Sous l’ère Sarkozy, les crédits de la politique de la ville ont ainsi diminué de moitié, traduisant clairement la rupture du pacte républicain fondé sur les notions d’égalité et de solidarité.
Nous prenons donc comme un progrès, dix ans après la marche pour l’égalité, la volonté de ce gouvernement d’engager une véritable concertation – je vous en remercie, monsieur le ministre – et de reposer les bases de la politique de la ville, respectueuse des hommes et des femmes qui y vivent. Il s’agit d’un enjeu essentiel pour la cohésion sociale et territoriale de notre pays.
En effet, nous ne pouvons accepter que, sur le territoire de la République, se créent des poches regroupant l’ensemble des handicaps – pauvreté, chômage, enclavement –, condamnant ainsi l’avenir de leurs habitants, soit pourtant plus de 6 millions de nos concitoyens.
Si donc nous prenons acte de cette volonté, nous restons cependant inquiets sur ses traductions concrètes dans le climat de rétraction globale de l’action publique. En effet, la politique de la ville ne peut prétendre à l’efficacité dans le cadre d’une politique « austéritaire » de droit commun, notamment en ce qui concerne les dotations aux collectivités, qui baisseront de 4, 5 milliards d'euros sur trois ans.
En effet, alors que le projet de loi prévoit la mobilisation prioritaire des moyens de droit commun et leur meilleure articulation avec les dispositifs spécifiques, ce qui est une bonne chose, force est de reconnaître que ceux-ci sont en constante régression, notamment dans le cadre des politiques régaliennes de l’État. Ce sont les quartiers dits « sensibles » qui subissent encore le plus lourdement la rétraction de l’action publique, alors même que les inégalités territoriales et sociales s’accroissent.
Au fond, la politique de la ville ne peut trouver de traduction efficace et concrète si la priorité du Gouvernement n’est pas celle de l’emploi et du pouvoir d’achat, de l’intervention publique pour irriguer les territoires et permettre leur maillage par les services publics.
La politique de la ville est donc tributaire du cap gouvernemental, celui de l’austérité. Par conséquent, nous sommes inquiets.
Face à la pénurie des moyens, on se contente ainsi de concentrer les efforts et les moyens de l’État. On passerait ainsi de passer de 2 500 quartiers bénéficiant d’un CUCS à 1 300 quartiers prioritaires.
Seraient ainsi considérés comme prioritaires les quartiers où la moitié de la population perçoit moins de 60 % du revenu fiscal annuel médian, soit moins de 11 000 euros.
Si la pertinence d’un critère unique et d’un zonage unique semble faire consensus, la question résiduelle, mais ô combien sensible, est bien celle de la sortie du dispositif d’un certain nombre de quartiers et de communes. La définition de « territoire de veille » semble à ce titre particulièrement hypocrite, puisqu’en réalité, selon le dispositif même de ce projet de loi, ces territoires ne seront nullement accompagnés.