Intervention de Alain Fauconnier

Réunion du 27 janvier 2014 à 16h00
Consommation — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Alain FauconnierAlain Fauconnier, rapporteur :

Ce constat vaut également pour les dispositions sur l’optique-lunetterie, que j’avais introduites en première lecture, contre l’avis du Gouvernement.

Les dispositions adoptées par le Sénat étaient issues du travail à quatre mains réalisé en 2011 par Gérard Cornu, que je tiens à saluer, et moi-même, à l’occasion des débats sur le projet de loi renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs, ou projet de loi Lefebvre.

Les députés ont adopté l’article 17 quater, désormais soutenu par le Gouvernement, ce dont je me réjouis : cet article devrait permettre le développement, dans un cadre sécurisé, de la vente en ligne des lunettes et des lentilles, ce qui aura une incidence très sensible sur le pouvoir d’achat de nos concitoyens, comme l’a souligné tout à l’heure M. le ministre.

Les députés ont cependant supprimé une disposition importante, à savoir le relèvement de trois à cinq ans de la durée pendant laquelle les opticiens-lunetiers peuvent adapter une prescription de verres correcteurs. Soucieuse de rétablir l’équilibre de l’article 17 quater, mais également fidèle à la vocation constitutionnelle du Sénat de représentation des territoires, la commission des affaires économiques a rétabli cette mesure : aucun élément sanitaire ne justifie la suppression de ce dispositif, qui apporte une vraie réponse aux problématiques des « déserts médicaux ». Je ne m’attarde pas plus longtemps sur cette question, car nous aurons l’occasion d’en débattre lors de l’examen des amendements.

J’en viens maintenant au chapitre III consacré aux secteurs de l’assurance et de la banque. Le texte, tel qu’il nous est transmis par les députés, appelle trois principales observations.

En matière de crédit, les députés ont maintenu l’équilibre général et les principaux « curseurs » du texte adopté par le Sénat. Je m’en félicite, car cela traduit le réalisme des arguments que nous avons défendus ; je tiens d’ailleurs à saluer dans ce domaine la contribution des rapporteurs pour avis de la commission des finances et de la commission des lois, Mmes Michèle André et Nicole Bonnefoy.

La commission des affaires économiques s’est principalement attachée, sur le volet crédit, à préciser les modalités d’entrée en vigueur des dispositions du texte, l’enjeu étant de trouver le bon équilibre entre les attentes des consommateurs, pour lesquels une entrée en vigueur rapide est souhaitable, et les contraintes logistiques des professionnels, qui ont besoin d’un délai raisonnable pour s’adapter à la nouvelle législation.

En matière d’assurance, notre tâche s’est résumée à parachever la rédaction et la coordination de mesures qui, pour l’essentiel, correspondent à une avancée majeure : la liberté de changer d’assureur, à tout moment, au bout d’une année, et non plus seulement au voisinage de la date anniversaire du contrat.

L’élément nouveau, introduit par les députés sur l’initiative du Gouvernement, se situe à l’intersection du crédit et de l’assurance, puisqu’il s’agit de l’assurance emprunteur, qui représente des sommes considérables, de l’ordre de 6 milliards d’euros, ainsi qu’une proportion importante du coût des crédits, dans une période marquée, il est vrai, par des taux d’intérêt atteignant un plancher historique. Sur la base du droit en vigueur, et en pratique, l’emprunteur ne peut plus changer d’assureur une fois le contrat signé. Alors que la liberté de choix de l’assureur est une des principales avancées du texte dans les domaines de l’assurance automobile et de l’assurance habitation, il pouvait paraître surprenant de ne pas étendre cette possibilité à l’assurance emprunteur.

Afin d’éclairer la décision, le Gouvernement a souhaité que l’Inspection générale des finances étudie l’impact d’une possibilité de substitution. Cette précaution s’est révélée opportune, puisque le rapport de l’inspection met en évidence les deux caractéristiques fondamentales du système français d’assurance emprunteur, que sont, d’une part, le niveau relativement élevé des commissions versées et, d’autre part, la logique de mutualisation qu’il incorpore. Ce second point signifie concrètement qu’au lieu de payer huit à dix fois plus à cinquante-six ans qu’à vingt-six ans, comme le voudrait la pure application des lois de la probabilité et du marché, l’écart est plutôt de un à deux ou trois fois plus.

