Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaite revenir sur l’un des points clés de ce projet de loi, celui de la répartition des compétences entre les futures entités locales, que traite notamment l’article 35 du projet de loi.
Cet article, comme d’autres, a connu un parcours chaotique. Rappelons-nous le vote intervenu au Sénat : par 335 voix contre 5, c'est-à-dire à la quasi-unanimité, phénomène plutôt rare, notre assemblée avait décidé, sur proposition de MM. About et Maurey, du groupe de l’Union centriste, de renvoyer à une future loi la définition de la future répartition.
Il faut également rappeler que, dès le début de la deuxième lecture, le Sénat avait décidé de réaffirmer, sur proposition de notre groupe, le principe de la clause de compétence générale. Cet amendement fut rejeté en seconde délibération, un large accord étant intervenu pour repousser à plus tard la mise en place d’une nouvelle répartition des compétences.
Encore une fois, à l’occasion de cette CMP du 3 novembre, qui fera date tant la violence faite au Sénat est grande, le texte de l’Assemblée nationale a prévalu et la position quasi unanime du Sénat a été bafouée.
Plutôt que de faire le choix d’engager une réflexion, un débat, le Gouvernement et l’UMP ont opté pour la précipitation et le passage en force.
Souvenez-vous : M. Longuet lui-même avait pris la parole pour appeler à soutenir l’amendement de MM. About et Maurey. Il n’est pas acceptable qu’une CMP réunissant sept sénateurs et sept députés tranche contre l’avis presque unanime, je le répète, d’une assemblée qui est, de surcroît, censée représenter les collectivités locales, sur une question aussi lourde et importante que celle de la répartition des compétences.
Ce simple sujet nécessite, à nos yeux, un réexamen du projet de loi en troisième lecture par le Sénat et l’Assemblée nationale. Il s’agit non pas d’une question technique ou administrative, mais d’une question démocratique fondamentale : une collectivité locale pourra-t-elle répondre aux besoins de la population ? Un maire, un président de conseil général ou régional pourra-t-il exécuter son programme, respecter ses engagements ?
La mise en cause de la clause de compétence générale, pourtant reconnue comme principe constitutionnel, porte un coup d’arrêt à la décentralisation, à une décentralisation s’appuyant, au bénéfice des citoyens, sur les services publics et la solidarité.
L’apparent recul consenti par les deux rapporteurs avec le report de l’application de la nouvelle répartition à 2015 plutôt que 2012 est un leurre. Le véritable objectif est de museler le Sénat, d’imposer le principe de la fin de la clause de compétence générale sans qu’il y ait de véritable débat sur ce point.
La méthode utilisée par le Gouvernement lors de l’examen de ce texte par le Parlement est détestable : sur le projet de loi originel sont venues se greffer, au fur et à mesure de la navette, des dispositions devant faire l’objet de projets de loi séparés, comme le mode de scrutin pour le futur conseiller territorial ou la répartition des compétences. Cette précipitation précédait le passage en force auquel nous assistons, et que nous pressentions.
Nous proposons donc au Sénat de s’opposer à une telle méthode de discussion peu conforme aux principes d’un débat parlementaire démocratique, en refusant de voter les conclusions du rapport de la commission mixte paritaire.