sur les transactions financières, a également souligné qu’il convenait d’améliorer la proposition de la Commission européenne, afin de parvenir à une taxe qui ne nuise pas au financement de l’économie. En effet, les fédérations et associations professionnelles estiment que le dispositif, tel qu’il est présenté par la Commission européenne, pourrait conduire à des délocalisations massives d’activités et donc à des suppressionsd’emplois.
Monsieur le ministre, je vous demande donc de bien vouloir nous faire part des pistes de travail envisagées par le Gouvernement afin d’améliorer la proposition de la Commission européenne et ainsi permettre la mise en œuvre la plus rapide possible de cette taxation financière.
Monsieur Bailly, je vous prie d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances, qui m’a demandé de vous transmettre sa réponse.
La position de la France dans ce domaine a toujours été constante. Je vais rapidement en rappeler les termes.
Nous voulons une taxe ambitieuse sur les transactions financières à l’échelle des onze États qui participent à la coopération renforcée, et nous la voulons rapidement.
Nous avons tout fait pour cela ces derniers mois, et nous sommes au travail afin de faire aboutir ce projet, historiquement inédit à double titre : la première coopération renforcée en matière fiscale dans l’histoire européenne et la première taxe sur les transactions financières à grande échelle.
Je veux rappeler les faits : c’est la France qui, depuis l’élection de François Hollande, a ranimé le dossier « taxes sur les transactions financières », enlisé depuis plusieurs années. Nous avons obtenu que dix États membres se joignent à nous pour demander à la Commission de lancer la coopération renforcée.
Il est vrai, parce que cette initiative est nouvelle et qu’elle engage des enjeux de souveraineté, que les discussions prennent du temps. Il est également vrai que les élections en Allemagne et le temps de formation et de définition du mandat du gouvernement allemand ont pu retarder assez logiquement ce processus.
Pour autant, la position de la France n’a pas varié : elle promeut une taxe véritablement ambitieuse.
Si tout n’est pas parfait dans la proposition de la Commission, la position de la France sur ce sujet est constante et cohérente. Le ministre de l’économie et des finances a pu l’exprimer publiquement à de nombreuses reprises : le Gouvernement a, notamment sur la question de la territorialité, des réserves économiques. Des aménagements au projet de la Commission ont ainsi été demandés. Aucun État autour de la table, du reste, ne trouve parfaite la proposition initiale. La Commission y a elle-même apporté des améliorations chemin faisant. Le Parlement européen a adopté des résolutions qui recommandent d’autres améliorations.
Contrairement à ce que l’on peut lire ou entendre, l’avis du Conseil européen sur cette question de la territorialité ne condamne ni le principe d’une taxe sur les transactions financières en Europe ni la taxe française elle-même.
Dès lors, l’attitude de la France est on ne peut plus claire : nous sommes à pied d’œuvre aux côtés de l’Allemagne, qui a réaffirmé son attachement au projet européen de taxe sur les transactions financières, pour que ce formidable projet que nous avons relancé ensemble voie le jour et montre l’exemple au reste des pays de l’Union. C’est ce à quoi travaille le Gouvernement depuis ces derniers mois, avec nos partenaires, pour rendre la proposition de la Commission opérationnelle et économiquement efficace.
Monsieur le ministre, je vous remercie de réaffirmer la volonté politique du Gouvernement de voir aboutir cette taxation financière au niveau européen. Je souhaite que l’année 2014 apporte cette réussite, car ce sera un élément politique important pour la construction européenne.
Mes chers collègues, dans l’attente de l’arrivée de M. le ministre des outre-mer, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à douze heures.
La parole est à M. Michel Magras, auteur de la question n° 579, adressée à M. le ministre des outre-mer.
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, le décret du 15 avril 2013 qui ramène de seize à six mois de traitement indiciaire l’indemnité de sujétion géographique des fonctionnaires et magistrats en poste à Saint-Barthélemy suscite l’inquiétude du corps enseignant.
Cette diminution importante aurait pu être lue à l’aune des contraintes budgétaires que nous connaissons, mais la fixation de la même indemnité entre dix et seize mois de traitement pour les fonctionnaires en poste à Saint-Martin soulève une incompréhension.
