Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 7 janvier 2014 à 14h30
Débat sur les conclusions de la mission commune d'information sur l'avenir de l'organisation décentralisée de la république

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

« La République est forte par son État, mais aussi par ses territoires ». Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, comment concrétiser cette affirmation du Président Hollande, que nous approuvons tous, ici, au sein de la chambre des territoires ?

Trente ans après les premières lois de décentralisation, qui ont changé la France, comme vous l’avez rappelé, madame le ministre, il est nécessaire de renforcer la capacité des collectivités à développer leur territoire. Comme vous, j’ai la conviction que le futur de notre pays se confond avec celui des territoires. Je crois aussi qu’une impulsion doit émaner du terrain, des acteurs de la démocratie locale, avec un indispensable objectif de clarté, d’efficacité et de subsidiarité.

Le Sénat possède, par essence, une longue tradition de réflexion sur les collectivités. Un des constats de la mission commune d’information est particulièrement alarmant, je veux parler du risque d’apparition d’un « sous-prolétariat territorial », notamment dans les zones rurales. Un tel phénomène serait inconcevable et inadmissible au sein de la République. Comme nous tous ici, je considère que l’égalité des chances entre les territoires est un impératif républicain et un élément essentiel pour utiliser au mieux le potentiel économique de notre pays.

L’État est le garant de l’unité et de la solidarité nationales, mais chaque territoire a ses besoins et ses contraintes ; c’est l’échelon local qui peut le mieux les définir. La décentralisation à la française a presque toujours été mise en œuvre par une déconcentration, l’État transférant des compétences à la charge des élus locaux, tel un ministère déconcentrant ses services. La sédimentation de l’histoire a, hélas ! construit une décentralisation par superposition et non par subsidiarité.

Il en résulte un labyrinthe administratif complexe, aux itinéraires mal identifiés et parfois manquant de cohérence, non seulement pour le citoyen, mais aussi pour les élus.

Nos concitoyens remettent en cause la bonne utilisation de leurs impôts, qu’ils jugent trop lourds, pour financer les services publics - trop de doublons, de compétences concurrentes nuisent à l’efficacité de l’action publique. Ils ne comprennent pas comment, en dix ans, l’effectif des agents locaux a augmenté de façon très déraisonnable, de près de 40 %.

La corrélation est évidente entre les 400 000 normes, qui constituent un frein dramatique à la fluidité de l’économie, et le nombre de fonctionnaires qui en surveillent l’application. Diminuons les normes de façon draconienne, et la dépense publique diminuera mécaniquement.

La commune est la structure première de la démocratie et de la proximité. Les 550 000 élus locaux forment un maillage territorial incomparable qu’aucune administration ne saurait remplacer. L’intercommunalité est l’échelon pertinent pour la réalisation de projets, dont la nouvelle phase d’intensification a débuté le 1er janvier. Elle est aussi l’outil adapté à la consolidation de bassins de vie cohérents et dynamiques.

Cette mutualisation réussie a été opérée grâce à l’attribution aux intercommunalités de compétences choisies par les communes, qui, elles, possèdent la compétence générale. La répartition claire entre compétence générale et compétence d’attribution est un principe qui fonctionne, il permet de savoir qui fait quoi. Le rétablissement de la clause générale de compétence au profit des départements et des régions sera plus source de confusion que d’efficacité. La notion de « chef de filat » ne suffira pas à rendre l’organisation claire.

Issues de l’expérience des élus, les propositions de la mission commune d’information ont mûri à l’écoute de personnalités extérieures au monde politique.

La comparaison avec nos partenaires européens est enrichissante. Ainsi, l’Allemagne fédérale compte moins de structures, moins de fonctionnaires, et une dépense publique moindre ; pourtant, elle offre une efficacité des services publics au moins égale à celle de la France, sinon meilleure, et ce en partie grâce à un Bundesrat composé exclusivement d’élus locaux ! La loi sur le non-cumul des mandats sera préjudiciable à cette démarche de meilleure organisation.

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