Intervention de Philippe Dallier

Réunion du 14 janvier 2014 à 14h30
Ville et cohésion urbaine — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Philippe DallierPhilippe Dallier :

À ce titre, je dois vous dire que je suis heureux de votre choix du seul critère du revenu. C’est un gage de simplicité, comme Claude Dilain l’a souligné, et c’est aussi, me semble-t-il, l’élément caractérisant le mieux les difficultés d’un territoire donné.

D’ailleurs, vous avez pris une double précaution, puisque vous allez considérer le revenu par rapport au territoire national dans son entier, mais aussi le revenu rapporté à l’aire urbaine. Cette double prise en compte, que je n’ai jamais pu obtenir dans les critères du FPIC, est très importante ! C’est un point essentiel que de pouvoir comparer les revenus des habitants à ceux de l’aire urbaine. A-t-on, à revenu équivalent, les mêmes difficultés dans la région d’Île-de-France que dans une autre région ? Compte tenu de la densité démographique de l’Île-de-France et du coût du logement que l’on y constate, par exemple, je n’en suis pas certain…

Le revenu me semble donc, par sa simplicité et sa lisibilité, somme toute, un bon critère.

Au sujet de l’association des habitants des quartiers à la coconstruction, je voudrais tout d’abord exprimer mon étonnement face à certains discours, un peu durs. Il y a certainement quelques mauvais maires, mais tous les autres, qui font correctement leur travail, ont-ils pour habitude de rester enfermés dans leur bureau, de ne pas consulter les associations, de ne pas organiser de réunions de quartier ? Ceux qui, parmi eux, se sont lancés dans des projets ANRU, l’ont-ils fait comme cela, sans prendre la peine de dialoguer avec les habitants ? Honnêtement, je ne le crois pas !

Qu’il faille aller plus loin et fixer un certain nombre de règles, pourquoi pas ! Mais toute la difficulté résidera justement dans l’élaboration de règles précises. Dès lors que l’on décide de constituer des « coordinations citoyennes de quartier » – je suis d’ailleurs heureux que vous envisagiez de changer le terme, monsieur le ministre, car l’expression n’était pas tout à fait adaptée, et je vous proposerai, à l’occasion d’un amendement, l’appellation « conseils de développement de quartier » –, comment désigne-t-on les membres de ces instances ? C’est une vraie question ! Qui est légitime pour y siéger ? Qui ne l’est pas ? Quels critères seront retenus ? Je m’interroge !

Il faudra bien laisser de la souplesse à ces dispositifs, sans quoi vous allez enfermer les maires dans des règles impossibles à tenir, et ce d’autant plus que les contrats de ville seront signés – là aussi, c’est une bonne idée – pour une période de six ans, correspondant au mandat municipal. Engager la concertation avec les habitants au début du processus et la maintenir tout au long de celui-ci m’apparaît comme une bonne manière de procéder et, je le redis, comme une démarche tout à fait naturelle. D’où cette nécessité de ne pas nous enfermer dans des règles trop strictes.

Le choix de l’échelle intercommunale apparaît également une bonne idée, à la condition que l’on prenne bien en considération que les maires sont et resteront à la manœuvre. Quelqu’un a comparé la politique de la ville à un travail de dentellière : l’image me semble tout à fait juste. Dès lors, il ne faut surtout pas trop éloigner la décision du terrain !

À ce titre, monsieur le ministre, vous allez avoir un autre sujet à traiter, sujet sur lequel je vous proposerai également un amendement : que va-t-on faire dans l’espace du Grand Paris ? La métropole de 7 millions d’habitants aura-t-elle la main sur la politique de la ville ? Pour les financements, je l’espère… Mais qu’en sera-t-il pour les décisions concrètes, celles qui concernent le terrain ?

Je ne pense pas que le conseil de territoire, avec ses 300 000 ou 400 000 habitants, sera la bonne échelle. Dans le cas particulier du Grand Paris, les communes devront garder la main, même s’il faudra leur donner la possibilité de s’associer à trois ou quatre, si elles le souhaitent, sur le périmètre du conseil de territoire ou sur un périmètre plus restreint. Quoi qu’il en soit, ce territoire-là est d’une nature tout à fait particulière et nous ne pourrons pas lui appliquer les mêmes règles qu’aux autres.

J’en viens aux PNRU et, tout d’abord, au « PNRU 1 ». J’ai bien entendu les inquiétudes du rapporteur pour avis de la commission des finances quant à la trésorerie de l’ANRU et je tiens également à tirer la sonnette d’alarme. Quand je vois les difficultés à obtenir les subventions, y compris sur un petit projet ANRU, et les lourdeurs administratives que j’ai pu constater sur le terrain, ailleurs que dans ma propre commune, je me dis que, si vraiment la trésorerie tombe à 140 millions d’euros, les fins de programme risquent d’être difficiles !

On nous annonce maintenant un « PNRU 2 ». Je ne peux que m’en réjouir ! Les moyens alloués sont cependant plus limités – 5 milliards d’euros –, mais on nous parle d’un effet de levier multipliant cette somme par quatre, soit 20 milliards d’euros. Nous regarderons les chiffres au bout du compte, monsieur le ministre, mais il me semble que, pour le « PNRU 1 », nous serons plutôt sur un effet de levier multipliant les sommes par trois.

Sur cette question, je partage donc les interrogations de Jean Germain. On entend à nouveau mettre à contribution Action logement, qui est déjà très sollicitée. Nous verrons bien, à l’occasion de la deuxième lecture, ici, au Sénat, du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, ce qu’il en sera de la GUL. Cela étant dit, on ne pourra pas mettre Action logement à toutes les sauces…

Nous avons vécu dans l’incertitude avec le « PNRU 1 », puisque l’on est passé de crédits budgétaires à des crédits exclusivement extrabudgétaires, mais, comme je l’ai toujours affirmé, ce qui compte in fine, c’est ce qu’il y a dans les caisses de l’ANRU. Pour autant, si le Gouvernement annonce un « PNRU 2 », il serait peut-être bon qu’il nous rassure sur la manière dont il va le financer.

Par ailleurs, je me suis toujours félicité de ce qu’était l’ANRU. Avec son effectif de 80 collaborateurs, ou à peine plus, c’est une structure légère qui porte des projets extrêmement lourds. Hormis quelques problèmes au lancement de la structure, que ce soit au niveau informatique ou dans la définition des règles, une fois que la mécanique a été lancée, elle a fonctionné et fonctionne encore plutôt bien. Je pense donc qu’il ne faut pas vouloir confier à l’ANRU des missions trop différentes.

Je suis en particulier sceptique sur l’idée de l’amener à cofinancer des investissements dans les quartiers. La Caisse des dépôts et consignations et, dans le domaine commercial, l’EPARECA font cela très bien ! Le projet de loi est rassurant, dans la mesure où il prévoit que le risque financier lié à ces opérations est garanti par l’État. Néanmoins, est-ce vraiment nécessaire de donner une telle mission à l’ANRU ?

On nous a en outre expliqué, au sujet des interventions à l’étranger, qu’il s’agissait avant tout de régulariser des pratiques existantes. Très bien ! C’est toujours une bonne chose de vouloir exporter notre savoir-faire et, ainsi, valoriser la France au travers de ce qu’elle fait de mieux, mais, de nouveau, on ne pourra pas demander tout et n’importe quoi à une structure de 80 personnes ! Je suis donc aussi sceptique sur ce volet.

S’il est simplement question de régler un problème administratif avec la Tunisie…

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