Ces scientifiques n’ont pas fréquenté la même école que vous, mon cher collègue, j’en suis désolé !
J’observe à ce sujet que les propos de notre collègue Fauconnier peuvent varier…
Enfin, l’AESA a rendu un avis sur la sûreté du pollen de maïs Monsanto 810.
Toutefois, il serait temps de revenir à la raison et à la modération et de dire que nous disposons d’un arsenal juridique d’encadrement des mises en culture des espèces OGM pleinement respectueux du principe de précaution, et élaboré après de longues réflexions.
Nous avons légiféré en 2008 pour transposer la directive 98/8/CE. Le texte adopté, dont j’étais le rapporteur, au nom de la commission des affaires économiques, a permis de doter la France de dispositions législatives équilibrées et complètes. S’appuyant sur le principe de précaution et affirmant la liberté de produire ou de consommer avec ou sans OGM – comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre, nous respectons la volonté de l’agriculteur ou du consommateur –, ce texte fondateur a instauré un régime de responsabilité sans faute à l’égard du préjudice éventuel dû à une dissémination fortuite d’OGM. Il a également mis en place une information des citoyens par le biais d’un registre national des cultures OGM. Le risque de la pollinisation croisée a été traité par l’instauration de distances appropriées entre différents types de cultures. Enfin, le législateur a pris soin de créer une instance unique, indépendante et pluridisciplinaire, le Haut Conseil des biotechnologies. Au sein de cet organisme, il a bien distingué l’avis des experts, réunis au sein du comité scientifique, de la parole de la société civile, représentée par le comité économique, éthique et social, dans le respect des points de vue de chacun.
Aujourd’hui, notre arsenal législatif est donc bien suffisant et complet. Efforçons-nous simplement de le respecter et de l’utiliser comme il convient. Nul besoin de procéder à des interdictions comme celle que prévoit la présente proposition de loi, à moins que l’on ne veuille défendre une position idéologique sur les biotechnologies et se priver d’analyses rigoureuses. Cessons de dresser en permanence des rideaux de fumée par l’adoption à répétition de clauses de sauvegarde, dont on sait pertinemment qu’elles seront annulées par le Conseil d’État, comme ce fut encore le cas le 1er août 2013, à la suite d’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne.
Permettez-moi de rappeler les motifs de cette décision du Conseil d’État, quasi identique à celle qu’il avait rendue le 28 novembre 2011 à l’encontre d’un arrêté pris par le précédent gouvernement. L’argumentation du Conseil d'État repose sur quatre points extrêmement précis, que j’indique à l’intention de M. le rapporteur.
Premièrement, « le maïs génétiquement modifié MON 810 n’est pas susceptible de soulever davantage de préoccupations pour l’environnement que le maïs conventionnel ». Le Conseil d'État s’appuie sur l’avis des agences. Nous avons effectivement créé des agences. Si nous essayons de les faire mentir quand leur avis ne nous convient pas, nous n’aurons plus de repères. Je ne sais pas où va ce pays, en ce domaine comme en d’autres.
Deuxièmement, « le ministre a commis une erreur manifeste d’appréciation » en interdisant la culture du maïs MON 810. Au mois de novembre 2011, le Conseil d'État avait déjà émis le même avis.
Troisièmement, on ne peut pas justifier une interdiction au nom du principe de précaution « en se fondant sur une approche purement hypothétique du risque, fondée sur de simples suppositions scientifiquement non encore vérifiées ».
Quatrièmement, aucune situation d’urgence ni aucun risque pour la santé et l’environnement ne justifiaient la décision du ministre.
C’est bien parce qu’il est désormais difficile pour le Gouvernement de présenter une nouvelle clause de sauvegarde que nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner la proposition de loi qui nous est soumise, laquelle prévoit de façon expéditive une interdiction générale de la mise en culture des maïs OGM et présente de nombreux risques d’incompatibilité avec le droit communautaire ; je vous sais gré de l’avoir rappelé, monsieur le ministre. Je poursuivrai cette démonstration dans quelques instants, lorsque je défendrai, au nom du groupe UMP, la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
À ce stade, je me contenterai de faire observer que l’adoption de cette proposition de loi placerait notre pays dans une situation d’illégalité par rapport au droit communautaire. Elle le placerait également dans une situation de fragilité vis-à-vis des règles du commerce international, que notre pays s’est engagé à respecter. La France est en effet soumise aux règles de l’Organisation mondiale du commerce – l’OMC –, selon lesquelles toute entrave au commerce est interdite sauf si elle est fondée sur des motifs valables, notamment de santé publique ou de protection de l’environnement.
Les OGM importés dans l’Union européenne sont soumis à des autorisations de mise sur le marché. Ces autorisations accordées par les instances de l’Union européenne sont valables sur tout son territoire. Elles ne peuvent être remises en cause que lorsque des éléments scientifiques nouveaux mettent en évidence un risque pour la santé et l’environnement. Le ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt a d’ailleurs récemment indiqué que la proposition d’introduire dans les clauses de sauvegarde des critères socio-économiques mettait les États membres dans une situation très fragile vis-à-vis de l’OMC. Toute disposition législative protectrice à l’égard des OGM expose l’Union européenne à des mesures de rétorsion. Ces dernières prendraient la forme de taxes à l’entrée des États-Unis sur des produits agricoles européens emblématiques, et il est évident que la France serait l’un des premiers pays ciblés.
Au-delà des aspects juridiques, il convient de prendre acte des enjeux économiques, compte tenu de la structure actuelle des échanges agricoles mondiaux. D’une part, notre pays, comme d’ailleurs l’Europe entière, est extrêmement dépendant des importations pour l’alimentation de ses animaux d’élevage. L’Europe importe 75 % de ses protéines végétales, essentiellement en provenance des États-Unis, du Brésil et de l’Argentine. De ce fait, 80 % des importations européennes de soja contiennent des OGM. Pour sa part, la France importe chaque année environ 3, 5 millions de tonnes de tourteaux de soja OGM sur les 5 millions de tonnes que consomme l’ensemble de son bétail. Ces quantités sont cependant en train de diminuer, car la production de biocarburants entraîne automatiquement une production de tourteaux, qui permet de corriger notre dépendance ; je vous en fais crédit, et j’en suis absolument ravi.