Ne pourrions-nous pas établir trois scénarios : celui de nos rêves, où tout se passe bien, le scénario moyen dans lequel évolutions positives et négatives s'équilibrent et enfin, le scénario le plus inquiétant qui pourrait aiguillonner notre réflexion ? Il me semble que nous partageons le même constat sur ce qui ne va pas tandis que dans l'autre atelier, un scénario rêvé a été identifié. Le principal déficit de notre réflexion concerne le point de savoir si les normes que nous produirons auront un effet sur l'émergence de ce que nous voulons ou de ce que nous ne voulons pas. Nous abordons trop souvent cette question des normes de façon négative alors que notre travail devrait être de nous demander quels sont les textes à même de favoriser la France que nous souhaitons dans dix ans. Notre conception de la loi date du XIXe siècle. À l'occasion d'une récente rencontre, nous avons découvert que les parlementaires allemands avaient une vision de la loi inverse de la nôtre. Nous savons bien que les lois que nous votons ne vont pas résoudre la crise du fordisme ou du taylorisme, ni transformer profondément notre modèle social. Le paradoxe est que ces évolutions reposent sur des consensus réalisés dans la société alors qu'ici, au Parlement, le consensus est un gros mot. Une révolution politique reste à opérer pour nous amener à davantage travailler ensemble au lieu de toujours insister sur ce qui nous sépare. À la différence de l'Allemagne, l'idée de coalition ne s'applique chez nous qu'au niveau d'une commune ou d'une région, mais hélas pas au-delà.
Si nous ne parvenons pas à faire le lien entre le politique, l'économique et le social, notre photographie de la France dans dix ans ressemblera à ces vieilles photos colorisées. Or, ce n'est pas ce que nous voulons. De plus, je pense que notre contribution collective sera regardée de très près.