La commission des affaires économiques s’est efforcée de trouver un équilibre satisfaisant, permettant à l’emprunteur de faire jouer la concurrence pour faire diminuer les primes, tout en préservant une mutualisation à laquelle nos concitoyens sont très attachés, comme en témoignent les sondages réalisés sur ce point.

Pour l’essentiel, la commission approuve le choix d’un délai de substitution ouvert pendant douze mois à compter de la signature du prêt, en écartant les solutions extrêmes que constituent le quasi-statu quo et un droit de substitution automatique tout au long de la vie du prêt.

En ce qui concerne les modalités du dispositif, la commission a adopté plusieurs amendements en se préoccupant, particulièrement, d’éliminer toute possibilité de faire supporter à l’emprunteur des frais dissuasifs en cas de changement d’assurance emprunteur : comme vous le savez, le diable se cache dans les détails, et notamment dans les frais annexes !

J’en viens enfin au chapitre IV. Je dirai quelques mots sur le cheminement législatif de l’article 23, qui tend à créer un dispositif de protection des indications géographiques pour les produits non alimentaires et vise à renforcer les moyens accordés aux collectivités territoriales pour protéger leur nom dans les procédures de dépôt de marques auprès de l’Institut national de la propriété industrielle, l’INPI. Vous savez que c’est un dispositif qui me tient particulièrement à cœur.

Approuvant l’essentiel des dispositions adoptées par le Sénat, les députés ont introduit trois modifications qu’il nous a semblé opportun de conserver.

La première vise à préciser que la procédure de consultation de l’INAO, l’Institut national de l’origine et de la qualité, sera déclenchée non pas systématiquement, mais seulement s’il existe un risque de chevauchement entre les indications géographiques industrielles et les indications géographiques protégées, les IGP, ou les appellations d’origine protégées, les AOP, agricoles existantes ou en cours d’instruction par l’INAO. Il est en effet souhaitable de prévoir de larges vérifications, mais inutile de multiplier les consultations qui ne seraient pas nécessaires.

Le deuxième correctif apporté par l’Assemblée nationale vise à préciser le rôle de l’INPI au moment de l’instruction de la demande d’homologation : l’institut vérifie que la production ou la transformation du produit ainsi que le périmètre de la zone géographique ou du lieu déterminé permettent de garantir que le produit possède une qualité ou une réputation liée à cette zone ou à ce lieu.

La troisième modification introduite par les députés vise à compléter la définition de l’indication géographique, en ajoutant le critère de « savoir-faire traditionnel ».

Sur mon initiative, l’article 23 du texte adopté par la commission a été perfectionné sur trois points.

Tout d’abord, nous avons prévu que la consultation de l’INAO par l’INPI doit être lancée lorsque la dénomination de l’indication géographique artisanale ou industrielle peut créer un risque de confusion avec la dénomination d’une AOP ou d’une IGP agricole. Cette formulation, plus protectrice et plus précise que celle du texte adopté par les députés, a pour objet de couvrir les cas où la dénomination de l’indication géographique correspond partiellement à la dénomination de l’AOP ou de l’IGP.

Ensuite, la commission a ramené de trois à deux mois la durée des consultations effectuées par l’INPI pendant la phase d’instruction. Ce délai nous paraît suffisant pour émettre un avis sur un cahier des charges et il tient compte du besoin d’accélérer la procédure dans l’intérêt des professionnels en attente d’une protection efficace au moyen des indications géographiques.

Enfin, la commission a pris en compte l’évolution de la réglementation européenne, en prévoyant de mettre à jour la liste des indications géographiques au sein du code de la propriété intellectuelle.

J’ai, bien entendu, poursuivi ma réflexion sur ce sujet essentiel pour nos territoires, et je soumets au Sénat quelques ultimes perfectionnements du texte, en particulier pour préciser la portée de la protection et prévoir que les indications géographiques protégées ne peuvent pas devenir génériques.

Par ailleurs, la commission a émis un avis favorable sur un amendement présenté par notre collègue Stéphane Mazars, amendement ayant pour objet de consolider le lien entre le territoire et le produit non agricole, en distinguant la dimension globale du produit et ses composants.

Pour finir, madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au vu des nombreuses avancées structurelles ou sectorielles que comporte ce texte, tant pour les consommateurs que pour notre économie, compte tenu également des progrès que cette deuxième lecture permettra encore d’apporter, c’est avec fierté et enthousiasme que je vous invite à adopter ce projet de loi. §

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