Intervention de François Marc

Réunion du 11 février 2014 à 14h30
Dépôt du rapport annuel de la cour des comptes

Photo de François MarcFrançois Marc :

La mission de contrôle des finances publiques exercée par la Cour des comptes est partagée avec le Parlement, en particulier ses commissions en charge des finances. Le contrôle budgétaire est en effet au cœur des activités des rapporteurs spéciaux ; la commission des finances a d’ailleurs rendu public, mercredi dernier, son programme de contrôle pour cette année.

Dans le cadre de sa mission d’assistance au Parlement et au Gouvernement, la Cour des comptes transmet au Parlement l’ensemble de ses travaux et mène régulièrement des enquêtes, à la demande des commissions chargées des finances et des affaires sociales. Pour la commission des finances, ce sont ainsi cinq enquêtes qui sont réalisées chaque année et qui donnent lieu à une audition pour suites à donner, en présence des magistrats instructeurs de la Cour des comptes et des administrations concernées. Cette procédure éprouvée permet de renforcer la portée des contrôles.

Pour les prochains mois, nous sommes d’ores et déjà convenus, avec la Cour des comptes, de la remise en juin 2014 de deux enquêtes portant, respectivement, sur les contrats de projet État-région et sur l’ANRU, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine. La commission des finances s’intéresse aussi tout particulièrement aux politiques transversales : nous avons ainsi demandé une « enquête 58-2°» portant sur le recours par l’État aux consultants extérieurs.

Notre travail conjoint peut être fructueux. À titre d’exemple, s’il a été mis fin, dans une assez large mesure, à la sous-budgétisation des frais de justice, c’est sous les efforts conjoints et l’effet des observations réitérées de la commission des finances et de la Cour des comptes. Bref, c’est bien dans le cadre d’une « coproduction » du contrôle budgétaire que le Parlement et la Cour des comptes obtiennent des résultats concrets pour améliorer la performance de l’action publique.

J’en viens à présent au contenu du rapport public annuel. Compte tenu de la proximité des élections municipales, la présente édition consacre une moindre place aux finances locales que les précédents millésimes ; nous ne pouvons, en tant que représentants des territoires, que nous féliciter d’une telle retenue, qui évite que des contrôles puissent être instrumentalisés dans le cadre des campagnes électorales à venir.

Quatre politiques publiques ont été particulièrement étudiées : l’agriculture ; la défense et l’espace ; l’éducation et la jeunesse ; la santé et la cohésion sociale.

Je ne dresserai pas l’inventaire des nombreux sujets abordés ; je limiterai mon propos à quelques thématiques, reprenant notamment des préoccupations récentes ou récurrentes de la commission des finances.

À propos de la fiscalité liée au handicap, la Cour met en exergue les difficultés d’évaluation des dépenses fiscales. Nous savons que la question des dépenses fiscales constitue un enjeu essentiel, puisque celles-ci représentent au total près de 70 milliards d’euros dans un budget annuel. Ces travaux rejoignent donc pleinement notre préoccupation d’une meilleure évaluation du coût et de l’efficacité des dépenses fiscales dans leur contribution à la mise en œuvre des différentes politiques publiques.

En matière de politique éducative, comment ne pas partager le constat de la Cour des comptes selon lequel les internats d’excellence ne répondent pas à une définition assez rigoureuse et à des critères d’évaluation suffisamment robustes ? La notion nouvelle d’internat de la réussite dans le deuxième programme d’investissements d’avenir vise à répondre aux insuffisances des internats d’excellence. Ce sera, pour la commission des finances du Sénat, un sujet de vigilance dans notre suivi attentif de l’ensemble des opérations financées dans ce cadre.

Enfin, plusieurs sujets portent sur des questions sur lesquelles la commission des finances s’est penchée au cours des derniers mois.

Concernant les développements de la Cour des comptes sur les missions fiscales des douanes, je rappellerai les travaux de nos collègues Philippe Dallier et Albéric de Montgolfier sur les questions posées à l’administration des douanes par le développement du commerce en ligne en matière de lutte contre la fraude fiscale. Nos collègues devraient prolonger ces travaux cette année en regardant les problématiques posées par ce développement à l’administration fiscale.

Par ailleurs, s’agissant des suites données aux observations de la Cour, je relèverai notamment les développements sur la gestion des déchets ménagers, qui font écho au récent rapport de nos collègues Jean Germain et Pierre Jarlier sur le bilan et les perspectives d’évolution de la redevance et de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.

Vous avez évoqué, monsieur le Premier président, la partie relative à la SOVAFIM. À ce sujet, notre collègue Philippe Dominati a produit un rapport sur le pilotage du projet de centre du Gouvernement dans lequel il s’interrogeait déjà sur le rôle de cette société et soulignait le caractère « acrobatique » de la solution juridique et financière retenue. Concernant toujours les services du Premier ministre, notre collègue pourra également utilement exploiter le présent rapport dans le cadre du contrôle qu’il prévoit d’effectuer sur la direction de l’information légale et administrative.

Enfin, s’agissant de l’examen des partenariats public-privé du plan Hôpital 2007, la Cour des comptes confirme la nécessité d’une grande prudence, que la commission des finances a toujours recommandée sur ce type de projets. En particulier, la question de l’expertise et de l’instruction, par les services de l’État, de contrats complexes mérite d’être creusée. La commission d’enquête constituée sur l’initiative du groupe socialiste sur les modalités du montage juridique et financier et l’environnement du contrat retenu in fine pour la mise en œuvre de l’écotaxe poids lourds, qui a d’ailleurs entendu la Cour des comptes cet après-midi même, sera sans doute une occasion de le faire de manière encore plus détaillée sur des projets spécifiques.

En conclusion, mes chers collègues, je dirai que les recommandations de la Cour des comptes sont des plus utiles, dans un contexte où le Gouvernement entend désormais faire porter principalement l’effort de rétablissement des comptes publics par des économies sur les dépenses, qui devront représenter plus de 50 milliards d’euros au cours de la période 2015-2017. La Cour nous livre en effet des pistes de réflexion précieuses pour relever ce défi.

Je note que la Cour estime qu’« un tel effort apparaît possible sans remettre en cause la qualité des services publics et l’efficacité de la redistribution. Il exige toutefois de mettre en œuvre, dans l’ensemble des administrations publiques, une démarche ambitieuse de recherche d’économies impliquant des réorganisations, des simplifications des procédures, des remises en cause des interventions les moins efficaces et des redéploiements de moyens vers les objectifs prioritaires ».

Voilà un message d’espoir en même temps qu’un programme de travail que chacun sait particulièrement ambitieux et exigeant !

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