Intervention de Jean-François Husson

Réunion du 29 janvier 2014 à 14h30
Consommation — Article 19 octies suite

Photo de Jean-François HussonJean-François Husson :

J’ai écouté avec intérêt vos explications, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, et je souhaite y apporter quelques informations complémentaires.

Vous avez parlé, à juste titre, de la nécessité de conserver une mutualisation dans le domaine de l’assurance emprunteur. Dans notre système certes concurrentiel, mais pas autant que les consommateurs le souhaiteraient, ces derniers doivent en effet comprendre qu’une moindre concurrence peut les protéger.

Il existe aujourd’hui deux dispositifs de protection.

Il y a, tout d’abord, des assurances emprunteurs par contrat de groupe, soit une mutualisation générale, sans tranche d’âge. Ces contrats concernent des personnes d’âge actif, auxquelles on pose de trois à cinq questions, relativement simples, voire parfois aucune. Dans ce dernier cas, vous êtes supposé avoir adhéré, quoi qu’il vous arrive ensuite. Effectivement, l’assurance emprunteur couvre le risque santé, notamment l’arrêt de travail ou le décès. L’absence de questionnaire signifie donc que tous les risques médicaux sont couverts et que le déclenchement de l’assurance est alors automatique. Dans l’absolu, cette solution me semble être la meilleure, puisqu’il n’est pas tenu compte, ou très peu, de l’état de santé.

Du fait du jeu actuel de la concurrence, des assureurs prennent en compte certains critères, comme l’âge de l’emprunteur. On sait que, statistiquement, on est en meilleure santé, c’est-à-dire que l’on bénéficie d’une plus grande espérance de vie et que l’on présente moins de risques de décès, à dix-huit, vingt ou vingt-cinq ans qu’à cinquante-cinq ans. Ces données permettent aux assureurs de mutualiser les risques non pas sur une période de trente-cinq ou quarante années, mais par tranche d’âge, voire par profession, en tenant compte des risques professionnels. Il s’agit d’une mutualisation catégorielle, qui permet à certains de bénéficier de conditions plus avantageuses : vous l’avez compris, un dispositif comportant trois tranches d’âge – 18-35 ans, 35-50 ans, plus de 50 ans – est plus favorable aux jeunes qu’un autre basé sur un âge moyen situé entre quarante-cinq et cinquante ans. M. de La Palice en aurait dit autant...

Mais il reste des questions en suspens.

S’agissant du délai de trois, six ou douze mois, on ne trouvera pas de système parfait. Il serait bon, néanmoins, de prévoir un mécanisme de résiliation – car c’est bien de cela qu’il s’agit, je suis d’accord avec vous, monsieur le ministre –, laquelle a une conséquence pour l’assuré : celui-ci repart à zéro, et peut être soumis à un nouveau questionnaire, lequel sera « ouvert » ou de santé. Rappelons que le fait générateur de la couverture dans l’assurance emprunteur est l’état de santé lorsque survient le risque. Or certains assurés ne considèrent pas que le fait de prendre des médicaments revient à se soigner... il arrive que l’on trouve ce genre d’incongruité dans les réponses aux questionnaires !

Un autre élément n’a pas été traité, me semble-t-il, dans les deux interventions précédentes : le changement de situation professionnelle.

Un salarié qui décide, à trente-cinq ou quarante ans, de s’installer à son compte doit informer l’organisme prêteur et l’assureur du changement de sa situation. C’est une formalité importante, qui est rarement accomplie. Il faudrait donc imaginer un dispositif permettant de donner cette information mais aussi de souscrire une assurance, y compris auprès du même organisme, dans les mêmes conditions qu’auparavant. Dans ce cas, en effet, le fait générateur n’est pas l’état de santé, mais le changement de situation professionnelle : par exemple, lorsqu’un cadre choisit d’exercer une profession libérale, ou un travailleur indépendant de devenir salarié.

Le fait générateur de l’assurance, qui est le montant de l’emprunt, et le risque lié à l’état de santé n’ont rien à voir avec le changement de situation professionnelle.

Je tiens à attirer votre attention sur ce point, car rien n’est prévu à cet égard dans le dispositif dont nous débattons.

Il serait logique de définir un cadre juridique d’action avec les organismes prêteurs, afin de trouver des réponses pratiques, pragmatiques et concrètes, qui ne lèsent les intérêts de personne et qui respectent l’engagement initial. En effet, vous l’avez compris, aucun paramètre lié au risque n’est pris en compte au départ.

Vous l’avez dit, l’une des finalités de l’article 19 octies est d’améliorer les conditions de souscription. Mais il convient aussi de protéger les organismes prêteurs et les assurés lorsqu’ils souscrivent une garantie d’emprunt, quel que soit le motif pour lequel ils le font.

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