Intervention de Annie David

Réunion du 9 novembre 2010 à 21h30
Financement de la sécurité sociale pour 2011 — Article 10, amendement 219

Photo de Annie DavidAnnie David :

Cet amendement pourrait apparaître comme un amendement de repli puisqu’il vise seulement à supprimer l’exonération de CSG et de cotisations sociales dont bénéficient les retraites chapeaux.

À nos yeux, il n’en est pas moins important tant ces régimes sont injustes, qu’il s’agisse de leurs montants, du nombre de leurs bénéficiaires et de leur fiscalité pour le moins avantageuse. En effet, en 2009, 826 entreprises ont mis en place au moins une retraite chapeau, et moins de 10 % seulement des bénéficiaires de ladite retraite perçoivent un montant supérieur à 5 600 euros. C’est dire que ce dispositif ne concerne qu’une minorité de dirigeants et de cadres, ceux-là mêmes qui perçoivent les rémunérations les plus importantes !

On a coutume de dire que l’argent va à l’argent. Vous donnez raison à l’adage en faisant adopter des législations qui, sur le plan social ou fiscal, continuent à favoriser ces modes de rémunérations au détriment des salaires, lesquels pourraient tout à fait, d’un point de vue légal, intégrer les montants faramineux des retraites chapeaux, à cela près que les cotisations sociales leur seraient alors applicables.

C’est donc bien pour permettre à une minorité de personnes de contourner les cotisations sociales, c’est-à-dire les mécanismes qui alimentent la solidarité, que vous refusez de prendre les mesures qui s’imposent. C’est d’ailleurs très certainement cette raison qui vous conduira à repousser l’amendement n° 219, comme vous l’avez déjà fait en commission.

Vous ne manquerez pas d’arguments pour justifier le fait que les plus riches puissent continuer à être proportionnellement moins solidaires que ne le sont les salariés ! Il faut le dire, c’est bien cette logique qui a conduit à l’instauration du bouclier fiscal.

Vous ne manquerez pas non plus de nous objecter, comme vous l’avez d’ailleurs fait en commission, que si notre amendement était adopté, il participerait à l’évasion fiscale de nos meilleurs cadres et dirigeants. Cet argument, que nous avons déjà entendu maintes fois, notamment en commission, appelle toutefois quelques observations de notre part.

Tout d’abord, certains bénéficiaires des retraites chapeaux n’ont pas brillé par leur réussite, ce qui ne les a pas empêchés d’empocher les sommes en question ! Par ailleurs, qui peut réellement croire que nos entreprises, visiblement très soucieuses de garder ces hauts dirigeants, ne prendraient pas les mesures nécessaires pour les inciter à rester, y compris en augmentant leurs salaires ?

Ensuite, vous qui parlez souvent de « moraliser l’économie », comment pouvez-vous encore justifier une mesure aussi injuste, qui profite à une minorité de personnes en mesure de choisir l’exil fiscal – elles jouent, d’ailleurs, la carte de ce chantage à votre égard –, alors que l’immense majorité des salariés, celles et ceux qui subissent chaque années vos mesures, ne peuvent pas vous opposer cette arme ?

Pour conclure, mes chers collègues, je rappelle que ces retraites chapeaux s’adressent bien évidemment à celles et ceux qui disposent déjà de revenus très intéressants. Je vous invite à réfléchir à la situation de nos compatriotes qui, une fois à la retraite, n’ont, pour vivre, que le minimum vieillesse. Pour eux, 300 euros de retraite chapeau représenteraient un apport bien plus bien plus intéressant qu’il ne l’est pour les personnes qui en profitent actuellement.

Je suis, du reste, persuadée que les bénéficiaires du minimum vieillesse seraient, si elles bénéficiaient d’une retraite chapeau, tout à fait favorables à ce que celle-ci soit soumise, si ce n’est à l’ensemble des cotisations sociales, du moins à la CSG. Car ces personnes savent ce que signifie la solidarité !

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