Cela est positif : les sénateurs sont là pour légiférer, et je crois qu’il vaut mieux, lorsqu’on le peut, légiférer que de donner habilitation au gouvernement pour le faire.
Sur d’autres points, le rapporteur et la commission ont précisé le champ d’application, afin de déterminer la solution que le Gouvernement devra retenir, en matière d’administration légale ou de pouvoirs du juge du divorce, par exemple.
Mais surtout, je me félicite du choix qui a été proposé par le rapporteur, suivi par la commission unanime, de supprimer l’article 3 du projet de loi. C’est sûrement le point le plus important, car cet article autorise le Gouvernement à procéder par ordonnances à la réforme du livre III du code civil, intitulé « Des différentes manières dont on acquiert la propriété », et, plus particulièrement, en son sein, des dispositions relatives au droit des contrats et des obligations.
Ainsi, la réforme traiterait de la formation du contrat, à travers les modalités de sa conclusion, de sa validité, de son contenu, de sa forme et des sanctions – nullité et caducité – qui peuvent le frapper. Il devrait également rappeler les règles relatives à l’interprétation du contrat, ainsi que celles relatives à ses effets, entre les parties et à l’égard des tiers, sa durée et les remèdes à son inexécution.
Cette habilitation couvrirait aussi les quasi-contrats – gestion d’affaire, paiement de l’indu, enrichissement sans cause – ainsi que la modernisation du régime général des obligations.
Comme cela est rappelé dans le rapport écrit de M. Mohamed Soilihi, le code civil est l’un des textes fondateurs du droit français, qui organise la vie de nos concitoyens, ce que le doyen Jean Carbonnier a souligné dans une formule célèbre, évoquant ce code comme la « Constitution civile de la France ».
Si le droit de la famille organise les rapports de filiation, de communauté et d’autorité entre les membres d’une même famille, le droit des obligations organise ceux que nouent entre eux les individus et les acteurs économiques, par la voie des contrats qu’ils concluent entre eux ou, à travers le droit de la responsabilité, des dommages qu’ils se causent. Le droit des affaires comme celui de la consommation, voire celui du travail y puisent leur source.
Le groupe socialiste est convaincu que l’importance de l’enjeu exige que le Parlement s’en saisisse !
Pour conforter cette position, je citerai Portalis, qui concluait son discours préliminaire de présentation de l’avant-projet de code civil par ces mots : « Le plan que nous avons tracé de ces institutions remplira-t-il le but que nous nous sommes proposé ? Nous demandons quelque indulgence pour nos travaux, en faveur du zèle qui les a soutenus et encouragés. Nous resterons au-dessous, sans doute, des espérances honorables que l’on avait conçues de notre mission : mais ce qui nous console, c’est que nos erreurs ne sont point irréparables ; une discussion solennelle, une discussion éclairée les réparera. »
L’illustre professeur Pierre Catala a fait sien les propos de Portalis en présentant le projet de réforme du droit des obligations, sur lequel il a travaillé à la demande du gouvernement, travaux qui ont été complétés par les travaux du professeur François Terré.
À ce stade du débat, la position du groupe socialiste doit être clairement énoncée. Cette partie de l’article 3 ne couvre pas moins de 300 articles et de 300 pages du code civil, que voici.