Intervention de Thomas Cazenave

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 15 janvier 2014 : 1ère réunion
Audition de M. Thomas Cazenave directeur général adjoint de pôle emploi chargé de la stratégie et des relations extérieures et de Mme Firmine duRo adjointe chargée des relations extérieures

Thomas Cazenave, directeur général adjoint de Pôle Emploi, chargé de la stratégie et des relations extérieures :

À titre d'introduction, nous aimerions présenter Pôle Emploi en deux temps. D'abord, et même si cela ne correspond pas tout à fait à votre démarche prospective, nous voudrions vous entretenir des outils et dispositifs dont dispose Pôle Emploi pour accompagner les mutations économiques et les transitions professionnelles. Il s'agit là d'expliquer comment nous avons fait de l'orientation et de la formation les bases du service que nous rendons aux demandeurs d'emploi et aux entreprises. Ensuite, nous tracerons quelques perspectives et nous livrerons nous-mêmes à un exercice prospectif en identifiant les tendances du marché du travail à dix ans. Quel sera leur impact sur l'offre de service de Pôle Emploi, sur ce que l'on attend d'un service public de l'emploi au sens large ? Quelles mutations devront être engagées au plus vite afin de pouvoir accompagner ces transitions professionnelles ?

Quelques mots, donc, pour expliquer comment Pôle Emploi accompagne la transition professionnelle et les mutations économiques sur le territoire français. Je tiens d'abord à insister sur son principal domaine d'expertise. À court et moyen termes, il s'agit de notre capacité à identifier les besoins de formation et les caractéristiques du marché du travail. Nous distinguons les secteurs qui recrutent de ceux qui ne recrutent pas et partageons ensuite cette information.

Cette capacité d'analyse du marché du travail est essentielle, tant au niveau national que dans les différents territoires. Pour cela, nous disposons de plusieurs moyens. L'enquête « besoins en main-d'oeuvre », que vous connaissez sans doute, est l'outil principal mobilisé par Pôle Emploi dans les régions pour évaluer les besoins futurs de recrutement des entreprises et planifier l'achat de formations à l'échelle régionale. Les résultats de ces enquêtes auprès des employeurs constituent des prévisions non pas à dix ans mais bien à douze ou dix-huit mois. Dans le même esprit, nous mettons en place des lieux de rencontre avec les entreprises, notamment à travers nos « Clubs RH ». Les représentants d'entreprises nous y informent des tendances de recrutement, des compétences attendues et d'éventuelles tensions sur le marché du travail. Pour répondre à ces besoins, nous proposons deux types de formations : des cycles de formation individuels et collectifs traditionnels d'une part, et des formations spécialisées préalables à l'emploi d'autre part. Nous réalisons ensuite des enquêtes à la sortie de nos formations afin d'en mesurer l'efficacité.

Nous sommes donc détenteurs d'une expertise que nous mettons à la disposition du plus grand nombre par le biais de propositions de formation, mais aussi au travers de l'information en ligne.

Au-delà de notre expertise, nous mettons actuellement l'accent sur le rôle joué par nos conseillers. L'orientation professionnelle doit être la pierre angulaire du travail de Pôle Emploi. Pour pouvoir développer des projets professionnels avec les demandeurs d'emploi, nous avons investi dans la formation de nos 30 000 conseillers à l'orientation. Le but est de pouvoir proposer deux niveaux de service. Le premier est assuré par les conseillers classiques. Nous travaillons à ce qu'ils soient à même de distiller les premiers éléments de l'orientation : une analyse du marché du travail, des indications sur les formations à suivre ou encore des conseils pour obtenir un emploi dans un secteur en particulier. Le second est assuré par des conseillers spécialisés, qui sont en fait les anciens psychologues du travail de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa), que Pôle Emploi a intégrés. Leur mission est d'approfondir le travail des premiers.

Nous étudions l'enjeu de l'orientation et de la formation au travers du plan gouvernemental dit « formation et orientation ». Ce plan prévoit la formation de 30 000 demandeurs d'emploi. Concrètement, comment avons-nous procédé ? Cette fois-ci, nous ne sommes pas partis du plan national pour nous demander quels étaient les besoins de tel ou tel secteur. Nous avons renvoyé ce diagnostic à l'échelon local où nous l'avons mené en coopération avec - entre autres - les conseils généraux. Nous avons ensuite effectué les achats de formation correspondants pour soulager les corps de métiers manquant de main-d'oeuvre. En matière d'accompagnement conscient du contexte économique, je pense que c'est là une méthode exemplaire.

Nous travaillons à consolider notre lien avec l'éducation nationale et l'enseignement supérieur. On constate un décalage entre les attentes des étudiants et les réalités du marché du travail, qui débouche trop souvent sur la création de nouveaux demandeurs d'emploi. Nous voulons faire profiter de notre expertise, que ce soit par l'intermédiaire des bureaux d'aide à la recherche d'emploi présents dans les universités, ou directement auprès des jeunes eux-mêmes. Pour cela, il faut que nous puissions mettre à leur disposition des outils en libre-service. Ils pourraient ainsi s'auto-diagnostiquer sans nécessairement passer par Pôle Emploi.

Nous avons entamé ce virage. À compter de février, nous expérimenterons dans certaines régions une nouvelle offre de service « 100 % web ». Nous avons des difficultés à faire venir les jeunes dans nos agences. Il nous faut donc nous adapter à leurs spécificités et rendre notre service attractif pour eux. C'est dans cet esprit que nous avons formé nos conseillers à opérer à distance. Cela représente beaucoup de travail mais c'est intéressant.

Le projet de loi sur la formation professionnelle comporte deux enjeux. D'une part, les « comptes personnels de formation » qui constituent un projet important. C'est un outil que demandeurs d'emploi et conseillers seront appelés à utiliser dès demain. Il s'agit pour nous de faciliter la prescription, et plus généralement d'accroître l'effort global consacré à la formation des demandeurs d'emploi. C'est là un objectif de notre plan personnel de formation. D'autre part, ce prochain texte de loi définit Pôle Emploi comme un « conseiller en évolution professionnelle ». C'est en effet notre coeur de métier.

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