La collectivité de Saint-Martin est en effet voisine de seulement vingt kilomètres de Saint-Barthélemy, et, surtout, le coût de la vie y est nettement moins élevé.
À Saint-Barthélemy, les prix sont, au contraire, particulièrement élevés. Cela tient à de multiples raisons, parmi lesquelles la totale dépendance aux importations et l’étroitesse du territoire qui provoque une pression à la hausse sur l’ensemble des prix, y compris ceux de l’immobilier.
Dans ces conditions, la diminution de l’indemnité aura immanquablement pour effet d’alourdir mécaniquement les frais d’installation des enseignants qui seront affectés sur l’île.
De plus, la modification des conditions matérielles place les deux collectivités voisines en concurrence dès lors que, la demande d’affectation étant volontaire, les candidats risquent fort de favoriser le territoire le plus avantageux du point de vue matériel.
Le contexte économique de Saint-Barthélemy est déjà source d’une pénurie d’enseignants, ce qui a nécessité de recourir longtemps à des personnels contractuels, une situation que ces nouvelles règles indemnitaires ne feront qu’accentuer en l’absence d’un « amortisseur » financier.
Comme les enseignants ne bénéficient pas de logement de fonction, ils sont en réalité les seuls fonctionnaires d’État à être réellement impactés par la baisse de l’indemnité à Saint-Barthélemy. En effet, eu égard au niveau des prix pratiqués localement, le logement représente un poste de dépense fixe important.
Si les autres catégories de fonctionnaires d’État ne sont pas concernées, c’est parce qu’elles sont logées soit par l’État, soit par la collectivité elle-même, au titre d’une convention passée avec l’État antérieurement à l’entrée en vigueur du statut de collectivité autonome.
En outre, le décret précité fixe le même régime indemnitaire pour Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon, deux territoires qui ont en commun une faible population. Cela laisse donc penser que c’est le critère démographique qui a présidé à la révision du dispositif.
Or, à Saint-Barthélemy, du fait justement d’un faible poids démographique, le nombre de fonctionnaires qui pourraient être concernés reste limité. Dès lors, l’impact budgétaire d’un alignement de l’indemnité sur celle de Saint-Martin sera lui aussi limité. Aujourd’hui, sur 45 enseignants présents sur l’île, seuls 12 ont été bénéficiaires de l’indemnité dans ses modalités antérieures.
Enfin, cette réforme risque d’avoir pour autre effet de dissuader certaines catégories d’enseignants de postuler pour Saint-Barthélemy, ce qui, à terme, ne pourra qu’avoir des répercussions sur la diversité de l’encadrement pédagogique, pourtant nécessaire sur un territoire aussi exigu.
Je vous serais donc reconnaissant, monsieur le ministre, de m’indiquer si un réexamen intégrant davantage la réalité de la cherté de la vie peut être envisagé.
Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur l’instauration d’une indemnité de sujétion géographique, fixée, pour la collectivité de Saint-Barthélemy, à six mois de traitement indiciaire du fonctionnaire pour une durée minimale de quatre années de services.
L’indemnité de sujétion géographique, également applicable en Guyane, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, a succédé, le 1er octobre 2013, à l’indemnité particulière de sujétion et d’installation, l’IPSI.
L’instauration de l’indemnité de sujétion géographique est le fruit d’une longue concertation avec les différents ministères employeurs, organisée par ma collègue Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique.
Il convient de rappeler que le dispositif précédent de l’IPSI n’avait été créé, en 2001, qu’à titre transitoire, pour répondre immédiatement aux problèmes d’attractivité de ces quatre collectivités.
Le but était d’ajuster, à partir de critères objectifs, une nouvelle indemnité aux sujétions particulières et spécifiques des collectivités concernées.
Ces sujétions sont principalement liées à la situation géographique, notamment à l’éloignement des communes par rapport aux centres administratifs dans certains territoires, comme en Guyane, mais aussi aux difficultés inhérentes à certains postes.
