Intervention de Christian Favier

Réunion du 22 janvier 2014 à 14h30
Exercice par les élus locaux de leur mandat — Discussion en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Christian FavierChristian Favier :

Notre groupe, comme l’ensemble de la gauche, s’est toujours fixé pour objectif de mettre en place un statut de l’élu, afin que chacun, sans condition d’origine ethnique, sociale ou professionnelle, puisse être représenté, voire se présenter pour faire partie des 550 000 élus locaux que compte notre pays et qui constituent le poumon de notre démocratie.

Ainsi, entre deux actes de la décentralisation, poursuivre le débat sur le statut de l’élu nous semble nécessaire. Je salue, à ce titre, la démarche entreprise par nos collègues, même si elle est de portée limitée.

Dans un premier temps, il faut souligner les avancées que permet ce texte : quelles que soient ses limites, il nous semble que nous faisons ici œuvre utile. Eu égard à la loi de décentralisation votée il y a quelques semaines et à celle qui reste à venir, nous sommes incités à aborder l’ensemble des problématiques pour définir un véritable statut de l’élu, codifiant les droits et les devoirs de celui-ci.

Nous saluons les mesures contenues dans ce texte tendant à harmoniser le niveau d’indemnisation des maires. De même, nous approuvons l’attribution d’une indemnité de fonction aux membres de l’organe délibérant des communautés de communes ayant reçu délégation du président. Nous apprécions, en outre, la clarification portant sur la nature fiscale de l’indemnisation des frais d’emploi.

Le deuxième axe de cette proposition de loi vise à faciliter l’exercice d’un mandat par des salariés du privé. Nous ne pouvons que soutenir toute amélioration dans ce domaine, car les difficultés rencontrées par ces citoyens freinent fortement leur engagement dans un mandat électif. Cependant, comme nous l’avions souligné en première lecture, il conviendrait, dans un souci d’efficacité et de lisibilité, que ces dispositions soient également inscrites dans le code du travail, seule référence juridique pour les relations entre un salarié et son entreprise.

La proposition de loi tend, en troisième lieu, à encourager la formation des élus locaux par l’instauration d’un plancher de dépenses obligatoires pour la formation des membres des assemblées délibérantes, d’un dispositif de report des sommes non dépensées d’une année sur le budget suivant de la collectivité, dans la limite du renouvellement général du conseil, et d’une obligation, pour la collectivité, d’organiser une formation au cours de la première année du mandat des conseillers municipaux, généraux, régionaux et des conseillers communautaires ayant reçu délégation.

Nous partageons ces principes et ces exigences, mais, afin de rendre effectif ce droit à la formation des élus, il nous paraît nécessaire, compte tenu du coût des stages de formation et des moyens financiers limités d’un grand nombre de nos communes, d’envisager une forme de mutualisation de ces dépenses. Cela permettrait à tout élu, quelles que soient la taille et la richesse de sa collectivité, d’avoir accès à une formation de qualité. La réflexion sur ce point mériterait d’être poussée.

Nous comprenons toutefois que nos collègues se soient limités à quelques dimensions de la question du statut de l’élu, qu’ils aient cherché à régler des difficultés d’application de mesures déjà prises et à élargir le champ de ces dernières.

Malgré quelques obstacles institutionnels, nous arrivons ainsi, par petits pas, à faire avancer les choses, sans attendre le Grand Soir du statut de l’élu ; je salue le pragmatisme de nos collègues.

Les députés ont aussi, de leur côté, apporté leur pierre à l’édifice, en permettant, par exemple, l’institution d’une charte de l’élu local pour « préciser les normes de comportement que les élus doivent adopter dans l’exercice de leurs fonctions ».

En effet, le statut de l’élu ne saurait être constitué que de droits. Ses devoirs doivent faire l’objet du second volet de notre réflexion, si nous ne voulons pas que le dispositif de ce texte soit perçu comme un ensemble d’avantages supplémentaires octroyés aux élus. Nous saluons, là aussi, la démarche constructive adoptée, même si nous aurions pu souhaiter que cette charte soit mieux équilibrée et fasse état non seulement des devoirs des élus, mais aussi de leurs droits.

S’agissant de la nouvelle définition du champ des poursuites du délit de prise illégale d’intérêt, je me range, madame la ministre, à l’avis de sagesse que vient d’exprimer notre collègue Jean-Pierre Michel : ne bousculons pas ce soir la position adoptée par la commission des lois du Sénat. Toute demande de vote bloqué serait, de ce point de vue, très mal perçue !

En conclusion, mes chers collègues, nous ne pouvons qu’exprimer notre accord avec les objectifs visés au travers de ce texte, en attendant la réforme globale qui instituera un véritable statut de l’élu, dont il est question depuis trente ans.

Cette réforme reste nécessaire, afin que chacun retrouve confiance en nos institutions et soit encouragé à participer plus largement à la vie citoyenne. La restauration de la confiance passera notamment par l’adoption d’un texte précisant clairement l’ensemble des droits et devoirs des élus, en toute transparence. Ce texte devra également revoir nos modes de scrutin, de manière que tous les citoyens soient équitablement représentés dans chacune des assemblées de notre République. Il devra s’attacher à revivifier le débat politique local, et concerner non pas seulement les membres des exécutifs, comme c’est souvent le cas actuellement, mais bien tous les élus, qui font la vraie richesse de notre démocratie.

Enfin, il faudra veiller à garantir aux élus qui gèrent nos collectivités les moyens financiers nécessaires pour mener à bien leurs missions et leurs actions.

Eu égard aux conditions d’examen des propositions de loi, qui interdisent d’envisager de mettre en place des réformes de grande ampleur par ce moyen, et au couperet de l’article 40, qui empêche les parlementaires d’aller au bout de leur démarche, seul un texte du Gouvernement permettra de remédier véritablement aux difficultés rencontrées par nos élus, rappelées très fortement lors des états généraux de la démocratie territoriale organisés au Sénat en octobre 2012.

Je vous engage donc, madame la ministre, à consacrer du temps parlementaire à la discussion d’un projet de loi complet portant sur les sujets que je viens d’évoquer. Dans cette attente, nous saluons les avancées contenues dans le texte qui nous est soumis : le groupe CRC le votera. §

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