Intervention de Jean-Marie Bockel

Réunion du 25 février 2014 à 14h30
Autorisation de prolongation de l'intervention des forces armées en république centrafricaine — Débat et vote sur une demande du gouvernement

Photo de Jean-Marie BockelJean-Marie Bockel :

Par ailleurs, parallèlement aux efforts d’interposition, il faut au plus vite enclencher un processus de réconciliation nationale. C’est un chantier considérable pour la présidente de transition Catherine Samba-Panza. Il lui appartient de créer les conditions de l’union nationale, car le facteur religieux, convoqué par les chefs de guerre, a profondément divisé les communautés, qui vivaient pourtant en harmonie dans le pays depuis des décennies. Comme l’affirme l’archevêque de Bangui, « pour avancer vers la réconciliation, chacun doit désormais prendre conscience des exactions commises par les deux camps, anti-balaka et ex-Séléka. C’est pourquoi le pardon passe nécessairement par la réparation ».

Les efforts de médiation de la communauté de Sant’Egidio – celle-ci est intervenue à plusieurs reprises dans des conflits en Afrique avec une certaine efficacité, en particulier au Mozambique –, sous l’égide de laquelle a été signé à Rome en novembre dernier un « pacte républicain », pourraient faciliter la mise en place des mécanismes concrets de réconciliation, tout en établissant un dialogue politique inclusif avec les forces vives du pays.

Dans le même temps, il faut s’attaquer aux enjeux plus profonds de la gouvernance et du développement, car il ne pourra y avoir de sécurité durable sans reconstruction de l’État et sans développement. L’économie centrafricaine est au point mort ; elle a beaucoup reculé d’une année sur l’autre. Ce qu’il reste des structures économiques, mais aussi les municipalités, les ONG et les associations locales ont un rôle essentiel à jouer pour relancer la vie économique et reconstruire un vouloir-vivre ensemble. Si la situation sécuritaire le permet, pourquoi ne pas renforcer progressivement la présence de l’Agence française de développement, dont l’expertise serait déterminante pour accompagner ces projets en Centrafrique ?

Enfin, je souhaite revenir, avant de conclure, sur la dramatique crise humanitaire que traverse la RCA. Selon l’ONU, près d’un million de personnes ont été déplacées depuis le début de la crise, dont 60 % d’enfants. Des milliers de personnes ont également fui vers les pays voisins – Cameroun, Tchad, etc. Selon la secrétaire générale adjointe des Nations unies aux affaires humanitaires, plus de la moitié de la population centrafricaine requiert une assistance immédiate.

À ce jour, les bailleurs de fonds ont promis 207 millions de dollars pour financer l’aide humanitaire en Centrafrique, mais seulement 28 % de ces fonds ont été engagés. Le plan de réponse stratégique de l’ONU, d’un montant total de 551 millions de dollars, n’est financé qu’à hauteur de 15 %.

Monsieur le ministre, alors que l’aide internationale est clairement insuffisante face à l’urgence de la situation, quelles mesures la France et ses partenaires pourraient-ils mettre en œuvre pour en accélérer la distribution, notamment vers le camp de M’poko, où près de 100 000 personnes vivent dans des conditions terribles ?

Les défis, qu’ils soient sécuritaires, politiques ou humanitaires, sont nombreux en RCA, et le chemin vers la paix et la stabilité sera long et exigeant. C’est en premier lieu sur les dirigeants et le peuple centrafricain que repose la lourde responsabilité d’entamer le processus de réconciliation indispensable pour sortir le pays des massacres et du chaos.

Toutefois, c’est un poids que, seuls, sans le soutien des États africains et de la communauté internationale, ils pourront difficilement porter. La France, en raison de sa proximité historique et de sa place sur la scène internationale, se doit d’apporter sa contribution à cet effort de stabilisation. C’est notre responsabilité partagée.

Sous ces réserves, en formant le souhait que se tienne dès que possible un nouveau débat d’évaluation de la situation, le groupe UDI-UC votera, dans sa très grande majorité, pour la prolongation de l’intervention de nos forces armées en RCA.

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