La réforme menée à bien cette année n’a pourtant écarté aucune collectivité précédemment bénéficiaire de l’indemnité particulière de sujétion et d’installation. Elle a toutefois permis de créer un régime différencié selon les territoires, tenant compte des difficultés réelles de recrutement pour chacun d’eux, en dégageant des critères pertinents selon les affectations, et non plus globalement par collectivité, du moins lorsque des différences de situation le justifiaient.
Ainsi, des mécanismes de modulation ont été mis en place en Guyane et à Saint-Martin, où des différenciations selon les affectations ont clairement été relevées. Les collectivités ne sauraient donc être mises en concurrence puisque la réforme répond à des difficultés spécifiques à chacune d’entre elles.
Dans cet esprit, le critère démographique n’a pas été pris en compte, ni l’impact financier par collectivité.
Ainsi, la Guyane bénéficie d’un régime très souple compte tenu de l’importance des effectifs concernés, de la superficie du territoire et de la diversité des situations selon les affectations.
De même, au cours de la concertation interministérielle, de réelles difficultés de recrutement ont été relevées dans la collectivité de Saint-Martin. C’est pourquoi un système de modulation a été mis en place dans cette collectivité, à l’instar de la Guyane, selon des modalités toutefois moins avantageuses.
En revanche, à Saint-Pierre-et-Miquelon comme à Saint-Barthélemy, le problème de l’attractivité n’a pas été mis en évidence par les différents départements ministériels.
Toutefois, malgré un contexte budgétaire contraint, il a été décidé de maintenir un régime indemnitaire dans ces deux collectivités, afin de ne pas créer de situation de rupture avec le dispositif précédent, susceptible de constituer, à terme, un frein à la mobilité. Dans ces conditions, un même régime forfaitaire de six mois de traitement a été fixé à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Saint-Barthélemy.
L’instauration de l’indemnité de sujétion géographique à Saint-Barthélemy prend ainsi en compte les difficultés propres à cette collectivité, qui sont liées à la cherté de la vie.
Monsieur le sénateur, le dispositif mis en place tend donc à répondre aux problématiques que vous soulevez. Mme la ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique et moi-même veillerons à évaluer l’impact de cette réforme sur les prochains exercices, en liaison avec les ministères employeurs.
Si un problème d’attractivité se posait – vous avez évoqué le caractère dissuasif de la mesure que nous avons prise –, je suis prêt à vous recevoir pour procéder avec vous à une évaluation de la situation et aviser.
Monsieur le ministre, je vous remercie de la qualité de votre réponse. Je souscris bien entendu à la volonté de réforme globale de cette indemnité par le Gouvernement. Vous me permettrez de craindre cependant que l’incompréhension ne persiste encore pendant un certain temps chez les personnels concernés. Toutefois, je suis satisfait que le Gouvernement s’engage, par votre voix, à faire une évaluation de la situation et, éventuellement, à réagir en conséquence.
Avec votre accord, je veillerai de mon côté à me faire le porte-parole des parties concernées. Je n’hésiterai pas à solliciter le Gouvernement pour qu’ensemble nous puissions faire en sorte que l’enseignement, en particulier celui qui est destiné aux enfants de Saint-Barthélemy, ne soit pas pénalisé.
La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 525, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
Monsieur le ministre, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les conséquences des délais particulièrement longs pour ce qui concerne la présentation à l’examen du permis de conduire dans le Val-de-Marne.
En France, le délai moyen entre la fin de la formation pratique et l’examen varie de quelques semaines à deux mois ; dans mon département, il atteignait six mois quand j’ai posé cette question en juillet dernier. Aujourd'hui, il est presque de huit mois pour les personnes qui, ayant échoué une première fois à l’examen, veulent se réinscrire.
Une telle situation est très embarrassante pour les élèves, car ils doivent faire face à des coûts qui ne sont pas prévus dans les « forfaits » souscrits avant même l’épreuve théorique du code.
Entre la dernière heure de formation et l’examen, de nombreux élèves doivent reprendre des leçons supplémentaires – une heure ou deux par mois – pour conserver leur acquis.
Ce surcoût imprévu est source de relations conflictuelles entre les auto-écoles et leurs élèves. Ces derniers ne comprennent pas qu’ils sont obligés d’attendre aussi longtemps et que ce n’est pas la faute de l’auto-école. En cas d’échec, les coûts deviennent exorbitants compte tenu des délais.
