Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de vous présenter mes meilleurs vœux, pour une année pleine d’écoute et d’inventivité.
Pendant six mois, nous nous sommes penchés – je parle de ceux qui n’étaient pas retenus dans l’hémicycle – sur l’organisation de la République décentralisée à moyen terme, c'est-à-dire pour la période 2020-2025.
Certes, cet essai de prospective était une excellente idée. Mais notre réflexion a été de courte vue : le temps politique et législatif s’écoule plus lentement que le temps civil. Ainsi, le moyen terme, c'est-à-dire six ans ou sept ans, est en réalité le court terme législatif ; notre dernière loi sur l’organisation territoriale de la France porte déjà sur cette période.
En effet, la loi sur l’affirmation des métropoles envisage de revoir le mode d’élection des conseillers métropolitains, avec notamment l’élection au suffrage direct du président à l’horizon 2020 !
Ainsi, borner notre réflexion à 2020-2025, c’est en réalité nous interroger sur l’évolution des lois que nous sommes en train de voter. Cela fait donc, en quelque sorte, double emploi avec l’acte III de la décentralisation.
C’est pourquoi le rapport, malgré toutes ses qualités, pèche par manque d’ambition. Nous savons ce que nous avons, nous savons ce que nous sommes en train de voter, mais nous ne savons pas nous en extraire pour imaginer l’organisation de la France de demain. Tout au plus, nous en sommes restés à la France de ce soir, au mieux de cette nuit !
Attachés à notre travail quotidien, nous n’avons peut-être pas été capables de nous détacher de nos modes de pensée actuels, si liés au passé.
J’en veux pour preuve la querelle des fondamentaux, celle des départements. La suppression des départements, que les Verts portent dans leur programme depuis leur origine, découlerait, selon le rapport, d’une analyse « dogmatique et infondée », l’« enracinement historique » des conseils généraux fondant leur « légitimité ».
À dogmatique, dogmatique et demi ! Depuis quand l’ancienneté est-il un gage de légitimité ? Sauf à dire que le neuf est toujours moins bon que l’ancien, que l’inventivité doit céder le pas au conservatisme, bref que l’imagination n’a pas sa place dans une analyse prospective…
Pourtant, dans cet hémicycle, après avoir reproché aux écologistes de n’avoir aucune vision territoriale – je vous invite à prendre connaissance de notre vision en lisant la première page de mon site Internet –, certains ont finalement trouvé bon de prôner publiquement la disparition des départements lorsque la métropole les dépouillait de leur utilité. Ainsi, la loi adoptée, en laissant subsister les départements de petite couronne, n’aurait pas été assez loin.
Nous devons évoluer et n’avoir aucun tabou, dans une analyse prospective. Nous devons oser toucher à l’organisation centralisée napoléonienne, où les départements étaient un simple rouage de l’administration centralisée de la France. La France ne peut-elle pas aller de l’avant et se réinventer à travers elle-même, parfois en supprimant ou en modifiant des institutions devenues superfétatoires ?
Faut-il que nous restions arc-boutés sur une institution sous prétexte qu’il y a soixante-dix-huit conseillers départementaux, dont trente-cinq présidents de conseil départemental, parmi nous ?