Intervention de Annie Jarraud-Vergnolle

Réunion du 9 novembre 2010 à 21h30
Financement de la sécurité sociale pour 2011 — Article 8

Photo de Annie Jarraud-VergnolleAnnie Jarraud-Vergnolle :

La fiscalité sociale sera au cœur de la prochaine confrontation présidentielle pour au moins deux raisons.

La première, c’est l’ampleur des déficits des comptes sociaux : 23, 1 milliards d’euros pour 2010, 21, 3 milliards d’euros pour 2011, à peine moins à l’horizon 2012. Non seulement la sécurité sociale vit à crédit, mais une partie des retraites, des dépenses de santé et des allocations familiales est financée non plus par nos cotisations, mais par l’emprunt.

La deuxième raison, c’est l’aggravation des inégalités de soins. Dix mille par an : c’est le nombre de décès prématurés que l’on pourrait éviter si les ouvriers et employés avaient, dans notre pays, la mortalité des cadres supérieurs et des professions libérales. Et il faut savoir que la France fait partie des pays européens où les disparités devant la mort sont les plus fortes.

Il est temps d’engager cette grande réforme que vous aviez tant et tant annoncée. Notre système de prélèvements sociaux est devenu non seulement inique – nul ne sait qui paye, ce que représentent les taux affichés et la réalité de la redistribution opérée –, mais également instable.

Les exonérations de cotisations sociales ont changé de mode de calcul douze fois en quinze ans. Comment les entreprises peuvent-elles, elles-mêmes, faire leurs arbitrages ? Enfin, ce système n’est favorable ni à l’emploi ni à l’investissement, et pas davantage à l’équilibre des comptes.

Face à ce constat, il faut une nouvelle donne. Il convient tout d’abord de taxer tous les revenus sans distinction d’origine, qu’ils proviennent du capital ou du travail, qu’ils soient tirés de l’activité ou des transferts. Tous ces revenus doivent être soumis à l’assujettissement social sur la même base, à savoir des taux proportionnels aux niveaux de rétribution.

Cela suppose de réfléchir à toutes les déductions, tous les abattements, toutes les exonérations et toutes les niches sociales, pour faire en sorte que, dès le premier euro, la règle d’imposition soit commune. Cette conception d’une large assiette avec des taux modérés et progressifs permettrait de financer à la fois la sécurité sociale, la dette et le Fonds de solidarité vieillesse, le FSV.

Pour les plus-values, nous avons aujourd’hui un empilement d’impositions sur les stock-options, le forfait social et les retraites chapeaux. Nous proposons de recourir au même principe : une assiette large, qui ne doit plus reposer seulement sur les salaires, mais sur l’ensemble de la richesse produite, c’est-à-dire la valeur ajoutée. Le capital dans sa globalité serait ainsi concerné, et aucune part n’en serait exclue selon la situation professionnelle de son détenteur, sa capacité à faire pression ou à trouver des moyens de détourner l’imposition.

Nous sommes pour l’impôt, non pas pour spolier, mais pour préparer, investir, financer, stimuler. S’il est vrai qu’aucun gouvernement n’est sûr de gagner les élections quand il baisse les prélèvements – la démonstration en a été faite –, il est certain de les perdre quand il annonce des hausses.

Le courage n’est pas la témérité. Nous avons à faire des choix, à réformer les prélèvements et à dire qui les paiera et comment. Nous devons aussi regarder du côté de la dépense de l’assurance maladie et être plus efficaces, plus performants, plus économes dans la gestion des caisses, locales ou nationales.

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