Le projet de loi comble cette lacune en définissant la piraterie conformément à la convention de Montego Bay et par référence à des infractions déjà existantes en droit positif, comme ce fut le cas pour les actes de terrorisme.
Je précise, cependant, que l’absence de référence à la piraterie ne faisait naturellement pas obstacle à ce que des pirates puissent être poursuivis en vertu des textes existants, relatifs notamment au détournement de navire, à la prise d’otages et aux violences commises en bande organisée. C’est en effet sur ce fondement que sont détenus et mis en examen à l’heure actuelle les quinze auteurs d’actes de piraterie commis dans les affaires du Ponant, du Carré d’As et du Tanit. Le projet de loi conforte ce dispositif.
Deuxième avancée, le texte prévoit d’inscrire la lutte contre la piraterie au sein du dispositif de l’action de l’État en mer.
Le texte intègre la lutte contre la piraterie à la loi du 15 juillet 1994 relative aux modalités de l’exercice par l’État de ses pouvoirs de police en mer.
Il vise d’abord à accorder aux commandants de navires d’État français des pouvoirs de police judiciaire, qu’il s’agisse de constater les infractions commises, d’en rechercher les auteurs et, le cas échéant, de les appréhender, ou encore de saisir des documents et des objets.
Il prévoit ensuite qu’à défaut de pouvoir être jugés par un État tiers, les auteurs et complices appréhendés par des agents français puissent être jugés par les juridictions françaises, quelle que soit la nationalité du navire ou des victimes.
Troisième avancée, le projet de loi tend à conforter la validité de nos procédures juridiques.
Conformément à l’arrêt Medvedyev de la Cour européenne des droits de l’homme, du 29 mars 2010, le projet de loi intègre au code de la défense trois dispositions permettant une mise en œuvre juridiquement sécurisée des mesures privatives ou restrictives de liberté liées à la répression de la piraterie.
La première tend imposer l’obligation pour le commandant du navire d’informer le procureur de la République dans les meilleurs délais de la mise en œuvre de mesures de coercition à l’égard d’une personne appréhendée.
La deuxième disposition a trait à l’application d’un régime de rétention respectueux des droits et des personnes, avec notification des droits et examen médical ou examen de santé d’une personne appréhendée par une personne qualifiée dans un délai de vingt-quatre heures.
Enfin, la troisième disposition, qui est à l’évidence essentielle, inscrit l’obligation pour le procureur de la République de saisir un magistrat du siège, le juge des libertés et de la détention, dans les quarante-huit heures qui suivent la mise en œuvre des mesures de coercition.
Mesdames, messieurs les sénateurs, s’agissant de ce projet de loi important, je tiens à exprimer, au nom du Gouvernement, comme pour le texte que nous venons d’examiner, ma gratitude sincère et chaleureuse au président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, M. Josselin de Rohan, au rapporteur, M. André Dulait, et, au-delà, à l’ensemble des membres de la commission qui, une fois encore, a accompli un travail remarquable et efficace pour notre pays.
Je tiens également à saluer le souci de concertation qui a présidé au travail réalisé par les deux chambres de notre Parlement et l’esprit de consensus qui s’est manifesté tout au long de cette navette parlementaire fructueuse.
Ce travail nous permet d’aboutir aujourd’hui à un texte équilibré nous offrant l’opportunité d’améliorer la cohérence de l’action de l’État en mer, de garantir encore davantage les droits de la personne et, partant, de conforter la validité juridique des procédures judiciaires que nous mettons en œuvre pour relever le défi de la piraterie. Je le répète, en ce début de xxie siècle, la piraterie est de retour ; il faut la combattre avec détermination !