Intervention de Amandine Berton-Schmitt

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 30 janvier 2014 : 1ère réunion
Stéréotypes dans les manuels scolaires — Audition de mmes mélanie gratacos directrice du centre hubertine auclert et amandine berton-schmitt chargée de mission éducation

Amandine Berton-Schmitt, chargée de mission éducation au centre Hubertine Auclert :

Les couvertures sont aussi édifiantes : un même manuel de Terminale bac pro a une couverture bleue pour les élèves de la filière industrielle et une couverture rose à destination des élèves de la filière tertiaire ! Les premières informaticiennes, qui travaillent sur l'ENIAC (Electronic Numerical Integrator and Analyser), c'est-à-dire le premier ordinateur conçu aux États-Unis dans les années quarante, apparaissent sur une photographie, où elles semblent être des standardistes, mais ne sont pas identifiées.

Les résultats quantitatifs sont tout aussi mauvais pour les manuels de français. Sur 13 192 noms mentionnés en histoire littéraire et artistique, 6,1 % appartiennent à des femmes. Les femmes représentent 3,7 % des auteurs cités, 6,7 % des artistes et 0,7 % des philosophes. Sur 254 biographies recensées, 11 seulement sont consacrées à des femmes, comme dans les manuels d'histoire. Les femmes sont réduites au rôle d'épouses, d'amantes ou de muses. L'exemple de Louise Collet est frappant : elle est décrite comme la confidente de Flaubert mais jamais comme la poétesse qu'elle est aussi. Les manuels minimisent le rôle des femmes dans la production littéraire. 5 % des textes littéraires étudiés sont l'oeuvre de femmes, sans que cette exclusion des femmes du champ littéraire ne soit questionnée. Sur l'ensemble du corpus artistique présenté, 93,3 % des auteurs sont des hommes.

La représentation du féminin est dépendante du regard masculin. Les femmes sont davantage étudiées comme des sujets de romans ou de poèmes qu'en tant que créatrices ou artistes. Le terme de « héros » ne se décline guère au féminin : il y a très peu d'héroïnes... On relève une essentialisation de la femme par opposition à l'universalité du genre masculin.

Néanmoins, les ouvrages destinés aux élèves des filières professionnelles abordent des thèmes tels que l'éducation des filles, les mariages forcés, les femmes sportives, l'image des femmes dans la publicité. A l'inverse, la partie du programme de seconde générale consacrée à l'argumentation aux XVIIème et XVIIIème siècles, qui pourrait se prêter à l'étude d'auteurs de ce temps intéressés par la promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes, tel Condorcet, n'est pas traitée sous cet angle.

Après un tel état des lieux, quelles pistes pouvons-nous proposer afin de promouvoir l'égalité entre les sexes ? Nous recommandons l'utilisation de l'ouvrage de Sylvie Cromer et Carole Brugeilles, édité par l'UNESCO, « Analyser les représentations du féminin et du masculin dans les manuels scolaires », du guide méthodologique belge « Sexes et Manuels » et de l'ouvrage collectif publié chez Belin sous le titre « La place des femmes dans l'Histoire ». Le site Genrimages propose aussi des outils et ressources intéressantes, tout comme notre site www.hubertine.fr.

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