L’obtention du permis de conduire est souvent essentielle pour trouver un travail ; le permis est indispensable à la mobilité, même en Île-de-France, où les transports en commun ne sont pas disponibles partout et où il peut être difficile de se rendre d’un endroit à un autre.
Ce rallongement des délais est dénoncé depuis 2010 par les professionnels du Val-de-Marne. Le préfet avait alors décidé, à titre exceptionnel, de faire appel à des inspecteurs d’autres départements pour débloquer la situation. À titre de comparaison, eu égard à la population, il y a moins d’inspecteurs dans le Val-de-Marne qu’en Bretagne !
Dans le même ordre d’idées, une seule personne s’occupe de l’enregistrement des dossiers déposés à Créteil. Il faut au moins quatre mois pour qu’une auto-école obtienne le renouvellement de son agrément quinquennal…
Monsieur le ministre, quelles mesures le ministre de l’intérieur compte-t-il prendre dans l’immédiat pour débloquer cette situation critique dans le Val-de-Marne ? Quelles mesures durables va-t-il mettre en œuvre tant pour les élèves, qui attendent trop, pour les inspecteurs, qui ne sont pas assez nombreux, et pour les auto-écoles, dont certaines sont à la veille du dépôt de bilan à cause de ces dysfonctionnements ?
Madame la sénatrice, vous avez interrogé le ministre de l’intérieur sur l’importance des délais de présentation à l’examen du permis de conduire, notamment dans votre département du Val-de-Marne. Manuel Valls, qui regrette de ne pouvoir être présent parmi nous ce matin, m’a transmis les éléments de réponse suivants.
L’accès au permis de conduire est un sujet important, car, comme vous l’avez rappelé, celui-ci n’est pas une simple autorisation administrative. Il est, pour beaucoup de jeunes, synonyme d’accès à l’autonomie et à l’emploi, bref, à l’âge adulte.
Comme vous le savez, le nombre de places auquel chaque école de conduite peut prétendre pour présenter des candidats à l’épreuve pratique est fixé selon une méthode nationale, qui tient compte notamment de la réussite de chaque école durant les douze derniers mois.
Cette méthode d’attribution est complétée par plusieurs dispositifs qui permettent d’augmenter l’offre d’examens au niveau départemental lorsque celle-ci est saturée : renforts d’inspecteurs de départements proches, organisation d’examens supplémentaires le samedi, par exemple. Ces dispositifs permettent d’accorder des renforts ponctuels aux départements qui connaissent un délai d’attente entre deux présentations supérieur à la moyenne nationale, en particulier à certaines périodes de l’année, qui correspondent à un afflux des demandes.
La mise en œuvre de ces mesures a permis d’obtenir sur l’année 2012 un délai moyen d’attente d’environ 86 jours au niveau national. Dans le département du Val-de-Marne, ce délai est supérieur, avec 120 jours. Même s’il n’atteint pas la durée de six mois que vous avez mentionnée, ce délai reste trop long ! C’est pourquoi le Val-de-Marne a bénéficié au cours des neuf premiers mois de l’année 2013 de 100 examens supplémentaires par mois environ, ce qui correspond à un renfort équivalent à un inspecteur du permis de conduire et de la sécurité routière à temps plein.
De plus, la longueur des délais dans ce département s’explique aussi par un taux de réussite à l’examen inférieur au taux national sur l’année 2012 : 51, 58 % dans le Val-de-Marne, contre 59, 13 % sur l’ensemble du territoire.
Pour autant, le ministre de l’intérieur est conscient de la nécessité d’ouvrir une réflexion globale sur la question des places d’examen. C’est pourquoi il a demandé à la présidente de la commission « Jeunes et éducation routière » du Conseil national de la sécurité routière de mener une concertation élargie sur ce sujet et de proposer un plan d’action.
Mme Catherine Procaccia. Monsieur le ministre, je suis bien consciente que vous êtes ici le porte-parole du Gouvernement, mais les problèmes de présentation de permis de conduire ne se rencontrent pas qu’Île-de-France ; les outre-mer sont concernés aussi !
