Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ne pouvons que souhaiter l’augmentation du pouvoir d’achat de nos concitoyens et la réduction de leurs dépenses contraintes. Aussi, monsieur le ministre, partageons-nous votre volonté d'y parvenir.
Comme vous, nous souhaitons renforcer l’information du consommateur, assurer la sécurité et la qualité des produits, encadrer les relations commerciales et donner les moyens à la police économique d’exercer ses missions, comme nous l’avons montré au travers de nos amendements.
Cependant, nous constatons que la volonté qui est la vôtre, et qui s’exprime par ce projet de loi, se heurte à deux principales difficultés.
D’une part, le chômage, la précarité et la pauvreté continuent de progresser dans notre pays. Alors que les patrons demandent aux salariés de baisser leurs salaires pour ne pas licencier, que le traitement des fonctionnaires est gelé depuis plusieurs années, que le régime des retraites va entraîner une diminution des pensions et que les jeunes peinent à financer leurs études, à se loger et à trouver un travail, un nouveau cadeau est fait aux entreprises avec le pacte de responsabilité. Là encore, le MEDEF dit qu’il ne peut pas prendre d’engagements. Autrement dit, il refuse le principe même des contreparties et du contrat de responsabilité…
D’autre part, une seconde difficulté réside dans l’insuffisance des mesures du projet de loi pour réduire les principales dépenses contraintes, qu’il s’agisse du logement, de l’énergie ou des biens courants de consommation. Ainsi, l’augmentation des prix de l’immobilier rend l’accès à la propriété de plus en plus difficile pour les personnes disposant de revenus moyens. Le taux d’endettement des ménages atteint des niveaux record et les prix du marché excluent une grande partie des acquéreurs potentiels.
Les loyers, beaucoup trop élevés, ne permettent pas de garantir un toit à tous. Les dépenses énergétiques sont également en augmentation et pèsent de plus en plus lourd dans le budget des ménages. La commission de régulation de l’énergie a annoncé une hausse de 30 % d’ici à 2017. La CSPE, la contribution au service public de l’énergie, va augmenter de 22 % entre 2013 et 2014. Enfin, la TVA est passée à 20 % depuis le début de l’année, ce qui représente une diminution supplémentaire du pouvoir d’achat.
Dans ce contexte, même si nous portons un regard globalement positif sur ce projet de loi, nous craignons qu’il ne réponde pas aux objectifs annoncés.
S’agissant des dispositions du texte qui nous paraissent aller dans le bon sens, je voudrais revenir en premier lieu sur l’action de groupe, qui constitue un point très positif.
En première lecture, nous avions proposé d’élargir cette procédure aux litiges environnementaux, financiers ou touchant la santé. Cependant, nous n’avons pas déposé de tels amendements en seconde lecture. Non que nous y ayons renoncé, mais parce que nous avons pris acte de votre engagement, monsieur le ministre, d'aller dans ce sens. Les évolutions qui viendront de la pratique juridictionnelle et de la jurisprudence seront sans aucun doute utiles à notre réflexion sur l’élargissement de cette procédure.
Ensuite, nous approuvons les articles relatifs à la durabilité et la réparabilité des produits. À ce propos, je voudrais dire un mot de l’importance de développer une consommation économe dans le cadre d’une « économie circulaire », territorialisée par des circuits courts, qui recycle, répare et valorise la matière et les objets.
Concernant la lutte contre le démarchage téléphonique abusif, nous pensons qu’il faudrait aller beaucoup plus loin que le projet de loi et interdire tout simplement l’ensemble des démarchages commerciaux par téléphone, en particulier en direction des personnes vulnérables. Il se pose, les concernant, une vraie question de protection, en particulier pour les personnes âgées, harcelées et mises en difficulté par de telles pratiques.
À propos du chapitre V relatif à la modernisation des moyens de contrôle de l’autorité administrative chargée de la protection des consommateurs, les sénatrices et les sénateurs du groupe CRC sont particulièrement convaincus de la nécessité d’avoir une police économique forte.
Auteur, il y a quelque temps, d’un rapport pour avis sur la DGCCRF – la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes –, j’ai pu constater que le manque chronique de moyens financiers et humains a été préjudiciable aux missions de contrôle de ses agents. Cette année, vous avez tenu à ne pas baisser le budget de cette administration. C’est tout à fait appréciable, certes… mais sans doute cela ne suffira-t-il pas.
Au-delà de la DGCCRF, nous sommes inquiets des conséquences du projet stratégique de la direction générale des douanes et droits indirects pour 2018. En effet, ce service central dans la lutte contre la fraude verrait, de source syndicale, disparaître plusieurs milliers de ses emplois et évoluer ses missions. La lutte contre la fraude commerciale, sociale et environnementale s'en trouverait reléguée au rang d’accessoire.
Par ailleurs, concernant les dispositions financières du projet de loi, nous souscrivons à l'idée qu’un crédit amortissable doive être obligatoirement proposé au-delà d’un certain montant.
Nous saluons également l’obligation de proposer un programme de fidélité non lié à un crédit. Et nous approuvons particulièrement l’inopposabilité au conjoint ou au partenaire lié par un pacte civil de solidarité d’un crédit à la consommation d’un montant excessif. Ces mesures vont dans le bon sens.
Mais nous regrettons que nos propositions visant à interdire le crédit revolving ou à réformer le taux de l’usure, pourtant portées unanimement par la gauche lors de la précédente législature, n’aient pas été retenues.
Nous regrettons également que ce projet de loi soit un rendez-vous manqué pour l’identification de l’origine des produits agricoles et alimentaires. La proposition, actée par l’adoption d’un amendement à l’article 4, de soumettre le pouvoir législatif à la décision de la Commission européenne se voit aujourd'hui rejetée par Bruxelles. Pourtant, les citoyens attendent une information réelle sur ce qu’ils mangent… Notre regret est donc double : pas d’information sur l’origine des produits agricoles, et une pratique institutionnelle non conforme à notre Constitution.
Enfin, deux dispositions du projet de loi cristallisent, je le crains, une opposition de fond.
D’une part, la création du registre national des crédits aux particuliers, dont beaucoup vantent les mérites, mais que nous rejetons, revient à faire porter la responsabilité du surendettement aux seules familles et non aux établissements financiers pourvoyeurs de crédit.