Intervention de Joël Labbé

Réunion du 27 janvier 2014 à 21h30
Consommation — Article 4

Photo de Joël LabbéJoël Labbé :

Avec cet amendement, je souhaite revenir sur la question des huîtres diploïdes et triploïdes, non pour vous ennuyer, mais parce que ma conviction est, sur cette question, de plus en plus forte.

Ceux qui ont assisté aux vœux du Président du Sénat, Jean-Pierre Bel, ont pu déguster des huîtres naturelles, nées en mer, du golfe du Morbihan. Il apparaît comme évident que la protection et la valorisation de cette richesse patrimoniale, et des emplois qui lui sont liés, doivent perdurer.

Pour ce faire, l’étiquetage est un moyen efficace. Il s’agit non pas de juger de la qualité gustative des deux types d’huîtres, mais simplement de mettre en place un étiquetage afin que le consommateur sache ce qu’il consomme.

Cet étiquetage permettrait de distinguer les huîtres naturelles diploïdes, nées en mer, des huîtres triploïdes, issues d’un croisement pratiqué en écloserie entre des huîtres tétraploïdes, qui sont des géniteurs très performants, et des huîtres diploïdes. Ce croisement ne peut se faire qu’en milieu confiné, c'est-à-dire en écloserie.

Ces huîtres, stériles, présentent deux avantages importants. D’une part, elles ne sont jamais laiteuses et peuvent donc être consommées tout au long de l’année – elles sont d’ailleurs désignées dans le commerce par l’expression poétique d’« huitres des quatre saisons ». D’autre part, n’ayant pas besoin de mobiliser leur énergie pour se reproduire, elles grossissent en moyenne en deux ans, alors qu’il faut trois années pour mener des huîtres naturelles à maturité.

Les huîtres triploïdes seraient donc a priori un produit idéal ; elles représentent d’ailleurs aujourd’hui plus du tiers du marché. Par ailleurs, comme les deux types d’huîtres ne sont jusqu’à présent pas différenciés, les ostréiculteurs auraient tout intérêt à ne plus produire que des huîtres triploïdes. Heureusement, certains producteurs font de la résistance !

Il faut signaler que ces nouvelles huîtres rendent les professionnels complètement dépendants des écloseurs, à l’image des paysans avec les semenciers. Par ailleurs, elles sont beaucoup plus fragiles et sujettes à mortalité. Selon les dernières études, 60 % des huîtres triploïdes ont été touchées par des maladies, contre 20 % seulement des huîtres naturelles. Enfin, elles contribuent à affaiblir le patrimoine génétique de l’huître et ont, de ce fait, un impact non négligeable sur le milieu naturel.

D’où l’intérêt de l’étiquetage, qui permet au consommateur de choisir en toute connaissance de cause le produit qu’il consomme.

Notre position est renforcée par l’insuffisance de données disponibles permettant de circonscrire les risques sanitaires et environnementaux.

On nous a signifié que cette disposition d’étiquetage mérite d’être débattue au sein de la filière conchylicole plutôt qu’approuvée directement par voie législative. Les ostréiculteurs traditionnels sont dorénavant extrêmement minoritaires dans la profession. Cependant, la position du Comité national de la conchyliculture a été jusqu’à présent de ne pas adopter de réglementation spécifique aux huîtres triploïdes – je parle toujours d’étiquetage seulement – puisque ces huîtres ne sont pas considérées comme un nouveau produit.

Dès lors, notre crainte n’est pas levée. Il revient, à mon sens, au législateur de s’assurer de l’information du consommateur, ce que concourt à faire cet amendement. C’est la raison pour laquelle je le défends avec force.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion