Nous pensons profondément que le système prévu n’est pas applicable et est même parfaitement dissuasif pour un entrepreneur, qui choisit librement son secteur d’activité et peut implanter son activité nouvelle soit en France soit dans un autre pays de l’Union européenne.
Puisque la compétition se joue aussi entre les territoires, nous avons le devoir d’être attractifs. Certes, la France ne manque pas d’attractivité, mais force est de reconnaître qu’elle a perdu de sa compétitivité, depuis au moins deux décennies, ne serait-ce qu’en termes d’accueil. Les chiffres attestent d’ailleurs une diminution préoccupante des investissements industriels.
Ce besoin d’informations n’a en apparence rien de choquant. En effet, nous n’imaginons pas que l’on puisse maltraiter les salariés au point que la fermeture d’un établissement leur soit annoncée par SMS ou par voie de presse, comme cela a pu arriver. Nous devrions donc n’avoir aucune raison de nous opposer à cette exigence d’informations dont vous avez rappelé l’évidence, madame le rapporteur.
Néanmoins, des zones de flou demeurent et les raisons que vous avez avancées à l’instant pour justifier le maintien du conditionnel le confirment.
Le tout est de savoir à partir de quel moment il s’agit pour l’entreprise d’« envisager ».
L’alinéa 8 concerne, je le rappelle, les entreprises employant plus de mille salariés qui envisagent – il ne s’agit donc bien encore que d’une éventualité – « la fermeture d’un établissement employant cinquante salariés et plus, qui aurait pour conséquence un projet de plan de sauvegarde de l’emploi ». Une double conditionnalité pèse donc sur la décision de l’entrepreneur.
Or cet entrepreneur a pour devoir – malheureusement ou heureusement – d’optimiser ses investissements, afin d’engager des moyens nouveaux pour des produits nouveaux et sur des marchés nouveaux. Cette exigence lui impose d’examiner en permanence l’optimisation de ses moyens de production, non seulement sur l’ensemble du territoire national, mais aussi sur l’ensemble des pays où il est actif, donc d’imaginer différents scénarios possibles pour des activités existantes.
Aux termes de la proposition de loi, si la direction de la stratégie « envisage » la fermeture d’un établissement, qui « aurait pour conséquence » un plan social, il est demandé à l’entreprise d’informer les représentants du personnel : qu’adviendra-t-il si, finalement, elle ne va pas jusqu’au terme de ce projet ? Une telle disposition risque de susciter une instabilité juridique et toute une série de contentieux, au motif que des réflexions prospectives auraient amené l’entreprise à considérer l’hypothèse d’une fermeture, avec les conséquences que cela pourrait impliquer pour l’emploi, sans que cette hypothèse se vérifie. De surcroît, les salariés risquent d’être plongés dans un état d’inquiétude permanent.
La communication de telles informations conduira en outre les clients, les fournisseurs et les financeurs à s’interroger. Or Dieu sait qu’une entreprise a besoin de leur confiance !
Nous sommes bien entendu tout à fait favorables à l’information des salariés dès lors qu’une décision a été prise, mais pas lorsqu’il s’agit d’une simple hypothèse.