Sourires.
Si l’on compare les taux moyens de réussite, celui du Val-de-Marne, qui est de 52 %, est certes plus faible que celui qui est constaté dans le reste de la France. Cependant, ce résultat n’est que normal : compte tenu de la circulation en Île-de-France, sur une heure de cours de conduite, il est possible de rester bloqué 45 minutes dans les encombrements ! En Île-de-France en général et dans notre département en particulier, il faut donc davantage d’heures de conduite. En province, on conduit effectivement pendant une heure, contre 30 ou 40 minutes dans notre région. Voilà un facteur qui peut expliquer ce taux plus faible !
Par ailleurs, de nombreuses personnes passent le permis : 6 445 personnes durant le premier trimestre dans le Val-de-Marne, dont près de 48 % l’ont réussi. Entre-temps, il y a eu 2 848 demandes. D’après mes calculs, ce sont 25 000 personnes qui auront demandé à passer le permis de conduire cette année, auxquelles il faut ajouter 12 000 élèves en attente.
Vous avez annoncé, monsieur le ministre, qu’une réflexion allait être menée. Dont acte ! Mais il faut tenir compte du stock, et non du flux permanent. En Île-de-France, la situation est plus tendue qu’ailleurs. Il faudrait agir, d’autant qu’un tiers des examens ont été annulés à la suite de la grève des inspecteurs, au mois de décembre.
Cette annulation augmentera encore davantage le stock de candidats en attente et retardera d’autant la date à laquelle tous ces jeunes pourront passer l’examen !
J’espérais que M. le ministre de l’intérieur me répondrait que des moyens supplémentaires seraient momentanément mis à disposition de la préfecture, via le recrutement d’une personne chargée d’examiner les dossiers, d’une autre pour renouveler l’agrément des auto-écoles…
Il est tout de même absolument incroyable que l’on accorde d’office aux auto-écoles le renouvellement de leur agrément, faute de temps pour examiner leur dossier, déposé, parfois, plusieurs mois auparavant ! Cette situation est complètement aberrante.
Par votre voix, le ministre de l’intérieur annonce une concertation. Il ferait mieux d’annoncer clairement à tous les habitants du Val-de-Marne, aux jeunes et aux moins jeunes qui passent leur permis de conduire, aux auto-écoles et aux inspecteurs que rien n’est prévu pour améliorer la situation rapidement !
La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 471, adressée à Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement.
Monsieur le ministre, c’est sur la couverture des territoires en téléphonie mobile que je souhaite attirer l’attention du Gouvernement, de la même manière que j’avais attiré celle du gouvernement précédent.
La situation de mon département en zone de montagne ne facilite certainement pas une bonne communication, aggravant ainsi des handicaps naturels.
Toutefois, grâce à la mutualisation des moyens, des avancées significatives, en partenariat avec les collectivités locales – départements et régions – et les opérateurs, ont été enregistrées depuis plusieurs années. Elles permettent de couvrir la grande partie des territoires initialement qualifiés de « zones blanches ». Ces marques de solidarité et ces complémentarités permettent à la France dite « profonde » de bénéficier d’un progrès technique très important.
Néanmoins, il faut continuer et aller plus loin, car la plus grande partie du territoire reste en zone dite « grise », ce qui aggrave les disparités existantes.
Oui, monsieur le ministre, les actions collectives en la matière doivent perdurer, voire s’améliorer, par une mutualisation des opérateurs.
En effet, il est anormal que les relais de deux, voire de trois opérateurs se chevauchent sur nos territoires, augmentant ainsi les coûts d’investissement, dénaturant souvent le paysage et provoquant des incohérences sur le plan de la réception.
La mutualisation est indispensable à l’efficacité, à l’économie, voire au respect du simple bon sens, aussi. Nos territoires ruraux, en particulier en zone de montagne, ont le droit de pouvoir bénéficier de cette parité. Souvent, leurs habitants ne comprennent pas le « gâchis d’équipements ».
Oui, monsieur le ministre, les zones grises sont bien souvent devenues des zones blanches…
Dans le contexte économique difficile que l’on connaît, de telles propositions relèvent d’une logique indispensable de solidarité, qui doit se traduire dans la réglementation.
