Intervention de Jean-Jacques Hyest

Réunion du 24 février 2014 à 16h00
Géolocalisation — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest :

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, monsieur le président-rapporteur, mes chers collègues, de nombreux sujets ont été évoqués. Revenons à la géolocalisation qui est, je le rappelle, un moyen technique permettant la localisation en temps réel d’un individu.

Monsieur le président Sueur, nous avons eu récemment quelques difficultés avec la géolocalisation dans le domaine des écoutes administratives. Une polémique s’est développée. Il n’y avait pas de réglementation, car la géolocalisation n’existait pas il y a encore quelques années. À l’inverse, les écoutes téléphoniques sont très réglementées, dans le domaine du renseignement comme dans le domaine judiciaire.

La Cour de cassation s’en est rendu compte. Le problème vient du fait que le contrôle de constitutionnalité n’empêche pas le contrôle de conventionalité. Il peut arriver que le Conseil constitutionnel juge une loi conforme à la Constitution, et que la Cour de cassation, davantage que le Conseil d’État d’ailleurs, estime qu’elle est contraire aux conventions internationales, notamment à la Convention européenne des droits de l’homme.

Derrière tout cela se pose la question plus large que nous avons évoquée cet après-midi, madame le garde des sceaux, du statut du parquet. En effet, on nous dit que les membres du parquet ne sont ni impartiaux ni indépendants.

En l’espèce, nous nous sommes retrouvés face à la décision de la Cour de cassation, comme cela avait d’ailleurs été le cas voilà deux ans sur la garde à vue. À l’époque, la Cour avait exigé la présence immédiate des avocats, alors que le Conseil constitutionnel avait accordé un délai de six mois.

Il en va de même pour la géolocalisation. Les procédures ont été interrompues. Vous avez dû, madame le garde des sceaux, donner des instructions pour arrêter les mesures de géolocalisation, qui auraient pu, sinon, conduire à l’annulation des enquêtes. Or les services d’enquête ont besoin de recourir à ces techniques pour exercer convenablement leur mission. Il y a donc véritablement urgence.

Les parlementaires ont, me semble-t-il, trouvé un consensus s’agissant de l’encadrement du recours à ces techniques. M. le rapporteur nous a présenté les conclusions de la commission mixte paritaire : le consensus consiste d’abord à prendre rapidement une décision en ce domaine. Notre collègue François Pillet avait d’ailleurs pris l’initiative de proposer une réforme du dispositif de géolocalisation censuré par la Cour de cassation, qui allait dans le même sens que le projet gouvernemental.

La jurisprudence indique à raison que la géolocalisation constitue une ingérence dans la vie privée des citoyens. Le recours à ce dispositif doit donc être strictement encadré.

Conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, cette géolocalisation doit être limitée aux faits les plus graves et placée sous le contrôle strict du « magistrat compétent » – ce qui, à nos yeux, englobe le parquet.

Sur ces deux points essentiels du dispositif, quelques divergences s’étaient fait jour entre le Sénat et l’Assemblée nationale. La commission mixte paritaire a permis de faire émerger un compromis, puisque le texte qui est sorti de ses travaux retient deux cas de figure : d’une part, les crimes ou les délits punis d’une peine d’au moins cinq ans d’emprisonnement et, d’autre part, les délits d’atteinte aux personnes punis d’au moins trois ans d’emprisonnement, auxquels ont été ajoutés l’évasion et le recel de criminel.

Cela dit, madame le garde des sceaux, je m’interroge. On fait exploser l’échelle des peines, …

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