Cet amendement a pour objet de supprimer la désignation de tribunaux spécialisés pour traiter des actions de groupe. Je l’avais déjà présenté en première lecture et le Sénat l’avait adopté à une large majorité. Malheureusement, une fois de plus, les députés n’ont pas entendu notre voix et, surtout, n’ont pas voulu entendre la voix des territoires. Or il s’agit d’une proposition qui peut et doit faire exister notre Haute Assemblée face à l’Assemblée nationale.
Pourquoi créer des tribunaux de grande instance spécialisés, des tribunaux d’exception en quelque sorte ? Comme je le rappelais lors de la discussion générale, j’y suis fermement opposé. Cette spécialisation aurait en effet plusieurs conséquences négatives.
Tout d’abord, elle serait inutile, car tous les tribunaux de grande instance, aujourd’hui, sont capables de traiter des affaires de droit de la consommation : cela fait partie de leur quotidien et, d’ailleurs, ce projet de loi ne crée pas un droit nouveau.
Ensuite, cette spécialisation contribuerait à éloigner encore davantage la justice de nos concitoyens, alors que cette matière touche tous les consommateurs ordinaires, pour des actions collectives, mais de portée locale ou régionale.
En spécialisant certains tribunaux, on crée aussi une source nouvelle de contentieux que les juristes spécialisés ne manqueront pas d’exploiter au détriment des intérêts des consommateurs, en soulevant des exceptions d’incompétence.
Enfin, certains contentieux locaux se verront délocalisés dans des métropoles régionales, éloignées des affaires traitées. Or il faut bien avoir à l’esprit que les actions de groupe ne sont pas réservées à de grandes affaires qui ne manqueront pas de défrayer la chronique, s’agissant des opérateurs téléphonique notamment, mais qu’elles concerneront aussi des affaires plus locales.
Selon le rapport de nos collègues, huit tribunaux seulement seraient spécialisés dans les actions de groupe, dont sept en métropole et un seul outre-mer. On éloigne donc encore la justice des citoyens et de tels choix ne sont pas tenables.
Je vous propose donc de supprimer ces tribunaux de grande instance spécialisés et de revenir au droit commun pour l’action de groupe. Si on pousse le raisonnement encore plus loin, on nous a annoncé des actions de groupe en matière d’environnement ou de santé : faudra-t-il désigner de nouveaux tribunaux spécialisés ?