Les mineurs étrangers ne viennent pas prendre la place des mineurs de chez nous. Ils ont les mêmes droits : la protection. Et même si je sais qu’il y a parfois des majeurs parmi eux, il suffit qu’il y ait un mineur pour que tout le travail de prise en charge par les départements soit validé !
Il est évident que le poids de la solidarité repose aujourd'hui essentiellement sur les conseils généraux. Les mineurs isolés étrangers doivent être pris non pas comme des boucs émissaires, mais comme un signal d’un problème plus profond pour notre société : qui doit avoir en charge la solidarité ?
Pourtant, dans son rapport fondamental sur les mineurs isolés, notre collègue Isabelle Debré, si elle avait souligné la nécessité de repenser la prise en charge financière de ces mineurs, avait avant tout mis l’accent sur leur accompagnement vers la vie d’adulte, comme pour tous les mineurs.
Les écologistes espèrent et attendent depuis mai 2012 une grande loi d’accueil des étrangers, digne de la République française. Nous n’avons, hélas ! ici qu’une proposition de loi qui déforme à la fois le rapport Debré et, plus grave encore, la convention de New York sans apporter à ce problème profondément humain, profondément fraternel de réponse autre que financière ou policière, à travers un fichage.
Nous ne pouvons donc pas, nous, les écologistes, voter un texte qui oublie de traiter un certain nombre de points. Je pense à la validité des actes d’état civil étrangers. En effet, ces jeunes viennent souvent avec des actes d’état civil étrangers. Et, contrairement à ce qui est affirmé dans le code civil, nous refusons parfois leur validité, qui devrait dès l’origine être considérée comme telle, ou l’établissement d’un titre d’identité provisoire en cas de doute, parce qu’il peut y avoir doute.
Pourtant, combien de jeunes sont considérés comme majeurs au titre de l’aide sociale à l’enfance et comme mineurs par OFPRA, ce dernier estimant que les actes d’état civil font foi de leur minorité ? C’est un véritable problème, et il n’est pas traité ici.
Rien n’est dit non plus dans cette proposition de loi sur les problèmes de la représentation légale dès sa prise en charge initiale, et pas simplement la nomination d’un administrateur ad hoc. Une représentation légale et une prise en charge complètes par un référent parental sont nécessaires.
Rien n’est dit de l’errance dans les rues des presque majeurs, qui ne relèvent plus de l’obligation scolaire et qui sont parfois, pardonnez-moi l’expression, « stockés » dans des hôtels.
Rien n’est dit de la condamnation du test osseux pour la détermination de l’âge et de toutes les difficultés – elles sont réelles – qu’il va falloir prendre à bras-le-corps pour déterminer l’âge par d’autres moyens, sujet extrêmement compliqué.
Rien n’est dit de la protection de leur santé.
Rien n’est dit de la protection contre les passeurs. Je l’ai indiqué, certains sont effectivement victimes de passeurs, voire de traite. Je pense notamment aux filles. Au mois de décembre, lorsque j’ai examiné le projet de loi de finances en tant que rapporteur pour avis de la commission des lois, j’ai entendu des associations me dire que beaucoup de mineurs isolés étaient arrivés en France sans venir sonner à la porte de l’aide sociale à l’enfance. C’est en particulier vrai des filles, parce qu’elles étaient exploitées dans des réseaux de prostitution.
Surtout, rien n’est dit dans cette proposition de loi de la reconnaissance de la réalité de l’insertion, malgré un parcours chaotique, d’enfants devenus adultes dans un monde dont ils ne connaissent pas encore les codes et de l’attribution du titre de séjour prévu à l’article L. 313–15 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Et l’immense progrès que constitue cet article a été permis grâce au rapport de Mme Isabelle Debré, à laquelle je tiens publiquement ici à dire « merci » au nom de ces étrangers qu’elle a regardés d’abord comme des jeunes. §