Le projet de loi, qui a été déposé en premier au Sénat, a pour objet de doter la France d’un cadre juridique et de moyens efficaces pour lutter contre la piraterie. Il comporte trois principaux volets.
Premièrement, il prévoit d’introduire en droit français un cadre juridique pour la répression de la piraterie. Rappelons que la France disposait d’une loi sur la piraterie datant de 1825 mais qui avait été abrogée en 2007.
Le texte qui nous est soumis aujourd’hui détermine les infractions pénales constitutives d’actes de piraterie, les modalités de recherche et de constatation de ces infractions ainsi que les agents habilités à y procéder.
Ces dispositions s’appliqueront aux actes de piraterie commis en haute mer, mais aussi dans les eaux territoriales d’un État à condition que le droit international l’autorise.
Cela permettra de prendre en compte la situation particulière de certains États « fragiles » qui ne sont plus en mesure d’assurer le contrôle de leurs eaux territoriales, à l’image de la Somalie.
Deuxièmement, le projet de loi tend à instaurer dans notre droit une compétence quasi universelle des juridictions françaises pour juger d’actes de piraterie commis hors du territoire national.
Afin d’éviter un engorgement des juridictions françaises, deux conditions sont toutefois fixées : d’une part, les auteurs doivent avoir été appréhendés par des agents français et, d’autre part, les juridictions françaises ne seront compétentes qu’à défaut d’entente avec les autorités d’un autre État pour l’exercice par celui-ci de sa compétence juridictionnelle. Cette deuxième condition vise à prendre en compte le cas des accords conclus par l’Union européenne avec certains pays tiers tels que les Seychelles, qui ont accepté le transfert sur leur territoire des suspects afin qu’ils soient jugés par leurs juridictions.
Actuellement, huit pirates capturés sur dix sont remis en liberté, ce qui favorise un sentiment d’impunité.
En juillet dernier, le secrétaire général de l’ONU a remis un rapport sur le traitement juridictionnel des pirates qui présente différentes options possibles comme la création d’un tribunal régional.
Monsieur le ministre, pourriez-vous – c’est une autre question qui vous est adressée – nous présenter la position de la France sur cette question essentielle des tribunaux régionaux ?
Troisièmement, le projet de loi prévoit la mise en place d’un régime sui generis pour la consignation à bord des personnes appréhendées dans le cadre des actions de l’État en mer. Il s’agit ainsi de répondre aux griefs formulés à l’encontre de la France par la Cour européenne des droits de l’homme dans son arrêt dit Medvedyev du 29 mars 2010.
Dans cet arrêt, la Cour de Strasbourg a constaté une violation par la France de la Convention européenne des droits de l’homme à l’occasion d’une opération d’interception d’un navire suspecté de se livrer au trafic de produits stupéfiants. En l’espèce, il a été reproché à la France de ne pas disposer, à cette époque, d’un cadre légal suffisant organisant les conditions de privation de liberté à bord d’un navire.
Sans modifier l’équilibre général du projet de loi, le Sénat a apporté des améliorations sensibles lors de son examen en première lecture. Je rappelle que la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées avait adopté vingt amendements qui ont tous été confirmés par notre assemblée.