Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je suis une élue séquano-dyonisienne. Or la Seine-Saint-Denis est l’un des départements les plus pauvres de France, alors que le taux de natalité y est l’un des plus élevés de notre pays. C’est dire si les besoins en matière de santé sont grands, notamment pour ce qui est des tarifs opposables avec application du tiers payant.
Oui, nous sommes de celles et de ceux qui veulent des actes et il y a des défis à relever en matière de santé !
Aujourd'hui comme hier, la Seine-Saint-Denis n’est pas épargnée par les politiques comptables et financières mises en œuvre par les agences régionales de santé. Certains établissements publics sont durement frappés – je pense particulièrement à l’hôpital Avicenne –, mais des établissements privés le sont tout autant, par exemple l’hôpital européen de La Roseraie, sur lequel je vais revenir dans un instant.
Je voudrais d’abord avoir une pensée pour la maternité des Lilas, déjà évoquée, dont le collectif de défense se mobilisera le 24 janvier prochain afin d’en empêcher la fermeture. Vous le savez, madame la ministre, vous connaissez le dossier, le déficit de cet établissement n’est pas structurel, il est la conséquence – comme l’a justement rappelé mon collègue Dominique Watrin – des consignes données et exécutées par l’ARS.
Mais je pense aussi à l’hôpital européen de La Roseraie, à Aubervilliers, qui vient tout juste de déposer le bilan. Madame la ministre, cette annonce a suscité une véritable émotion parmi le personnel et les patients, bien évidemment, mais, plus largement, parmi la population albertivillarienne et, au-delà, dans la population séquano-dyonisienne.
Au-delà de la dimension sociale, puisque l’établissement salarie quelque 600 personnes, se pose bien évidemment la question sanitaire, à laquelle, madame la ministre, vous devez répondre.
Si la situation est préoccupante en Seine Saint-Denis, elle l’est tout autant dans d’autres départements, comme celui des Hauts-de-Seine. Ma collègue Brigitte Gonthier-Maurin, qui ne peut pas être des nôtres aujourd’hui, m’a indiqué que la fusion des hôpitaux de Beaujon et de Bichat, déjà plus qu’avancée, pourrait, selon toute vraisemblance, entraîner la disparition de 400 à 600 lits.
Cela marquerait un net recul dans l’accès aux soins des populations, d’autant que le schéma qui semble se profiler aujourd’hui, pour parvenir à une telle fusion, passerait par la fermeture pure et simple de l’hôpital Beaujon.
On devine aisément le projet que mûrit la direction de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, à savoir – au nom de la fameuse réduction des dépenses – le regroupement au sein de seulement douze structures des trente-sept hôpitaux publics que compte actuellement l’AP-HP.
Nous considérons que cela revient, de fait, à organiser une réduction de l’offre publique de soins de proximité, avec les risques sanitaires que cela peut engendrer.
Madame la ministre, j’illustrerai mes propos par un exemple. Le 4 décembre dernier, un article du Parisien révélait que, à la suite des mesures prises à l’encontre des urgences de l’Hôtel-Dieu, les urgences de Tenon, Saint-Louis, Lariboisière, Bichat, La Pitié-Salpêtrière et Pompidou dépassaient toutes un taux d’occupation de plus de 120 %. Ce taux était de 150 % à Saint-Louis, de 170 % à la Pitié-Salpêtrière, de 185 % à Lariboisière et même de 210 % à Tenon !
Dans ces conditions, c’est bien la qualité des soins et la sécurité sanitaire qui sont remises en cause. C’est pourquoi, dans l’intérêt des populations et des agents publics de l’AP-HP, je voterai en faveur de cet article et de la proposition de loi.
J’ajouterai qu’un moratoire ne se décrète pas. Il ne se décrète pas plus aujourd’hui qu’il ne se décrétait hier. En ce sens, je suppose que, Mme la ministre étant une femme de convictions, son communiqué de 2011 était fondé sur des réalités de fermetures de services hospitaliers et n’avait pas pour objet de faire plaisir à la Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité.
Figurez-vous que nous avons, nous aussi, des convictions, que nous défendons d’ailleurs assez bien ! Or il y a encore aujourd’hui des fermetures de services de santé, voire d’établissements : c'est la raison pour laquelle nous avons déposé cette proposition de loi.
Certains orateurs ont parlé de l’adaptabilité, qui serait nécessaire. En disant cela, ils laissent penser, comme Mme la rapporteur l’a d’ailleurs fait remarquer, qu’il y aurait, à droite de l’hémicycle, des parlementaires modernes, et, de l’autre côté, des sénateurs moins modernes, voire ringards…
Comme sénatrice, comme sénatrice communiste et comme présidente du groupe communiste, républicain et citoyen, je refuse ce genre de propos. Il n’y a pas, d’un côté, les modernes et, de l’autre, les ringards, figés dans leurs dogmes. Revenez sur terre ! Nous sommes au XXIe siècle, Staline est mort depuis longtemps, avant même ma naissance !
Cette vieille rengaine est trop souvent reprise dans cet hémicycle. Cela étant, si elle me met parfois en colère, elle me fait rire, aussi, car elle prouve que ceux qui l’utilisent sont vraiment à court d’arguments.
Alors, non, nous ne sommes pas des ringards. Ce que nous refusons, avec d’autres, c’est la réduction de l’offre de soins, une question qui est – j’en suis désolée, madame la ministre ! – toujours d’actualité.
Si nous demandons un moratoire, c’est tout simplement pour que l’offre de soins de qualité soit effective sur tout le territoire.