Notre commission s'est saisie pour avis des premiers articles, qui posent les grands principes de la politique agricole et l'inscrivent dans une perspective de développement durable réaliste ; des articles concernant la modernisation de nos outils fonciers, pour mieux lutter contre la consommation d'espaces agricoles ; des articles consacrés aux pesticides, qui perfectionnent le dispositif de mise sur le marché et de suivi des produits phytosanitaires, tout en encourageant la réduction des intrants ; enfin, du titre relatif à la forêt parce que tous les acteurs attendent une inflexion forte en faveur d'une gestion plus durable des forêts.
Ce texte offre un cadre propice au développement de l'agro-écologie, conciliant impératifs de compétitivité économique et de compétitivité environnementale. Il s'agit là d'un réel changement de paradigme : cessant d'être perçue comme une contrainte, en raison de l'accumulation de normes imposées d'en haut, la dimension environnementale devient un atout pour la croissance et le développement. Aussi faut-il se réjouir de la création des groupements d'intérêt économique et environnemental (GIEE), destinés à favoriser ces pratiques, en s'inspirant des différentes expériences étrangères menées en ce sens.
À l'article 1er, la commission du développement durable a adopté trois amendements pour promouvoir des productions agricoles locales. À l'article 3, nous avons remplacé les termes de « capitalisation des résultats » par ceux de « diffusion et de réutilisation des résultats obtenus dans le cadre du GIEE », plus explicites.
À l'article 10 bis, qui ouvre le droit d'opposition à l'enregistrement d'une marque aux appellations d'origine et indications géographiques, nous avons supprimé la restriction de ce dispositif aux seuls produits « similaires » : le détournement de notoriété concerne aussi les autres.
Notre commission, qui a adopté une définition des produits de biocontrôle, a également souhaité sécuriser le transfert à l'ANSES de la mission de délivrance des autorisations de mise sur le marché (AMM) pour les produits phytosanitaires. Ce transfert est bienvenu : la double instruction par le ministère et par l'ANSES des dossiers crée des retards néfastes, en particulier pour certaines cultures maraîchères en attente cruciale d'options de traitement phytosanitaire. L'enjeu est de simplifier le droit et les procédures. Il faut toutefois respecter le principe fondamental de séparation de l'évaluation et de la gestion du risque. C'est dans cette optique que la commission a adopté trois amendements. Le premier dote les inspecteurs de l'ANSES de pouvoirs d'inspection et de contrôle, nécessaires pour mener correctement leur nouvelle mission en matière d'autorisation et de suivi des mises sur le marché. Le deuxième réécrit l'article 22 bis : nous avons renommé le conseil d'orientation créé par les députés « conseil de suivi des autorisations de mise sur le marché ». Y siègeront des représentants des ministères de tutelle ainsi que des experts de l'ANSES. Ses avis seront publics, la transparence étant une garantie d'indépendance. Enfin, un troisième amendement donne au ministre de l'agriculture le pouvoir de prendre en urgence toute mesure de retrait ou d'interdiction d'une autorisation de mise sur le marché. Dans l'intérêt de la santé publique ou de l'environnement, le ministre doit pouvoir intervenir en urgence, sans préjudice de la compétence confiée à l'ANSES. Ainsi le pouvoir politique reste responsable en matière de pesticides. Comme l'a expliqué le directeur général de l'ANSES en audition, ce qui est compliqué, ce n'est pas de donner une AMM, mais bien de la retirer à temps.
Enfin, à l'article 29 relatif à la forêt, nous avons supprimé la disposition qui prévoit l'élaboration annuelle par le département, en concertation avec les communes et EPCI concernés, d'un schéma d'accès à la ressource forestière. Ce schéma constituerait une formalité administrative supplémentaire lourde pour les communes, qui n'ont pas nécessairement les moyens d'adapter leur voirie. En outre, la problématique est davantage celle de l'accès au bois au sein même des parcelles forestières.
Les députés avaient ajouté une obligation d'incorporation de bois dans les constructions neuves. Cette disposition comporte un risque sérieux d'inconstitutionnalité. La filière bois construction ne semblant pas encore à même de répondre à la demande, notre commission, soucieuse d'encourager des productions territorialisées et durables, vous propose la suppression de ce dispositif.
Sous réserve de l'adoption de ces amendements, nous soutenons cette loi qui accompagne les agriculteurs vers la modernité, à la fois économique au travers des enjeux de compétitivité, et environnementale, dans le sens des attentes profondes de nos concitoyens.