Intervention de Marie-Noëlle Lienemann

Réunion du 30 janvier 2014 à 21h45
Accès au logement et urbanisme rénové — Article 54 quater

Photo de Marie-Noëlle LienemannMarie-Noëlle Lienemann :

L’ancienne ministre du logement que je suis se permet de présenter cet amendement, bien que se sentant très isolée ! Mais il y a des combats que l’on peut mener avec persévérance.

Nous avons adopté lors de la première lecture une disposition qui plaçait les fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations sous le double contrôle du ministère de l’économie et des finances et du ministère du logement, et non plus sous la seule autorité de Bercy.

Je vous rappelle que les fonds d’épargne sont normalement affectés en priorité au financement du logement social. Historiquement, Bercy considère que c'est son affaire. Si vous me permettez une digression, je pense même que, pour Bercy, toute la politique du logement est son affaire !

Bercy a tendance à envisager la gestion des fonds d’épargne dans un esprit large, ce qui est tout à fait raisonnable : si tous les fonds ne sont pas nécessaires pour la politique du logement, il est légitime qu’ils servent à d’autres services d’intérêt général.

Néanmoins, je ne suis pas convaincue que Bercy soit toujours prioritairement focalisé sur la réussite des programmes de logements. J’ai quelques exemples en tête : le ministère me demandait pourquoi des fonds disponibles n’étaient pas dépensés, alors qu’en réalité, ils étaient indisponibles.

En effet, Bercy nous serre la vis – vous le savez tous, mes chers collègues ! – et fixe des critères tels qu’on ne peut pas boucler les opérations de logements. Forcément, les fonds d’épargne ne sont pas mobilisés ! Et on rejette la faute sur les méchants organismes d’HLM ou sur les méchants maires, qui ne veulent pas construire !

Il serait plus sain et plus dynamique pour notre démocratie que l’administration du logement ait au moins un droit de regard. Ainsi, nous pourrions être sûrs que nous ne serons pas doublement bridés, d’un côté par la diminution de la part des fonds d’épargne consacrée au logement – on trouve toujours de bons usages pour ces fonds – et, de l’autre, par des critères d’attribution desdits fonds trop stricts.

Pour ma part, je suis convaincue que la méthode retenue aujourd'hui est mauvaise.

Par ailleurs, le fait que l’ensemble des crédits ne « remonte » pas à la Caisse des dépôts et consignations, contrairement à ce qui nous avait été dit, m’inquiète énormément. J’observe que les banques ont capté 30 % de fonds d’épargne supplémentaires en 2013 par rapport à l’année précédente et qu’elles n’ont pas davantage accordé de prêts aux PME, lesquelles sont pourtant censées en profiter.

C'est la raison pour laquelle j’estime que le problème vient de la tutelle. On veut laisser aux banques assez de fonds propres pour répondre aux critères de Bâle III : on ne fait donc pas trop « remonter » les fonds à la Caisse des dépôts et consignations. On est alors bien content d’avoir le même ministère de tutelle pour contrôler les banques et gérer les fonds d’épargne !

Je maintiens que la double tutelle est une bonne idée. Mais il y a eu à l’Assemblée nationale une mobilisation générale contre la mesure que nous avions adoptée. L’Assemblée nationale contrôle la Caisse des dépôts et consignations aux côtés de la direction du Trésor. M. Emmanuelli a obtenu du Trésor des informations qu’il avait habituellement de la peine à se procurer. Les députés ne souhaitent pas que l’on déstabilise ce nouvel équilibre positif qu’ils ont obtenu.

Pour ma part, je sais que je ne réussirai pas à faire approuver ma proposition lors de la réunion de la commission mixte paritaire et que mes collègues du groupe socialiste ne veulent pas entrer en conflit avec les députés sur ce sujet. Ne souhaitant pas les mettre dans l’embarras et n’ayant qu’un goût assez modéré pour la solitude, je retire mon amendement, après avoir plaidé tout l’intérêt de ma proposition ! §

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