Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je n’ai jamais manifesté aucun mépris envers le Sénat, contrairement à ce que j'ai pu entendre dire tout à l'heure. C'est un reproche que je n’accepte pas : le temps que j’ai passé ici à travailler avec vous sur des textes tels que les projets de loi relatifs à la lutte contre le terrorisme ou au séjour des étrangers, mon attitude sont la démonstration qu’il est infondé.
Je n’ai jamais non plus cherché à entretenir une confusion entre cumul des mandats et cumul des indemnités. J’en connais le fond démagogique. À cet égard, les propositions qui ont été faites vont dans le bon sens.
Il s’agit en effet de tenir un engagement du Président de la République, pris après un long débat au sein de notre formation politique. Je rappelle d'ailleurs que Nicolas Sarkozy s'était lui-même un temps interrogé sur ce sujet, peut-être par souci de l’opinion.
Je m'étonne des critiques portant sur le rôle des organisations politiques, surtout quand elles émanent de membres de l'un des plus vieux partis de ce pays…
Alain Richard a posé une vraie question : à quoi tient le discrédit actuel de la vie politique ? Les raisons de ce discrédit sont certainement multiples, mais, sur le fond, au-delà du sentiment de l’opinion, la question de l’interdiction du cumul des mandats est posée depuis longtemps, et il fallait y apporter une réponse. Le Parlement en débat depuis maintenant six mois. De ce point de vue, le Sénat, comme l’Assemblée nationale, n’a pas été maltraité.
Les réflexions menées sur le rôle des élus et du Parlement dans un monde qui a beaucoup changé avec la globalisation économique, l’accroissement du rôle de l'Union européenne, la décentralisation, sont passionnantes.
L'on peut être ou non d'accord avec les mesures que nous avons fait voter, mais j’ai la conviction que le changement du mode de scrutin départemental, avec notamment l'obligation de la parité et des modifications importantes en termes d'équilibre démographique dues aux règles fixées par le Conseil constitutionnel, la désignation au suffrage direct des responsables des intercommunalités, le non-cumul des mandats changeront les pratiques en profondeur. À cela s’ajoutent encore les engagements que vient de prendre le Président de la République concernant l'avenir de la décentralisation.
Alain Richard a raison, dresser un bilan s'imposera dans quelques années, mais les parcours politiques, locaux ou nationaux, et donc le rôle des collectivités territoriales et du Parlement, vont évoluer. Ce changement, il ne faut pas en avoir peur. D'autres pays l’avaient entrepris avant nous, et c'est maintenant au tour de nos assemblées : elles seront beaucoup plus paritaires, et il n’y aura plus de cumul.
La démocratie s'en portera-t-elle plus mal ? Je ne le crois pas. Les pays du nord de l'Europe se sont engagés avant nous dans cette voie. Bien sûr, je sais les particularismes de la France, son histoire, ses pratiques politiques, son césarisme, mais ne condamnons pas ce que nous sommes en train de faire avant de l’avoir mis en pratique, même si, encore une fois, le renouvellement de la vie politique et la réponse à la crise de confiance envers la classe politique qu’évoquait à l'instant Yannick Vaugrenard, faisant référence à l’étude du CEVIPOF, ne relèvent pas uniquement de l’interdiction du cumul des mandats.
Ma conviction profonde est que l’on ne reviendra pas sur le choix du non-cumul des mandats. Cela ne signifie pas que des interrogations ne subsistent pas sur le rôle de l’Assemblée nationale et du Sénat, sur leurs pratiques, sur leur ordre du jour, sur la session unique…
M. Philippe Bas a estimé que l’Assemblée nationale ne peut avoir le dernier mot, car ce texte est relatif au Sénat. C'est un débat que nous avons déjà eu. Le Gouvernement a choisi d'appliquer, dans le respect de la Constitution, un même régime d'incompatibilité aux députés et aux sénateurs. Le Conseil constitutionnel tranchera, car il y aura bien une saisine…