Intervention de Jean-Pierre Godefroy

Réunion du 27 janvier 2005 à 15h00
Droits des personnes handicapées — Vote sur l'ensemble

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

C'est finalement une partie des députés UMP qui les ont repris et qui les ont fait adopter à l'Assemblée nationale, avec le soutien des députés de l'opposition.

Pour autant, les avancées obtenues au fil des lectures ne représentent, en aucun cas, un motif suffisant pour faire l'impasse sur l'économie générale de ce projet de loi.

Qu'en est-il, finalement, point par point ?

Concernant la définition du handicap, étaient attendues des réponses en rapport avec les textes internationaux auxquels souscrit la France. Nous attendions ainsi une définition selon laquelle « le handicap est le produit de l'interaction entre les facteurs individuels et contextuels de la personne, et les facteurs environnementaux, qu'ils soient de nature culturelle, sociale ou architecturale ». En fait a été adoptée une définition quelque peu éloignée des textes internationaux.

La controverse entre l'utilisation de l'expression « personne handicapée » ou « personne en situation de handicap » n'était pas d'ordre sémantique.

Par ailleurs, était attendue une compensation intégrale et universelle, sans barrière d'âge ni de taux d'incapacité ou de niveaux de ressources.

Initialement, la compensation prévue était extrêmement restrictive. Sous la pression constante des associations et des parlementaires, la notion de critères de ressources a finalement favorablement évolué et les barrières d'âge sont appelées à disparaître dans un délai de cinq ans.

Pour autant, ces avancées ne sont pas budgétisées et l'estimation des fonds de la CNSA destinés à la compensation sont aléatoires ; parfois même ces fonds sont déroutés - temporairement, espérons-le - vers d'autres utilisations !

Concernant les ressources, il eût fallu procéder à une refonte totale du système allocatif qui aurait permis, en particulier, aux personnes reconnues comme étant réellement incapables de travailler au sens physique, mental ou psychique, de disposer d'un revenu de remplacement qui ne peut être qu'égal au SMIC.

Vous avez préféré un vague toilettage de l'allocation aux adultes handicapés et la création in extremis, en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, d'une garantie de ressources. Vous avez, à ce titre, madame la secrétaire d'Etat, rempli les engagements que vous aviez pris devant le Sénat, même si nous pensons que vous n'êtes pas allée assez loin.

Vous pensez avoir fait un pas décisif en octroyant 140 euros de plus pour l'AAH ; mais il ne faut pas oublier que vous aviez d'abord supprimé le complément d'autonomie déjà existant qui s'élevait à 94 euros. Finalement, l'effort supplémentaire est restreint. En ce qui concerne les ressources, le Gouvernement reste dans une logique d'assistance, et l'effort consenti demeure insuffisant. A mon sens, le SMIC aurait dû être la référence.

Nous regrettons par ailleurs, tant cela semble injuste, que le Gouvernement soit resté opposé à notre amendement qui visait à exonérer les personnes handicapées et les victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles du forfait de 1 euro par consultation médicale. Ce refus est d'autant plus injuste dans les cas où les entreprises responsables ont été condamnées pour faute inexcusable. Le malade ne devrait pas être pénalisé !

S'agissant de l'intégration scolaire, je rappelle que la loi de 1975 avait permis la scolarisation des enfants handicapés. Depuis trente ans, nous avons pu mesurer le progrès qu'elle a représenté, mais aussi le chemin qu'il nous reste à parcourir pour que ces enfants puissent aller à l'école comme les autres.

Aujourd'hui, l'objectif doit être d'encourager, sans restriction aucune, l'accès des enfants handicapés à l'école ordinaire.

Mais telle que prévue dans le texte, la scolarité en milieu ordinaire relève, à mon sens, davantage de l'effet d'annonce que d'une politique volontariste innovante, accompagnée de moyens ad hoc.

De ce point de vue, la loi n'est pas à la hauteur des enjeux, je pense notamment au plan des métiers.

En matière d'emploi, il n'est pas sûr que la refonte du système prévue atteigne les objectifs fixés.

En supprimant les modalités mises en place par la loi de 1987 et destinées à favoriser l'emploi des travailleurs les plus en difficulté et en les remplaçant par la prise en compte « des efforts réalisés par les entreprises dans l'embauche des travailleurs handicapés », tout en chargeant l'inspection du travail, peu formée à ces questions, de juger de ces efforts et selon des modalités définies par décrets, on n'est pas sûr de favoriser l'intégration des travailleurs handicapés.

Nous aurons quand même réussi à faire adopter notre amendement tendant à porter à 1 500 fois le SMIC horaire la contribution à l'AGEFIPH des entreprises qui, pendant trois années consécutives, ne réalisent aucun effort pour l'intégration des personnes handicapées. Je vous remercie d'y avoir été favorable, madame la secrétaire d'Etat.

Par ailleurs, les mesures envisagées en matière d'accessibilité du cadre bâti et des transports n'apportent rien de bien nouveau par rapport à la loi d'orientation de 1975, que ce soit pour les personnes atteintes de déficiences mentales, sensorielles ou motrices. Trop de dérogations subsistent et l'on assiste même parfois à certains reculs, qu'il s'agisse de la notion de « bâtiments nouveaux » et de « bâtiments existants » ou du nombre d'habitants que doit compter une commune pour être soumise à l'obligation de créer une commission communale d'accessibilité.

J'en viens au dispositif institutionnel et au financement. Rien ne change vraiment dans le domaine de l'évaluation et de l'orientation des personnes handicapées. Certes, les instances changent, mais l'on assiste surtout à l'édification d'un système sans réels moyens nouveaux : les départements qui devront piloter ce nouveau guichet unique auront bien du mal !

De plus, madame la secrétaire d'Etat, vous n'avez pas pris compte de la position unanime adoptée par l'Association des présidents de conseils généraux, de gauche comme de droite, concernant la structure juridique des futures maisons des personnes handicapées.

Il est pour le moins curieux que, au coeur de la deuxième étape de la décentralisation, il soit fait si peu cas de la volonté unanime des collectivités locales, qui auront à gérer ces politiques !

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