Il est vrai, M. Pillet, qu'il faudrait engager une réforme globale de la procédure pénale. Plusieurs rapports ont été publiés en la matière, qui n'ont pas été suivis d'effets. Je doute qu'il y soit possible d'introduire une telle réforme, qui paraît indispensable, avant la fin du quinquennat. Évidemment, à partir de l'année prochaine, le Sénat peut très bien constituer un groupe de travail sur le sujet.
Ce texte va permettre de distinguer clairement le témoin et le suspect. Le témoin peut être entendu librement ou retenu pendant 4 heures. Le suspect est convoqué et entendu dans le cadre d'une audition libre ou d'une garde à vue. Il peut devenir un présumé coupable et être placé en garde à vue au terme de l'audition libre.
Pour le témoin, il n'y a pas lieu d'ouvrir l'aide juridictionnelle : il ne fait pas l'objet d'une « accusation de nature pénale » au sens de la convention européenne des droits de l'homme.
Sur la question de la copie du dossier accessible au témoin assisté, je précise que le juge d'instruction peut s'opposer à ce que la personne elle-même en prenne connaissance.
Pour répondre à Mme Cukierman, la directive C va imposer l'avocat dans tous les actes d'enquête : interrogatoires, perquisitions, « tapissages », etc. Le ministère de la justice dit qu'il faut du temps pour s'y préparer. Le procureur général Beaume, qui est chargé d'établir un rapport sur la procédure d'enquête pénale, est notamment chargé de préciser comment cette directive peut être transposée.
Pour répondre à M. Collombat, l'audition est dite libre car on peut en partir à tout moment, il n'y a aucune contrainte. Aujourd'hui, un tiers des personnes suspectées le sont dans le cadre d'une garde à vue, deux tiers dans le cadre d'une audition libre. On me dit que ce texte augmentera le nombre de gardes à vue car il accroît le formalisme de l'audition libre.
Concernant l'aide juridictionnelle, la Constitution impose les études d'impact, mais pour moi, elles n'apportent pas grand-chose et celle-ci ne fournit que des évaluations approximatives. Les avocats, qui sont très favorables aux dispositions suivantes, doivent partager le financement de l'aide juridictionnelle. Comment ? La participation des Caisses des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) doit être examinée.
Sur l'article 10, le ministère de l'intérieur m'a donné le projet d'ordonnance, qui n'est pas abouti. Je vais quand même vous lire l'exposé des motifs : « l'article 27 du règlement dit « Dublin III » impose aux États membres l'obligation de créer dans leur droit national un « recours effectif » contre toute décision de transfert d'un demandeur d'asile vers l'État responsable de l'examen de sa demande, assorti d'un effet suspensif ainsi que de l'accès à l'aide juridictionnelle et à l'assistance d'un interprète. Dès lors que ce règlement s'applique depuis le 1er janvier 2014 [...], l'objectif est de créer directement [...] ce recours spécifique au bénéfice des demandeurs d'asile faisant l'objet d'une décision de transfert. La personne concernée pourra ainsi contester cette décision en formant un recours en annulation, de plein droit suspensif, devant le président du tribunal administratif dans un délai de sept jours et, saisi d'un tel recours, le juge statuera sur la régularité ou le bien-fondé de la procédure « Dublin » dans un délai de quinze jours [...] Outre l'institution de ce recours protecteur à l'égard des personnes sous procédure « Dublin », le présent texte a également pour objet, d'une part, de consacrer dans la loi le droit de ces personnes à rester sur le territoire français jusqu'à leur transfert effectif et, d'autre part, de faire figurer le régime des décisions de transfert dans le livre VII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), consacré au droit d'asile, et non dans le livre V relatifs aux mesures d'éloignement ». Voilà ce que serait l'objet de ce texte.