D’une part, le Gouvernement a inscrit cette proposition de loi à l’ordre du jour qui lui est réservé, donnant ainsi le signal qu’il en partageait la teneur. D’autre part, il a engagé, ce qui est très rare au sujet d’une proposition de loi, la procédure dite « accélérée ». Ainsi, chaque assemblée ne procédera qu’à une lecture de ce texte.
Nous dénonçons la manœuvre, dont nous percevons bien la finalité : contourner les décisions adoptées à l’échelon communautaire en prenant le risque d’élaborer un dispositif juridiquement fragile. En effet, les États membres n’ont pas réuni la majorité qualifiée requise pour que soit rejetée la demande d’autorisation de mise en culture du maïs transgénique TC 1507 au niveau européen. Une telle autorisation devrait donc être prochainement délivrée.
Par ailleurs, le Gouvernement s’est engagé à un moratoire sur la mise en culture de semences OGM, plus particulièrement le maïs Monsanto 810. En conséquence, il utilise tous les moyens, même des moyens juridiques moindres, comme je le démontrerai lorsque je défendrai tout à l’heure la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
J’ai la faiblesse de penser que procéder ainsi, en contraignant le travail du Parlement et en essayant de légiférer en catimini, ne grandit pas le rôle du législateur et ne permet pas d’aborder la question des OGM de façon rationnelle et sereine. Interdire de façon générale la mise en culture des maïs transgéniques, c’est nier tout le travail passé d’écoute et d’analyse, ainsi que les résultats des études scientifiques. Il s’agit vraiment, à mon avis, d’une position doctrinale.
Nous sommes là aux antipodes du travail lancé voilà quelques années avec notre collègue Jean-Marc Pastor, comme le sait M. Raoul. Dans cette assemblée, qui témoigne d’une vision d’avenir sur cette question, nous nous étions mis d’accord sur dix-sept propositions.
Je regrette que le débat n’ait pas pu continuer dans cette voie, car nous abordons maintenant cette question sous un angle purement politique et non plus économique.
Monsieur le ministre, vous avez annoncé la tenue d’un débat démocratique – je m’en réjouis – au Haut Conseil des biotechnologies le 1er avril – hasard du calendrier –, mais, je l’avoue, je reste malgré tout dubitatif : comment est-il possible d’avoir un tel débat alors que nous faisons aujourd'hui mentir les agences que notre Haute Assemblée, le Parlement européen ainsi que le Conseil européen ont contribué à créer ? Je pense en particulier à l’Autorité européenne de sécurité des aliments instaurée en 2002. Cela augure mal de la démocratie dans ces conditions.
En revanche, je note que vous êtes prêt à ouvrir une deuxième page de l’histoire des biotechnologies, et j’y souscris. Je travaillerai alors avec vous de manière constructive.
Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, je suis opposé non pas à un débat parlementaire sur les OGM, mais simplement au fait d’entretenir sciemment la confusion et la défiance à l’égard des biotechnologies dans l’esprit de nos concitoyens. C’est dommage, car il s’agit d’un dossier éminemment stratégique, comme nous l’avons souvent constaté avec M. Daniel Raoul. En effet, qui possède la propriété intellectuelle des traits génétiques possède une arme alimentaire qui, malheureusement, échappe aujourd'hui aux entreprises européennes, particulièrement aux entreprises françaises. C’est bien là l’ambition à peine voilée de ce texte. Il n’est qu’à considérer l’approximation scientifique de certaines phrases de l’exposé des motifs, les imprécisions et les amalgames.
J’en donnerai deux exemples : aucune autorité scientifique n’a conclu à un risque avéré pour la biodiversité ou les insectes non cibles du maïs Monsanto 810 ; quant aux abeilles, nous sommes tous préoccupés par la baisse de leur population mais, à ce stade, il n’existe pas de lien de causalité avec les OGM. De surcroît, de l’avis de tous les scientifiques, les abeilles butinent peu le maïs, car son pollen ne représente pas, pour elles, une bonne nourriture.