Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la décentralisation instaurée par les grandes lois de 1982 a non seulement amélioré considérablement les services rendus aux citoyens, mais aussi stimulé l’investissement public, réalisé aujourd’hui à hauteur de 73 % par les collectivités territoriales.
Il était cependant nécessaire de franchir une nouvelle étape pour réduire les inégalités territoriales, améliorer l’efficacité des politiques publiques et renforcer de nouveau la démocratie. Au lieu de cela, la réforme sur laquelle nous sommes appelés à nous prononcer, accroissant le pouvoir des préfets et réduisant l’autonomie non seulement politique, mais également financière des collectivités territoriales, se traduira par une recentralisation.
Après deux lectures et à l’issue des travaux de la commission mixte paritaire, le présent projet de loi se caractérise par trois orientations principales : un affaiblissement des départements et des régions, une recentralisation marquée et une clarification des compétences inaboutie.
Engagé dès la réforme des finances locales dans le projet de loi de finances initial pour 2010, l’affaiblissement des départements et des régions est accentué par deux dispositions, qui sont d’ailleurs les principales innovations du texte, à savoir la création du conseiller territorial et celle des métropoles.
Je vais dire quelques mots du conseiller territorial.
Lors de l’examen, en première lecture, de l’article 1er visant à créer le conseiller territorial, j’avais souligné que faire siéger un même élu au sein de deux collectivités distinctes pouvait soulever un problème de constitutionnalité.
En outre, cette création touche à mon sens à un principe reconnu par la Constitution, à savoir l’interdiction de l’exercice de la tutelle d’une collectivité sur une autre. En effet, la mission des conseillers territoriaux pourrait leur permettre d’orienter la prise de décisions régionales en fonction d’intérêts départementaux – hypothèse possible, voire probable – ou la prise de décisions départementales dans un sens favorable à la région.
Ainsi la tutelle me paraît inhérente au dispositif qui découlera de cette réforme institutionnelle, si par malheur celle-ci était adoptée.
Avec la création du conseiller territorial et le mode de scrutin retenu, c’est également tout le patient travail législatif en faveur de la parité qui serait réduit à néant.
Pour ce qui concerne le nombre de conseillers territoriaux par département, l’injustice est flagrante. Je prendrai l’exemple du département que je représente au Sénat, l’Ardèche, qui compte largement plus de 300 000 habitants. Celui-ci ne disposera que de dix-neuf conseillers territoriaux, alors que des départements de 230 000 à 260 000 habitants seront représentés par vingt et un à vingt-sept élus.