Les dotations diminuent et l'édifice s'effrite déjà : la menace n'est pas pour demain, elle a déjà produit bien des effets. Je ne crois pas qu'on puisse faire mieux, avec moins de moyens - et ce que je sais d'expérience, c'est que ce sont toujours les plus fragiles qui paient en premier le manque de moyens et ce sont d'abord les artistes qui vont devoir changer de métier. Encore une fois, ne pensez pas qu'on refera ce qui aura été cassé : il est toujours plus long de construire, que de défaire.
Les bonnes volontés ne peuvent plus suffire, nous avons besoin d'une structuration qui assure aux projets culturels d'être partagés. C'est une condition de la réussite, qu'on voit déjà opérer dans les EPCC : les établissements qui ne fonctionnent pas sont ceux où le projet n'est pas suffisamment partagé, où il y a un équipement, mais pas les équipes.
La décentralisation n'est donc pas achevée, il nous manque cette capacité de définir les politiques en commun, aux différents échelons. C'est la condition pour sécuriser la création dans notre pays, pour qu'elle se développe - et c'est bien là notre véritable exception culturelle.
Je crois, enfin, que la pluralité d'interlocuteurs est une des clés de la liberté de la création. C'est parce qu'un artiste a plusieurs employeurs qu'il est entendu de plusieurs façons et qu'à travers elles, aussi, il affirme son projet. C'est le cas aujourd'hui, cette multiplicité d'interlocuteurs est un atout. L'artiste le perdrait s'il n'avait plus demain qu'un seul élu à qui s'adresser.