Monsieur le président, mes chers collègues, monsieur le ministre, nous avions déjà eu l’occasion de débattre de l’assurance emprunteur lors de l’examen du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires. J’avais alors beaucoup insisté sur la nécessité de permettre aux emprunteurs de choisir une assurance qui ne soit pas automatiquement celle que leur propose la banque.
Nous avions alors amélioré le dispositif pour ce qui concerne la période précédant l’octroi final du prêt. J’espère, monsieur le ministre, que nous pourrons suivre en détail l’efficacité de ce nouveau dispositif, le délai laissé aux souscripteurs pour le choix de leur assureur ne me paraissant pas encore optimal.
Reste que vous avez ouvert une nouvelle possibilité : celle de substituer l’assurance emprunteur contractée avant le prêt pendant un an.
Si je me réjouis de cette innovation, une question se pose : les conditions de la substitution sont-elles correctes ? En effet, s’il est vrai que le libre choix et la libre concurrence peuvent avoir un effet positif sur les tarifs, il faut veiller à ce qu’ils ne déstabilisent pas l’ensemble du dispositif. En particulier, il faut veiller à ce qu’ils ne remettent pas en cause la fameuse mutualisation, mesure d’intérêt général qui permet aux publics les plus à risque, notamment les plus âgés, de ne pas être pénalisés sur le plan tarifaire.
Comment réguler la concurrence sans porter atteinte à l’intérêt général ? Tout l’enjeu est là, et j’ai déposé sept amendements qui tendent à y concourir.
Premièrement, je propose que les assureurs ne puissent pas appliquer de tarifs différenciés en fonction de l’âge et de la catégorie socioprofessionnelle des emprunteurs, pour garantir la mutualisation globale des offres et la solidarité entre assurés.
Deuxièmement, la transparence sur les coûts réels des assurances emprunteur doit être garantie. Pour ce faire, je propose d’ajouter toute une série d’éléments dans la notice de prêt afin de permettre au contractant de se décider en connaissance de cause entre les différentes assurances.
Troisièmement, la rémunération des acteurs intervenant en la matière, en particulier les intermédiaires, doit être à la charge non pas de l’assuré, mais bien de l’assureur. C’est un élément tout à fait essentiel pour que la concurrence soit équitable.
Quatrièmement, je propose la création d’un conventionnement pour les prêts aidés par la puissance publique, comme cela existe dans d’autres domaines. Je pense au prêt d’accession sociale, le PAS, au prêt à taux zéro renforcé, le PTZ+, à tous les prêts destinés aux catégories socioprofessionnelles les plus modestes, lesquelles ne sont en situation ni de pouvoir faire pression sur les prix ni d’analyser la totalité du contenu de l’offre assurantielle, en particulier la prise en compte du chômage, des difficultés temporaires, etc.
Enfin, monsieur le ministre, j’en viens au fameux délai de douze mois que l’Assemblée nationale a accordé aux contractants pour renégocier l’assurance de leur prêt.
Cette durée fait l’objet de deux analyses tout à fait contradictoires. D’un côté, les banques expliquent qu’elle aura pour effet de tuer la mutualisation. De l’autre, les assurances répondent que, sans concurrence, il n’y aura pas de baisse des prix, laquelle garantit la mutualisation.
En réalité, si l’ouverture de la concurrence a permis une réelle réduction des coûts en dix ans, les tarifs n’ont pas baissé de façon homogène pour tout le monde : ils ont diminué de 35 % pour les clients âgés de moins de trente-cinq ans, ils ont stagné pour ceux qui ont entre quarante et cinquante ans et ont même augmenté de 15 % pour les plus de cinquante ans. Autrement dit, la démutualisation a accompagné la concurrence…
Par ailleurs, et les chiffres de l’inspection générale des finances sont clairs sur ce point, l’écart est de 1 à 2, 5 pour les contrats groupés – en fonction de l’âge des clients –, et de 1 à 7 pour les contrats alternatifs.
Autant dire que, si la concurrence est intéressante, sa régulation est absolument nécessaire, raison pour laquelle je défendrai un amendement tendant à réduire en partie le délai de renégociation de douze à six mois.
En outre, monsieur le ministre, je vous interrogerai sur la constitutionnalité de l’allongement du délai à un an. En effet, on peut s’interroger sur le gain, en termes d’intérêt général, qui en résulterait. Je vous rappelle que, dans le cadre des contrats d’assurance vie, la capacité de résiliation et de renégociation n’est que de douze mois. Dans le cas présent, une telle durée paraît tout à fait disproportionnée du point de vue constitutionnel.
Or j’ai quelque crainte, monsieur le ministre, …