Monsieur le ministre, permettez-moi d’insister pour connaître les perspectives techniques et réglementaires qui se dessinent dans ce domaine.
Monsieur Jean Boyer, vous voudrez bien excuser l’absence de ma collègue Cécile Duflot, qui m’a chargé de vous communiquer les éléments de réponse suivants.
Vous avez justement noté une amélioration de la desserte en réseaux de télécommunication mobile, ce qui est le résultat des règles de mutualisation énoncées par l’État et des efforts de la puissance publique réalisés en faveur des zones rurales.
Ces règles de mutualisation des infrastructures en milieu rural, mais aussi, bien entendu, l’implication conjointe des collectivités territoriales, des opérateurs et du Gouvernement, dans le cadre d’un programme conduit par la Délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale, la DATAR, ont permis de desservir plus de 3 200 communes, que le simple jeu de la concurrence ne permettait pas d’équiper, en raison de leur faible densité ou de leur éloignement.
Conformément à l’objectif même d’égalité des territoires, il appartient à la puissance publique d’intervenir dans ces zones, afin que chacun de nos concitoyens puisse bénéficier de ces technologies et des usages qui en découlent.
Par ailleurs, vous mentionnez l’existence, sur une même commune, de plusieurs pylônes d’opérateurs distincts. Cette situation, qui peut paraître surprenante, est consécutive aux orientations données par les différents traités fondateurs de l’Union européenne, qui ont permis que s’exprime, là où la densité démographique et les enjeux commerciaux le justifiaient, une concurrence par les infrastructures plutôt que la réalisation de programmes d’équipements confiés jusque-là à des sociétés nationales en situation de monopole.
Je comprends votre crainte de voir certaines « zones grises », sur lesquelles les opérateurs ne sont pas tous présents, devenir progressivement des « zones blanches », ce qui signifierait que les opérateurs initialement installés auraient cessé de délivrer des services. Je tiens toutefois à vous rassurer sur ce point : le Gouvernement veillera à ce que les conditions d’exploitation des infrastructures existantes ne se détériorent pas.
C’est un enjeu majeur, et le Gouvernement restera extrêmement attentif. Soyez assuré de sa vigilance.
Cela étant, je vous invite, monsieur le sénateur, à signaler toute dégradation de la couverture en réseaux de télécommunication mobile que vous pourriez constater, afin que des mesures puissent être prises dans les meilleurs délais.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, que j’apprécie parce qu’elle est complète.
Néanmoins, vous me permettrez de prendre à témoin ceux qui siègent dans cet hémicycle, et qui sont tous hommes de bon sens.
Sourires.
M. Jean Boyer. Bien sûr, ma chère collègue, et vous n’êtes pas la dernière à le prouver !
Nouveaux sourires.
Il est de notoriété publique que les opérateurs s’implantent là où se trouve la population. C’est normal ! Si nous avions à gérer une entreprise, nous ferions de même.
Bien évidemment, cela pose problème aux zones rurales, dont la densité est en général assez faible. Mon département compte un canton où il y a moins de cinq habitants au kilomètre carré ! Comment voulez-vous que les opérateurs soient incités à venir s’implanter sur des territoires où la densité est aussi faible ?
Dans ces conditions, pour parler très concrètement, pourquoi ne pas autoriser, éventuellement par décret – je ne sais quelle est la voie juridique la plus adaptée – deux ou trois opérateurs à se brancher à un seul et même pylône, plutôt que de voir s’implanter trois pylônes sur un même territoire ?
Monsieur le ministre, une collaboration s’est organisée entre ma région, l’ensemble des départements qui la composent et l’État, sur la base d’une mutualisation. C’est par de telles initiatives que les zones blanches de la France profonde bénéficient aujourd'hui d’une couverture des trois opérateurs. Cette expérience, qui a été très appréciée, devrait être généralisée.
J’informe le Sénat que le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, (n° 178, 2013-2014), dont la commission des affaires économiques est saisie au fond, est envoyée pour avis, à sa demande, à la commission des finances.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Charles Guené.