Intervention de Philippe Dallier

Réunion du 7 janvier 2014 à 14h30
Débat sur les conclusions de la mission commune d'information sur l'avenir de l'organisation décentralisée de la république

Photo de Philippe DallierPhilippe Dallier :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la mission commune d’information, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, permettez-moi de saluer également le travail de notre mission commune d’information et l’excellent état d’esprit dans lequel elle a œuvré.

Le mérite en revient aussi bien à son président, Jean-Pierre Raffarin, qui est, avec le groupe UMP, à l’initiative de sa création, qu’à son rapporteur, Yves Krattinger ; tous deux ont su dépasser les clivages politiques pour tenter d’éclairer la voie d’une nouvelle étape de la décentralisation.

Dans cette perspective, il y a, et c’est heureux, des sujets qui nous rassemblent.

Tout d’abord, chacun reconnaît qu’il ne peut plus y avoir un modèle unique d’organisation de nos territoires ; leur diversité justifie des modèles différents. Du reste, nous avons déjà inscrit ce principe dans la loi, notamment avec le premier des trois projets de loi sur la modernisation de l’action publique territoriale, qui traitait essentiellement des métropoles.

Vouloir organiser l’Île-de-France comme le Limousin ou la Champagne-Ardenne n’avait décidément plus de sens. L’organisation uniforme de la petite et de la grande couronnes parisiennes n’en avait pas davantage.

Nous sommes enfin sortis de cette logique. C’est assurément la voie à suivre, et je ne peux que me réjouir que le rapport ait intégré, pour une prochaine étape, ma proposition d’absorption des quatre départements de Paris et de la petite couronne par la métropole du Grand Paris.

Madame la ministre, j’ai été heureux de vous entendre nous annoncer que vous aviez mis des moyens à disposition pour évaluer cette solution, qui pourrait être l’acte II de cette révolution métropolitaine à Paris.

Notre rapporteur, cependant, a émis des réserves sur la diversification des modèles ; je le comprends, car on peut craindre que ce mouvement n’accentue les écarts entre les territoires.

C’est pourquoi cette évolution doit être accompagnée d’une solidarité, et pas seulement financière, solidarité dont l’État doit être le garant et qui, à mon sens, doit être pensée par le haut, c’est-à-dire par l’échelon régional.

Les vingt-deux régions actuelles sont trop petites, donc trop nombreuses. Je ne rappellerai pas les mauvaises raisons qui expliquent cette situation, chacun les connaît. Le fait est que cette carte, largement inadaptée aux défis du temps, doit être redessinée ; à cet égard, l’objectif, retenu par le rapport, d’une petite dizaine de régions me semble tout à fait pertinent.

Une fois les nouvelles régions définies, c’est à l’intérieur de chacune d’elles que la répartition des rôles et des moyens devra être opérée, en fonction de la nature du territoire.

La question du rôle des départements se présente immédiatement à l’esprit, mais encore faut-il la poser de la bonne manière. Prôner leur suppression pure et simple ou défendre leur maintien systématique, ce ne sont pas, me semble-t-il, de bonnes façons d’aborder le sujet – un sujet sensible, surtout au Sénat.

L’approche alsacienne, même si elle a connu un sort funeste, ce que je regrette, démontre à l’évidence que la collectivité territoriale unique peut également être une réponse. En revanche, dans les territoires peu denses en population, l’échelon départemental peut rester tout à fait pertinent.

Sur ce problème délicat, notre rapporteur ne s’est pas aventuré très loin, et je le comprends. Il faudra bien pourtant trancher ce débat si longtemps repoussé ; à cet égard, je déplore que l’on ait fait marche arrière en supprimant le conseiller territorial, dont je persiste à penser qu’il correspondait à une bonne approche.

Pour redéfinir le rôle des régions et des départements, il faudra se reposer la question du financement des politiques sociales : revenu de solidarité active, allocation personnalisée d’autonomie, prestation de compensation du handicap. De fait, cette question est au cœur du sujet.

Je pense depuis longtemps que nous avons probablement commis une erreur en écrivant l’acte II de la décentralisation. Avoir transféré aux départements le soin de financer ces allocations dont le montant est fixé par l’État ne pouvait que nous conduire là où nous sommes aujourd’hui, cherchant à inventer, année après année, de nouveaux mécanismes de péréquation, qui ne sont, au bout du compte, que cataplasmes sur une jambe de bois !

Que certains départements soient conduits à s’endetter, à augmenter la pression fiscale, ou les deux, et à réduire leurs investissements pour financer ce qui relève de la solidarité nationale, cela n’est pas conforme au principe de l’égalité républicaine et contribue à creuser la fracture territoriale.

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