Intervention de Marie-Agnès Labarre

Réunion du 9 novembre 2010 à 14h45
Réforme des collectivités territoriales — Vote sur l'ensemble

Photo de Marie-Agnès LabarreMarie-Agnès Labarre :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’occasion de mon explication de vote, je souhaite revenir sur la question des métropoles. Vous connaissez notre désaccord sur leur création. Ces mastodontes administratifs, très éloignés des citoyens, vont absorber l’ensemble des compétences qui étaient auparavant dévolues aux communes et les conseils municipaux ne seront plus que des conseils d’arrondissement aux pouvoirs non encore réellement définis.

Notre assemblée avait au moins sauvegardé une partie des apparences en prévoyant que, conformément à l’article L. 123-18 du code de l’urbanisme, le projet de plan local d’urbanisme, ou PLU, métropolitain serait soumis pour avis aux conseils municipaux concernés. Selon notre sage Haute Assemblée, le conseil municipal restait le seul compétent pour décider et voter sur les dispositions du PLU concernant spécifiquement la commune dont il est le représentant légal.

Mais une telle audace, qui ne faisait pourtant que réaffirmer un principe essentiel de notre droit, était finalement trop grande… L’Assemblée nationale en a décidé autrement, et la CMP a fait de même.

Ainsi, le texte mis au vote aujourd’hui retire tout pouvoir aux communes sur l’avenir urbain de la cité.

Après avoir ôté leurs compétences en matière de développement et d’aménagement économique, social et culturel, en matière d’aménagement de l’espace urbain, de politique locale de l’habitat, de politique de la ville, de gestion des services d’intérêt collectif et de protection de l’environnement, le texte nous propose de retirer aux communes membres d’une métropole toute vision prospective et toute action réglementaire sur l’organisation spatiale de leur territoire. C’est bien la démonstration qu’elles deviendront des structures sans objet.

En privant les communes membres d’une métropole de la maîtrise de l’espace urbain, on leur retire tout moyen d’intervention réelle. En effet, comment prévoir en zone urbaine dense les espaces nécessaires à la réalisation d’écoles, de stades, de gymnases, de crèches, de maisons de retraite, de logements sociaux, bref, les espaces nécessaires aux équipements publics si les élus municipaux ne peuvent plus, par exemple, prétendre à la mise en place de réserves foncières et lancer des procédures de zone d’aménagement concerté ?

Ainsi, les enjeux démocratiques ne se situeront plus au niveau de la commune.

Il est alors à craindre que, dans les communes métropolitaines concernées, les élections municipales ne soient vidées de toute substance, de tout enjeu, puisque les décisions se prendront ailleurs.

À ce propos, rappelons que si le nombre des métropoles est très faible pour le moment, ces territoires regroupent tout de même un nombre très important de nos villes de 10 000 à 50 000 habitants. Or celles-ci ne sont pas si nombreuses que cela en France !

Avec les métropoles et avec la disparition programmée des communes qui les composeront, les intérêts métropolitains se mesureront non plus à l’aune des besoins des populations qui y vivent, mais à celle de la superstructure bureaucratique, dans le concert de la mise en concurrence des territoires. Les populations n’y trouveront pas leur compte. En éloignant les lieux de décisions des citoyens, vous vous donnez les moyens de vous éloigner de leur pression ; vous réduisez ainsi le pouvoir d’intervention des citoyens ! En les éloignant, il vous sera plus facile de vous dispenser de répondre à leurs besoins. En allant au bout de vos excès, de vos fantasmes antidémocratiques, vous découragez les élus qui s’étaient rangés à la nécessité d’une intercommunalité intelligente, pratiquée à la bonne échelle.

Philippe Séguin n’avait pas tort lorsqu’il déclarait que la proximité coûte cher. Car un élu proche des citoyens, y compris d’un point de vue géographique, c’est un élu avant tout désireux de répondre aux besoins qu’il peut lui-même mesurer dans sa vie quotidienne !

Une telle métropolisation de nos grands territoires urbains apparaît bien comme un outil de votre politique de réduction de la dépense publique et de restrictions des services publics de proximité. Mais n’est-ce pas là, finalement, un des objectifs centraux de cette réforme ?

Pour toutes ces raisons, bien entendu, nous ne voterons évidemment pas le texte issu des conclusions de la commission mixte paritaire.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion