Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, lors de la présentation, en mars 2009, du rapport de la commission pour la réforme des collectivités locales, Édouard Balladur parlait de ses propositions comme d’un « big-bang territorial ». À la lecture du texte qu’il nous est proposé d’adopter aujourd’hui, je dirai que, loin du « big-bang » annoncé, on prépare un chaos territorial !
Les collectivités territoriales sont devenues un enjeu pour des luttes de pouvoir, un objet de clivage, alors qu’elles sont, au contraire, le bien de tous nos concitoyens, le lieu où s’exprime la démocratie de proximité, cette démocratie en acte que font vivre au quotidien des milliers d’élus locaux bénévoles.
Le chaos qu’engendrera ce projet de loi, s’il est adopté – car le suspense demeure –, c’est d’abord celui du conseiller territorial, cet élu schizophrène hors-sol, censé mettre un terme à la gabegie des élus locaux.
Vous avez voulu lui faire conjuguer la proximité du département et la vision stratégique de la région ; à l’arrivée, vous n’aurez ni l’une ni l’autre et vous renforcerez l’effet « cumul de mandats », quand c’est tout le contraire qu’il faut désormais enclencher.
Messieurs les ministres, nous n’avons cessé de vous rappeler tout au long des débats que ce nouvel élu, dont nul n’avait sollicité la création, n’était qu’un prétexte pour formaliser la recentralisation à laquelle procède ce texte, au mépris de toutes les grandes réformes engagées depuis 1982. Le conseiller territorial ne suscitera que confusion et illisibilité.
S’agissant de son mode d’élection, le relèvement de 10 % à 12, 5 % du seuil des inscrits pour se maintenir au second tour va, à l’évidence, à l’encontre de toutes les traditions républicaines en matière d’élections locales. C’est donc un vrai recul du pluralisme des opinions démocratiques, une atteinte aux minorités et à la diversité politiques, cette diversité que nous incarnons tous au sein du RDSE. Le choix est ainsi fait, et assumé, d’accentuer la bipolarisation politique et son caractère artificiel.
L’autre régression majeure de ce texte est la disparition annoncée pour 2015 de la clause générale de compétence des départements et des régions. La confusion entourant cette suppression démontre que, contrairement à ce qui a été affirmé, bien peu d’élus sont prêts à entériner ce recul de la démocratie locale. Pourquoi tant de méfiance à l’égard des élus locaux ?